Katerra, la construction maîtrisée de A à Z

En pleine expansion, l'américain conçoit, fabrique, assemble. Une concentration verticale pour rationaliser les process.

 

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Katerra ne cesse de consolider ses capacités de conception. Deux agences d’architectes, au Canada et aux Etats-Unis, ont été rachetées.

Michael Marks n'a pas de mots assez durs lorsqu'il s'agit de critiquer le secteur du bâtiment. « Tout y est cher et en retard », estime celui qui s'est d'abord illustré pour ses investissements au sein de la firme Tesla. Un diagnostic sans concession sur lequel s'appuie le modèle économique mis en place par Katerra, une jeune pousse qu'il a cofondée il y a trois ans et demi avec Fritz Wolff, et qui est devenue depuis le spécialiste américain de la construction modulaire.

Inspirée de méthodes issues des secteurs de la high-tech ou de l'automobile, la stratégie du trublion du BTP nord américain repose sur une intégration verticale de tous les métiers qui composent la chaîne de valeur de la construction. Elle vise ainsi à articuler conception, production de bois massif comme de lamellé-croisé (CLT), assemblage de modules en usine, mais également logistique et montage sur le chantier. Le tout gouverné par un système d'information unique et partagé, qui optimise chaque étape du processus. Un positionnement en forme de promesse : celle de réduire les coûts et de diminuer la main d'œuvre requise sur les chantiers.

Contexte propice. Avec un carnet de commandes qui atteint les 4 milliards de dollars, la martingale a déjà séduit le marché étasunien, et ce pour plusieurs raisons. D'abord, la pénurie de professionnels qualifiés sur les chantiers, couplée au boom immobilier, pousse à se tourner vers la préfabrication. Ensuite, la prise en compte croissante des enjeux environnementaux dope les solutions bio sourcées, et le bois en premier lieu. Un matériau qui s'est déjà démocratisé dans les maisons individuelles et qui trouve aujourd'hui de nouveaux débouchés. En effet, la réglementation de plusieurs Etats américains autorise désormais la construction de bâtiments en bois jusqu'à 18 étages. Ce contexte propice permet à Katerra de poursuivre son développement, comme en témoignent ses effectifs actuels -5 000 collaborateurs -, sa valorisation à 4 milliards de dollars et l'ouverture imminente d'une seconde usine dédiée à la production de CLT à Spokane, près de Seattle (Etat de Washington). Quatre autres sites devraient suivre d'ici à 2020.

Pour nourrir son modèle qui suppose d'intégrer toutes les compétences, la société s'est lancée depuis deux ans dans une frénésie d'achats. L'acquisition de Michael Green Architecture, avec 25 architectes basés à Vancouver (Canada), et de Lord Aeck Sargent, basée à Atlanta et présente dans six Etats américains, porte à quatre le nombre d'agences d'architecture intégrées par Katerra, et à près de 300 personnes celui de ses « designers » maison. Restait encore à se prémunir de la pénurie croissante de main d'œuvre sur site. D'où sa décision d'absorber des entreprises de travaux comme United Renovations, Bristlecone ou Fields Construction.

Déjà capable de produire des panneaux contenant les éléments électriques et de plomberie, Katerra veut désormais aller encore plus loin dans la fabrication hors site d'éléments complexes. Lors d'une grand-messe à Las Vegas en mars 2019, la firme a ainsi dévoilé des blocs de salle de bain pré montés installables en quatre heures par deux employés, mais aussi des unités de climatisation et de chauffage qui s'insèrent dans les murs de chaque appartement. La logique reste la même : tout maîtriser pour éviter les surcoûts et les retards. Raison pour laquelle la société en vient à fabriquer ses propres fenêtres.

Contrôle total. « Nous contrôlons tous les éléments qui pèsent plus de 2 % dans la chaîne de valeur », annonce Craig Curtis, chef du département architecture de Katerra, dans un podcast du magazine « The Architect ». « Ce système nous permet non seulement d'assurer la qualité à coût réduit, mais aussi de garantir dès le départ le prix prévu, sans interférences ni amendements en aval. » Du début à la fin, le processus doit être maîtrisé.

Pour s'en assurer, une nouvelle plate-forme informatique baptisée « Apollo » assurera un management complet de la construction, de l'étude des marchés et des sites, à la gestion du personnel des chantiers, en passant par la coordination des travaux et la gestion des composants des bâtiments. L'indice d'une diversification dans les services à la construction ? « C'est une innovation majeure qui vise à optimiser le processus, analyse Franck Moine, directeur de Winnovation, la structure de veille de Bouygues basée à San Francisco. Il ne faudra pas s'étonner de les voir rechercher de nouveaux talents dans ce domaine. » Mais avant même de parler d'ouvrir le champ de ses activités, Katerra entend bien importer son modèle au-delà de ses frontières. Il vient notamment de se voir confier un projet de 4 100 logements à loyers modérés dans cinq villes d'Arabie saoudite. Et en Inde, sa fusion avec KEF Intra lui ouvre un marché potentiel de 3,7 Mds € dans un pays en pleine pénurie de logements.

 

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