"La sobriété énergétique se traduira par des bénéfices", Sébastien Kafi (Artelia)

Sébastien Kafi est responsable de mission pour les partenariats public-privés (PPP) et les contrats de performance énergétique au sein du groupe d'ingénierie Artelia. A quelques mois de l'entrée en application du décret tertiaire, il en décrypte les enjeux. 

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Sébastien Kafi est responsable de mission PPP et des contrats de performance énergétique au sein du groupe Artelia

Le décret tertiaire entrera en vigueur en septembre 2021. Qu’est-ce que cela va changer ?

Le décret tertiaire va obliger tous les propriétaires de bâtiments ou d’ensemble de bâtiments supérieurs à 1000 m² à réduire drastiquement leurs consommations d’énergie. Il s’agira d’atteindre une baisse de 40 % en 2030, puis de 50 % en 2040 et enfin de 60 % en 2050. A ce titre, le décret tertiaire constitue le bras armé de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) qui n’était pas contraignante jusque-là. Ces réductions pourront être évaluées suivant deux critères : soit en déterminant une année de référence sur la période 2010 - 2019, soit par comparaison avec des édifices équivalents en termes de superficie et d’activité. Pour mesurer ces évolutions de performance, les maîtres d’ouvrages devront renseigner les données sur leur parc immobilier dans la plateforme Opérat de l’Ademe. Cette première étape débutera en septembre 2021.

Si le texte est ambitieux, il est faiblement coercitif pour l’instant, puisque les pénalités en cas de non-respect de ces exigences ne seront que de 1500 euros pour une personne physique et de 7500 euros pour une personne morale. Le « name and shame » pour pointer les mauvais élèves aura peut-être davantage d’impact. Et à plus long terme, si la loi évolue et empêche, par exemple, la vente des édifices qui ne sont pas conformes au texte, la contrainte sera cette foi-ci bien réelle.

Au-delà de l’obligation réglementaire, quel est l’intérêt pour les maîtres d’ouvrages ?

Nous accompagnons depuis plusieurs années des clients qui ont déjà engagé la transition énergétique de leur patrimoine. Pour eux, le décret tertiaire n’est pas une difficulté. Le principal enjeu réside aujourd’hui dans la collecte de données pour alimenter la plateforme Operat de l’Ademe.

Peu importe les obligations réglementaires, s’engager dans la sobriété énergétique se traduira par des bénéfices, même si les aléas actuels sur les tarifs des énergies varient. Il est important de rappeler que le pic pétrolier est derrière nous et que le gaz peut parfois être difficile à obtenir au niveau européen. Quelle que soit la stratégie qu’adoptera la France pour son indépendance énergétique ou dans le combat contre le carbone anthropique, miser sur la sobriété garantit une forme de sérénité d’esprit.

Le décret tertiaire oblige non seulement à réduire les consommations d’énergie, mais aussi à collecter les données pour vérifier ces performances. Comment faire converger bâtiment et numérique ?

Il s’agit en effet de deux mondes qui n’ont pas encore pris l’habitude de « dialoguer ». C’est la raison pour laquelle Artelia est entrée au capital de la start-up Openergy en novembre 2018. Celle-ci propose un logiciel de simulation thermique dynamique (STD) en software as a service (saas), ce qui permet de massifier les calculs de performance énergétique.

Le logiciel utilise les plans cadastraux, le moteur de calcul EnergyPlus ainsi que des données assez simples collectées sur un édifice ou un parc de bâtiments. Son ergonomie et les workflow mis en place  permettent d’obtenir une STD cinq fois plus rapidement qu’avec un autre logiciel. La marge d’erreur - d’environ 20 % - entre la STD et la réalité reste la même, mais le gain de temps permet de réaliser des simulations sur l’ensemble d’un parc et d’obtenir des résultats globaux. Cette vision d’ensemble constitue un outil pertinent d’aide à la décision au moment de déterminer les actions les plus efficaces et leur impact.

Quels sont les enjeux à quelques mois de l’entrée en application du décret tertiaire ?

Cette réglementation va inciter tous les maîtres d’ouvrages à s’intéresser aux consommations d’énergie de leurs parcs immobiliers. A court terme, le défi est assez simple à relever puisqu’il ne s’agit « que » d’entrer les données sur la plateforme de l’Ademe. Mais la première échéance, 2030 arrivera dans 9 ans et quelques jours. Néanmoins, le temps passe très vite et il faudra se montrer proactif pour être au rendez-vous de cette grande ambition.  

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