« Le point fort de Cerway, c'est son aspect global », Patrick Nossent, président de Cerway, Certivéa et Céquami

Après "Certivéa International , lancé en juin 2012, un nouveau référentiel du certificat français HQE est mis en œuvre pour conquérir les marchés étrangers, qui couvre aussi bien le non résidentiel que le résidentiel et l’aménagement. Le président de Cerway compte sur cette offre élargie pour concurrencer LEED et BREEAM. 

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Patrick Nossent a annoncé le lancement de Cerway, lors du Sommet mondial des villes durables Ecocity, à Nantes, le 26 septembre

Avant Cerway, quel champ couvrait la Haute qualité environnementale (HQE) à l’international et que représentait-elle ?

Patrick Nossent. Elle était exclusivement centrée sur les bâtiments non résidentiels neufs. Elle résultait donc de l’action de Certivéa, qui a lancé une offre spécifique hors des frontières françaises en juin 2012. Nous avons remis les premiers certificats issus de ce nouveau référentiel en octobre 2012. Il existe également au Brésil un partenariat et une offre globale, sous la marque "Aqua", avec un partenaire local qui a transposé la méthode HQE dans la réalité de ce pays. Il vise les bâtiments résidentiels comme non résidentiels.

Au total, nous sommes présents dans huit pays et environ 120 opérations ont été certifiées en dehors de France, dont 100 au Brésil (où un tiers sont résidentiels). Une vingtaine d’opérations non résidentielles ont été réalisées en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Italie, en Belgique, au Luxembourg, en Algérie et au Maroc.

Après plus d’un an d’existence, nous faisons le constat que le nouveau référentiel "Certivéa International" fonctionne à l’international. Nous avons pu mesurer l’attente existant pour la HQE, qui est une alternative crédible aux systèmes anglo-saxons. HQE répond à ces attentes par ses caractéristiques différenciatrices. Quant au bilan concret de "Certivéa international", nous sommes désormais présents au Maroc, ce qui n’était pas le cas pas avant. Dans ce pays, nous avons désormais une opération phare à l’international, celle de la station touristique de Taghazout, en bordure de mer (ouest du pays), qui est à la fois HQE non résidentielle, mais aussi "Territoire" (aménagement) de manière anticipée, et qui va être HQE résidentielle dans le nouveau système.

La grande leçon qu’on peut tirer de cette année avec "Certivéa International", c’est l’attente pour une offre globale. Pour le non résidentiel, mais aussi le résidentiel, l’aménagement, le neuf, la rénovation, l’exploitation. Tout cela conduit naturellement à Cerway.

En quoi Cerway constitue-t-il un progrès, par rapport à "Certivéa international" ?

PN. Cerway nous permet, grâce à l’expertise de Qualitel (maison mère de Cerqual) dans le domaine du logement, de compléter l’offre de Certivéa avec le non résidentiel et l’aménagement. Cette offre globale comporte également un volet formation et reconnaissance de la formation des professionnels, appelés des "référents certification HQE" – l’équivalent d’un "BREEAM assessor" ou d’un "LEED AP" – auquel le client n’est obligé de recourir dans le système HQE, mais qui va l’aider à améliorer son opération. Tout cela n’existait pas   dans l’offre de Certivéa.

Cerway permet aussi de simplifier une offre un peu complexe en France, avec plusieurs marques qui co-existent (Certivéa, Cerqual et Céquami). Il y aura, pour l’étranger, un guichet et une marque uniques. Ensuite, des référentiels ont été travaillés spécifiquement pour Cerway. Ils sont génériques, dans le sens où ils peuvent être utilisés indistinctement dans tous les pays. Ainsi, les mêmes "process" sont mis en œuvre pour le résidentiel comme pour le non résidentiel, dans le cadre de la construction, de la rénovation et de l’aménagement, ce qui n’est pas le cas en France. Il est à noter pour l’exploitation, que seul le non résidentiel est couvert par Cerway. Cerqual vient juste, en effet, de mettre en place son référentiel pour le résidentiel en France.

Enfin, la simplification des niveaux déjà appliquée à "Certivea international" (Bon, Très bon, Excellent, Exceptionnel) va s’appliquer à Cerway, ainsi que la distinction du certificat en 4 thèmes récapitulant les 14 critères de sélection qui permettent de traiter de l’énergie, de l’environnement, de la santé et du confort, le tout se retrouvant dans le "Passeport bâtiment durable".

Quels sont les ressources et moyens de Cerway pour se développer à l’international ?

PN. Cerway dispose d’une équipe de quatre personnes au démarrage, qui a vocation à s’étoffer. Elle sera dirigée par Corinne Block-Raguin et s’appuiera beaucoup sur les forces vives de Certivéa, du CSTB et de Cerqual.

Au-delà de Cerway, tout un mouvement fonctionne en réseau, avec tout d’abord l’accompagnement des clients qui connaissent déjà la HQE et qui ont une activité à l’international. Nous avons la chance d’avoir de très grands maîtres d’ouvrage, français ou utilisant la HQE en France, qui sont présents partout dans le monde : BNP-Paribas, Bouygues, Accor, Total, Allianz… Nous comptons aussi sur la formation des "référents certification HQE" dans le monde, qui pourraient accompagner les clients. Une première formation des référents de divers pays aura d’ailleurs lieu en France, les 9 et 10 décembre prochain. Le troisième moyen de développement, ce sont des partenariats du type de celui avec le Brésilien Aqua. Nous en cherchons d’autres, dans des pays cibles identifiés. Nous comptons enfin être présents sur les grands salons internationaux. J’étais récemment à Expo Real à Munich, nous serons présents à Pollutec Maroc prochainement, au Fimai (Brésil)…

Qui devez-vous faut convaincre en priorité ? Les investisseurs ?

