La friche gazière de Strasbourg traitée par désorption

Par l'importance accordée aux études hydrogéologiques, l'ancienne usine à gaz de Strasbourg marque une étape clé dans la politique nationale de dépollution des friches de Gaz de France. Cette donnée s'explique par la fragilité de l'écosystème rhénan : « La nappe phréatique de la plaine du Rhin ne comprend qu'une seule couche, ce qui distingue cette région d'autres territoires comme l'Ile-de-France », explique Luc Demoulin, chef de la mission « Réhabilitation des sites des anciennes usines à gaz » chez GDF. Pour protéger la nappe, le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (Sdage) du bassin Rhin-Meuse impose le maintien ou le rétablissement de la potabilité des eaux sans traitement préalable, en tout point de la nappe rhénane.

Le préfet du Bas-Rhin a traduit cette obligation dans un arrêté publié en mars 1999 : pour éviter tout risque de percolation, Gaz de France devra limiter à 50 parties par million (ppm) les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) qui subsisteront sur la friche de 7,5 ha abandonnée en 1974. Ce seuil garantit une probabilité de contracter une maladie liée à la pollution inférieure à 10 - 5. Le texte a tenu compte de la vocation future du lieu : des immeubles d'habitation et d'activité tertiaire, sans jardins potagers.

Les études, conduites d'abord par l'alsacien EAT, puis par la filiale française du néerlandais Lauw, basée à Dijon, ont conclu à deux types de traitement. Tout d'abord, un étanchement des surfaces et un confinement réalisé à l'aide d'une membrane de polyéthylène haute densité pour atteindre les objectifs pour la majorité des 20 000 m3 de terres. Une partie importante des difficultés des travaux d'excavation résultera de la nécessité d'éviter tout mélange entre ces grandes quantités de terre et celles plus polluées chargées de plus de 2 000 ppm de HAP. Pour ces dernières, l'extraction des HAP se réalisera par désorption thermique, technique que Gaz de France a expérimentée sur le site de Gennevilliers. Chauffées à 500 °C, les terres traversent un trommel, procédé qui permet la dislocation des molécules benzéniques les plus lourdes et les plus dangereuses. Le cycle de traitement sera répété à plusieurs reprises pour atteindre les objectifs de l'arrêté préfectoral. Quant aux goudrons purs qui seront mis à jour dans des fosses durant les travaux d'excavation, ils seront évacués sur un site de traitement spécifique.

Les ingénieurs en sont encore réduits au tâtonnement : « Les modèles existants surestiment-ils la réalité de la pollution ? Lors des études préalables, Lauw s'est en tout cas rendu compte de la nécessité de recaler son modèle par rapport au site. Dans d'autres contextes, nous sommes arrivés aux mêmes types de conclusion avec le modèle de l'Institut français du pétrole », constate Luc Demoulin. Le chantier de Strasbourg, qui s'achèvera juin 2000, contribuera sans nul doute au calage des modèles hydrogéologiques destinés à mieux comprendre la contamination des nappes par des sols pollués aux hydrocarbures.

Maître d'ouvrage : Gaz de France. maître d'oeuvre : ICF Environnement. terrassement : ECO Terres. désorption thermique : Brézillon.

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Strasbourg. Sur le site de 7,5 ha, les entreprises de terrassement ont préparé une zone étanche de stockage des différents lots de terres qui seront soumis à un traitement thermique.

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