La pandémie de Covid-19 a constitué un accélérateur incroyable pour le numérique dans tous les secteurs, y compris le BTP. L’une des conséquences de cet engouement réside dans l’intérêt que présente le jumeau numérique pour tous les acteurs de la filière ou presque. Les maîtres d’ouvrages en particulier ceux qui possèdent un vaste patrimoine s’y intéressent sérieusement et commencent même à le demander dans leurs marchés. « Sauf qu’il n’existe pas de définition précise et encore moins de logiciel pour créer des jumeaux numériques », rappelle Nicolas Mangon, vice-président des départements AEC [architecture, ingénierie et construction selon l’acronyme anglais, NDLR] et marketing d’Autodesk. C’est la raison pour laquelle les grands ingénieristes qui délivrent des jumeaux numériques travaillent uniquement sur-mesure avec des modèles digitaux conçus pour des chantiers spécifiques, comme la rénovation du lycée de Bréquigny en Bretagne, par exemple.
Cinq niveaux de maturité du jumeau numérique
Afin de progresser sur le sujet, les équipes d’Autodesk ont commandé un rapport au cabinet de conseil spécialisé dans le BTP, Verdantix. Intitulé « Smart innovators : digital twins for buidlings », le document a été remis en juin 2020. Il définit cinq niveaux de maturité. Le premier est descriptif, avec un modèle numérique qui utilise la modélisation 3D, le Building information modeling (BIM) et un Système d’information géographique (SIG). « Cette réplique digitale de l’actif n’est pas liée à l’ouvrage physique ou à ses objets connectés », précise le rapport. « Et même ça, personne ne sait le livrer, estime Nicolas Mangon. Les entreprises donnent plusieurs modèles, l’un pour les clashs, l’autre pour la logistique, l’ensemble est inutilisable. »
Du modèle informatif au jumeau numérique autonome
Le deuxième niveau est un jumeau « informatif », il est simplement connecté à l’ouvrage physique, alors que l’étape suivante consiste à créer un « jumeau prédictif », contenant davantage de données organisées dans une granulométrie plus fine. Toujours selon Verdantix, ce modèle présente « des capacités de contrôle et d’action sur l’ouvrage physique avec la collecte d’informations en temps réel ou presque et l’usage du « machine learning » et du « big data ». Enfin, les modèles les plus aboutis savent utiliser ces données pour mettre en place des actions à partir de simulations en temps réel ou de scénarios possibles. C’est le « jumeau numérique complet ». Tandis que le « jumeau autonome » serait même capable d’apprendre seul à partir de sources de données variées et « d’agir à la place des occupants ».
Sans surprise, Autodesk entend bien se positionner sur ce créneau afin de délivrer de façon automatisée des jumeaux numériques aux maîtres d’ouvrages. « Nous nous intéressons donc à trois de leurs demandes principales, poursuit le vice-président : une réelle visibilité sur le projet, un tableau de bord pour optimiser les opérations et ainsi capitaliser sur l’expérience et éviter de réinventer la roue à chaque projet. »
Automatiser la création du modèle digital
Pour cela l'éditeur de logiciels mise sur les développements de Tandem, « un outil qui rassemble les modèles et organise les informations », résume Nicolas Mangon. Pour l’instant, Tandem permet la réception numérique du chantier grâce à l’organisation des dossiers des ouvrages exécutés (DOE) numérique, notamment. « S’y abonner permettra à l’utilisateur d’agréger toutes les données d’un projet au même endroit. Cela ne remplace pas le processus BIM, mais modifie la gestion des données pour créer un livrable différent », reprend-t-il. Actuellement, l’outil permet de fusionner des maquettes numériques indépendamment de leur format (rvt, ifc, etc…) et il va évoluer pour y ajouter des objets connectés et ainsi passer du modèle descriptif au jumeau numérique informatif. Une démarche pas à pas pour aller vers une automatisation du modèle.