PN. Les investisseurs, mais aussi les promoteurs et les utilisateurs. Les premiers pour faire valoir un certain savoir-faire quand ils mettent sur le marché certains produits, les seconds pour valoriser leurs actifs auprès des investisseurs, les troisièmes pour valoriser la marque auprès des salariés qu’ils vont loger. Les autres acteurs à convaincre, car ils contribuent à la propagation de la HQE, sont les vecteurs de savoir-faire, c’est-à-dire les ingénieristes et les architectes. Au sein du concept de "référent HQE", ils vont pouvoir proposer des offres de construction durable et les accompagner jusqu’à l’exploitation. Ce modèle n’existe pas actuellement avec la HQE, y compris  en France. Enfin, il faut convaincre les partenaires internationaux. Un organisme, plutôt que de créer son propre système, va s’appuyer sur l’expérience de la HQE pour développer un système à la fois internationalement reconnu et 100% adaptés au marché du pays, ce qui permet d’aller plus vite, d’être plus efficace et ensuite de travailler en réseau avec nous sur les évolutions techniques. Nous avons un partenariat avec le Brésil, mais nous avons maintenant des demandes venant d’autres zones, dans lesquels les systèmes anglo-saxons existent déjà. Le Canada par exemple, où LEED est dominant, mais où investisseurs et des bureaux d’études ont envie de disposer d’une alternative.

Deux grands constructeurs français – Vinci, Bouygues – sont très présents à l’international sur des chantiers de bâtiments certifiés, notamment LEED ?  Ne faut-il pas les convaincre d’exporter la HQE ?

PN. Bien sûr, et il y a sans doute moyen de les convaincre. Mais ce que nous disent ces groupes est que, sur certains marchés, on leur demande de faire du LEED, sur d’autres du BREEAM, sur d’autres du CASBEE ou du HQE. Nous préfèrerions qu’ils proposent également de la HQE, mais ils répondent avant tout à la demande de leurs clients.

Avec Cerway, le champ couvert est complet. Quel est le segment qui a le plus fort potentiel ?

PN. Notre point fort, c’est justement l’offre globale. Avec Certivéa et Cerqual, on est immédiatement sur un même niveau d’expérience et de technicité sur l’ensemble des bâtiments, ce qui n’est pas le cas de nos concurrents. Donc la différence va se faire sur notre expérience et notre savoir-faire dans l’aménagement et le logement, qui sont incomparables dans le monde, car tous les certificats sont au même niveau pour les bâtiments de bureaux.

Qu’est-ce qui distingue HQE de LEED et de BREEAM ?

PN. Il y a quatre choses qui nous distinguent. D’abord, nos systèmes sont dirigés vers la performance. Nous ne donnons pas des points en fonction de la technologie mise en œuvre, mais en fonction de la performance obtenue. Par exemple, nous n’attribuons pas des points parce qu’il y a de la toiture végétalisée ou du double vitrage. Nous le faisons parce qu’il y a un moindre rejet de pluies dans le réseau ou des économies d’énergie. Or, un double vitrage pourra ne pas être performant du point de l’économie d’énergie. Ce système performatif donne au concepteur toutes les clés, toutes les possibilités pour trouver l’optimum technico-économique par rapport au contexte de l’opération. Au lieu d’empiler de la technologie, nous récompensons ce qui est juste et efficace. Cette méthode permet de s’adapter à tout type de climat, toute performance. Par ailleurs, la HQE est technologiquement fondée. Elle est le résultat de travaux issus de la recherche et de plus de vingt ans d’expérience. Pour LEED, le partenariat avec les centres de recherche commence à peine. Cette avance se retrouve dans les critères, par exemple dans l’acoustique qui vient juste d’être traitée dans LEED. De même, nous sommes très en avance sur le confort intérieur. Enfin, dans la HQE à l’internationale, les critères sont indépendants des règlementations locales ou, au contraire, les assimilent lorsqu’il s’agit d’un partenariat. Les pays peuvent soit utiliser directement nos référentiels internationaux, soit faire reconnaître leurs règlementations locales. C’est là qu’intervient le principe d’équivalence. Notre partenaire va nous dire : voilà l’outil que j’utilise, quel est votre équivalent dans votre système international. Ainsi, pour le Brésil, nous avons inséré les règlementations locales.

Quelles sont les zones géographiques ayant le plus fort potentiel ?

PN. Celles dans lesquelles nous sommes déjà présents, et dans lesquelles nous voulons nous développer ; et celles où nous ne sommes pas encore présents, mais qui sont considérées comme cibles car elles ont un important potentiel : la Belgique et le Luxembourg ; la Pologne et l’Algérie, où nous ne sommes pas encore présents ; le Maroc et le Brésil, où nous allons renforcer notre présence ; le Canada, et pas seulement Québec, mais aussi les zones anglophones, notre travail de prospection étant bien avancé dans ce pays ; et bien sûr la Chine, où nous n’avons encore certifié aucun bâtiment, mais où nous figurons dans plusieurs consortiums français qui proposent des opérations. Quant à l’Afrique subsaharienne, nous espérons bientôt pouvoir vous annoncer une opération de certification.


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