Les cyclistes des champs plébiscitent les enrobés végétaux

L’écoconception des infrastructures cyclables franchit une étape, avec la publication d’un guide technique co-signé par l’Association française pour le développement des véloroutes et voies vertes (AF3V) et France Nature Environnement. Les usagers et les défenseurs de la nature bénéficient de l’appui technique de Colas et d’Eiffage Route.

Véloroute
Aire de repos sur la véloroute de la Somme

L’enrobé convient mieux aux cyclistes et aux protecteurs de la nature que le stabilisé. Cette prescription contre-intuitive rassemble les signataires d’un guide de 36 pages publié fin mai sous le titre « Revêtements des Voies Vertes : déjouer les idées reçues pour un choix écoresponsable ». Le document passe les véloroutes aux cribles de la durabilité, des coûts, du confort, de l’inclusivité et de l’intégration paysagère.

Economie de sable

L’économie de matériaux vient en tête des arguments techniques cités par l’Association française des véloroutes et voies vertes (AF3V) et par France Nature Environnement, co-auteurs du guide. « Les grands opérateurs maîtrisent les enrobés sans hydrocarbure ; ils y intègrent plus de 40 % de gravier recyclé », ajoute Pierre Hémon, président de la première de ces deux associations. Toutes deux rejoignent la recommandation non opposable émise par l’Etat dans le schéma national des véloroutes et voies vertes.

La vulnérabilité du stabilisé aux inondations renforce la démonstration étayée par l’exemple du tronçon de la Via Rhôna (815 km entre le lac Léman et la Méditerranée) situé à Vienne-Condrieu (Isère). Immergée plusieurs semaines par an, la voie en ressort indemne grâce à son revêtement en enrobé, alors qu’elle se dissoudrait avec des matériaux pulvérulents. Dans des chaussées inaccessibles aux camions, la faible épaisseur des sous-couches ajoute un argument économique en faveur de la solution la plus confortable.

Le choix de l’inclusivité

L’AF3V profite du guide pour mettre en exergue ses valeurs d’inclusivité : « Interdites aux véhicules motorisées, les voies vertes accueillent les rollers, les familles avec enfants et les fauteuils roulants », développe Pierre Hémon. Sous cet angle aussi, l’enrobé emporte l’adhésion des cyclistes.

Plus délicate, la cohabitation avec la faune sauvage a suscité un travail conjoint de l’AF3V avec la Fédération des conservatoires d’espaces naturels, pour que la conception des infrastructures facilite la régulation de la fréquentation humaine. Cet enjeu se révèle particulièrement sensible dans des tunnels prisés par les chauves-souris, comme celui du Tracol, en Haute-Loire. Onze espèces de chiroptères habitent dans cet ouvrage de plus de 2 km sur la voie Fluvia (90 km dans la Loire, la Haute-Loire et l’Ardèche).

Un marché porteur

La première contribution de l’association à l’élaboration d’une doctrine technique intervient dans un contexte porteur : « A l’inverse du marché des routes et des autoroutes, celui des véloroutes offre un potentiel de croissance important », souligne Pierre Hémon. L’AF3V recense 300 projets en cours. Les 5000 km programmés d’ici à 2030 dans le schéma national des véloroutes et voies vertes porterait le total à 20 000 km.

« Très peu, comparé au million de km de routes », commente le président. L’AF3V identifie un important potentiel dans les 8000 km de chemins de halage, les 10 000 km de voies ferrées désaffectées et les chemins agricoles. Comme l’Allemagne, l’Alsace valorise l’accessibilité cyclable de ses vignobles. « Ces aménagements ouvrent une voie de réconciliation entre les populations urbaines et rurales », considère Pierre Hémon.

Des maîtres d’ouvrage demandeurs

Le potentiel économique des véloroutes a joué son rôle dans les partenariats noués par l’AF3V et France Nature Environnement, à l’occasion de la rédaction du guide. Colas et Eiffage Routes y ont apporté leur contribution. Chacune des deux entreprises routières bénéficie de deux pages, pour promouvoir sa solution d’enrobés à base de liants végétaux : Colclair pour Colas, Bioklair pour Eiffage.

L’AF3V enregistre de nombreux appels, depuis la publication du guide à l’occasion du colloque « Voies vertes : parlons revêtement », le 30 mai à Avignon. « Les demandes proviennent des départements et des intercommunalités, principaux maîtres d’ouvrages, mais aussi des bureaux d’études spécialisés », détaille Pierre Hémon.

Prochain rendez-vous technique

Représentative des cyclotouristes des champs tout comme la Fédération des usagers de la bicyclette (Fub) fédère les rouleurs urbains du quotidien, l’AF3V prend goût à la technique. « Autant les infrastructures ont beaucoup progressé en quantité et qualité dans les villes, autant la situation reste très hétérogène dans les territoires ruraux », note son président.

En 2025, un prochain colloque traitera de la reconversion en véloroute des petites routes de campagne, domaine dans lequel le département de la Manche fait figure de pionnier. L’association envisage également d’impulser une thèse sur la prévention des désordres provoqués par les poussées racinaires.

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