Regrouper et traiter au sein d’une même base des montagnes de données géolocalisées pour caractériser l’ensemble du bâti français, tel était l’objectif initial de namR.
Un défi de taille déjà relevé par la start-up fondée en 2017, et qui génère en 2020 un chiffre d’affaires de 3,6 millions euros, en forte croissance ces deux dernières années. « Nous sommes aujourd’hui en mesure de délivrer 200 attributs [informations permettant de caractériser un ouvrage, NDLR] qualitatifs et quantitatifs sur chacun des 35 millions de bâtiments en France », assure Chloé Clair, CEO du spécialiste de la production de données et de l’intelligence artificielle.
Une caractérisation complète du bâti
Concrètement, via un système de filtres, la jeune pousse décrit le bâti en recoupant ses informations techniques avec des données contextuelles (open source ou créées par ses soins). Ainsi, elle est par exemple en mesure d’identifier toutes les maisons de l’Hexagone équipées de deux fenêtres de toit, disposant d’une surface végétalisée supérieure à 100 m² et qui sont situées à moins d’un kilomètre d’une sortie d’autoroute. Mieux, ces datas contextuelles peuvent relever du champ économique, social ou même climatique. « Combien de journées de pluie a connu l’ouvrage ? Combien de journées de grandes chaleurs ? En le sachant, nous pouvons implémenter les scénarii des accords de Paris pour générer des projections et anticiper les risques climatiques à l’échelle du bâtiment ».
Les assureurs déjà utilisateurs
D’ailleurs, ceux dont le métier consiste à anticiper le risque ont bien identifié l’intérêt du service proposé par namR. « Nous avons signé avec quatre assureurs, soit 21 % du marché de l’assurance habitation, qui désiraient mieux évaluer le risque assurantiel pour la maison individuelle et pour l’immeuble collectif. Le travail réalisé par un actuaire [fabricant de modèles pour l’assurance, NDLR] a notamment permis de démontrer que l'articulation de nos données et de ses modèles améliore l’évaluation du risque de 20 à 40 %.

La commune de Lesparre-Medoc (Gironde) vue par namR
Rénovation : du DPE aux travaux
Sans surprise, la performance énergétique est l’autre grand débouché pour l’entreprise. « A ce jour, 2% des maisons individuelles disposent d’un diagnostic de performance énergétique (DPE). Or, nos algorithmes seraient capables d’en réaliser pour 100 % d’entre elles grâce à la vision exhaustive du parc français dont nous disposons. »
Et lorsque les travaux de rénovation se profilent, là encore la description détaillée du bâti vaut son pesant d’or. A plus forte raison quand elle est croisée avec les règles métier qui permettent d’anticiper la faisabilité des opérations et les résultats attendus. « Imaginons qu’une isolation par l’extérieure doive être envisagée. Il est possible d’évaluer, en fonction des travaux retenus, quelles seront les économies exactes en KWh/m²/an. De même, nous serons capables d’exclure immédiatement cette option technique, s’il se trouve que le bâtiment se situe dans une zone historique dont la proximité avec la voirie ne permet pas d'augmenter l’épaisseur de l’enveloppe du bâtiment », poursuit Chloé Clair.
C’est ce type d’approche qui a été mis en œuvre sur l’opération pilote baptisé tRees. Ici, namR a pris en compte au travers d'une plateforme les 6 000 établissements scolaires des Hauts-de-France, soit 19 000 bâtiments entièrement caractérisés. Pour chacun d'eux, une étiquette énergétique a été générée, avant d’appliquer les filtres d’interventions possibles en matière de rénovation énergétique. Une expérience relevant de l'assistance à maitrise d’ouvrage soutenue par les certificats d’économies d’énergie (CEE) et le ministère de la Transition écologique et solidaire.
L'Europe dans le viseur
Confiant dans son modèle et les divers usages offerts par sa capacité de production de données, namR veut désormais accélérer sa croissance avec une levée de fonds attendue très prochainement. Son objectif à court terme est clair : préempter le marché européen sous 18 mois. « A cette échéance, nous n’aurons peut-être pas encore atteint la maturité que nous avons en France, mais nous serons passés à l’échelle », promet Chloé Clair.