Que représente Colas en Europe centrale ?
Nous couvrons huit pays : Pologne, République tchèque, Hongrie, Autriche, Roumanie, Croatie, Slovénie et Slovaquie. Sur cette région, nous sommes multi-métiers : routes, autoroutes, aéroports, construction d’ouvrages d’art et de génie civil (stations d’épuration d’eau, canalisations…). Cette approche large s’explique en partie par l’histoire de cette branche Europe centrale, avec de nombreux rachats d’entreprises, mais aussi parce qu’il a fallu aller au-delà des métiers de base de Colas pour survivre sur des marchés très compétitifs. Nous avons également une activité industrielle constituée de carrières, d’usines d’émulsions et de postes d’enrobage.
Comment se porte la zone Europe centrale ?
J’ai repris la zone fin 2013, après la crise qui a couru entre 2009 et 2012 et, depuis, la tendance est bien orientée. Il y a eu un passage à vide en 2016 en raison de la mise en place du nouveau budget de l’Union européenne 2014-2020. Pour 2017, le chiffre d’affaires est en forte progression par rapport à celui de 2016 : + 35%. Il devrait également être en hausse en 2018. Le carnet de commandes à fin 2017 progresse de 121% par rapport à celui à fin 2016. La zone n’est pas encore au niveau de l’Europe de l’Ouest en termes d’infrastructures. Le grand changement au niveau de la politique d’octroi de fonds européens viendra de l’accent mis sur le rail plutôt que sur la route. Mais pour les travaux ferroviaires, il faut un matériel spécifique que nous n’avons pas actuellement sur la zone.
A quel type de marchés répondez-vous sur la zone Europe centrale ?
Nous sommes prêts à répondre à tous les appels d’offres, mais l’essentiel porte sur des marchés d’infrastructures qui sont financés par l’Union européenne. Quand un projet de ce type sort, il est financé en général à 85% par des fonds de l’UE et à 15% par des budgets locaux. Sur l’ensemble de la zone, hormis l’Autriche, la majorité des grands projets sont financés par l’UE. Même si elle connaît un fort développement, la Pologne nécessite de nombreuses nouvelles infrastructures ainsi que la réhabilitation du réseau existant. Sur le dernier cadre budgétaire 2014-2020, l’ensemble des fonds européens octroyés pour les infrastructures et les équipements publics en Europe Centrale a représenté 170 milliards d’euros (77 milliards d’euros pour la Pologne) si l’on rassemble ceux pour développer le Réseau transeuropéen de transport (RTE-T), le Feder et le Fonds de cohésion. Et l’enveloppe pour la Hongrie a représenté 22 milliards d’euros. Il ne faut enfin pas oublier que ces pays bénéficient non seulement du Feder pour la construction et la réhabilitation de routes, de lignes ferroviaires, d’ aéroports, mais aussi du Fonds de cohésion afin de mettre les infrastructures de leur pays au niveau des pays d’Europe de l’Ouest.
La procédure dans les pays d’Europe centrale est-elle problématique ?
Non, même si l’on peut constater que ces pays ont du mal à absorber ces importants fonds européens, dû souvent à un manque de moyens notamment humain et à des procédures dans certains États qui peuvent prendre du temps. Il peut se poser ponctuellement certains problèmes, comme les études d’impact environnemental en République tchèque. En Hongrie, où nous venons de remporter trois contrats pour 330 millions d’euros sur les autoroutes M30 et M25 (voir encadré), les procédures sont rapides et satisfaisantes, avec des appels d’offres généralement sans pré-sélection.
Faut-il s’associer pour gagner des marchés en Hongrie ?
Non, la preuve : deux des trois marchés autoroutiers sur la M30 et la M25 ont été gagnés seuls. De toute façon, Colas Ut, Colas Hongrie et Colas Közlekedésépitö sont des entreprises hongroises et vues comme telles. Et c’est la même chose dans toute l’Europe centrale, avec les rachats d’entreprise, notamment d’État, que nous avons fait. Mais il faut savoir que les entreprises hongroises indépendantes sont d’une taille toute à fait suffisante pour gagner seul d’importants projets d’infrastructure. C’est le cas de Duna Asphalt, qui est une très grosse PME locale. Et sur le plan technique, elles sont très compétentes, par exemple sur les ouvrages métalliques, une compétence que nous n’avons pas. Mais il y a aussi une grosse concurrence des autrichiens comme Strabag, Swietelsky. Porr, le n°2 autrichien, en revanche, n’est pas présent en Hongrie.
Les équipes de Colas en Europe Centrale vont-elles d’un pays à l’autre ?
Il y a un échange uniquement au niveau du management, mais le problème pour les ouvriers est qu’ils parlent des langues différentes. En revanche, au niveau du gros matériel, il est envoyé d’un pays à l’autre.
Voyez-vous revenir sur votre zone la concurrence des Chinois ?
Depuis l’affaire des deux contrats autoroutiers octroyés en Pologne et qui ont fini par être annulés en 2011, les entreprises chinoises ne sont pas revenues. Mais elles vont repartir à l‘attaque, notamment par le biais du projet de Route de la soie.