C’est un chiffre qui s’est paré d’une aura quasi-légendaire– comme les Douze apôtres, les Sept merveilles du monde ou les 43 annuités du droit à la retraite - à force d’être répété : « Deux millions d’emplois industriels ont été détruits depuis trente ans. »
Et ce jeudi 8 mars, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a rappelé que sa mission était, après avoir stoppé le déclin, de relancer l’industrialisation du pays : « Le choix qui est devant nous c’est : est-ce que la France doit et veut rester une grande nation industrielle ? La réponse est oui. Aujourd’hui la France ouvre plus d’usines qu’elle n’en ferme et des dizaines de milliers d’emplois ont été créés. La proposition que nous avons faite avec le ministre chargé de l’Industrie Roland Lescure au président de la République c’est : nous avons amorcé la reconquête maintenant il faut une industrie verte pour être le premier pays industriel décarboné.»
C’est tout l’objet du projet de loi Industrie verte, porté par son rapporteur le député d’Eure-et-Loir, et président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée, Guillaume Kasbarian.
« Pour élaborer ce projet de loi nous avons retenu 5 thématiques et nous avons décidé de partir du terrain, en menant une consultation très large pour créer un consensus et créer l’adhésion des acteurs locaux. Nous avons mené 202 auditions à date et des premières pistes émergent. Nous restreindrons la liste des propositions fin mars puis nous les renverrons vers le terrain en avril-mai avant une 1ère lecture cet été du texte que nous voulons ramassé, une 15 aine d’articles », a détaillé Guillaume Kasbarian lors d’un point d’étape devant la presse.
Livret "France nation verte"
Les consultations autour des 5 thématiques, classiques (fiscalité, foncier, financement, formation, production française), ont fait remonter des constats évidents : des procédures d’implantation trop longues, un secteur face à un mur d’investissements (80 Mds € par an selon la Commission européenne) pour se décarboner et qui souffre d’un déficit d’image important pour attirer les talents ; mais aussi de premières propositions intéressantes.
« Nous devons retrouver des conditions raisonnablement concurrentielles par rapport à notre environnement européen et valoriser notre production décarbonée grâce à notre énergie décarbonée. Pour cela nous proposons de créer un standard pour les entreprises : EEE (excellence environnementale européenne) », a soumis Bruno Millienne, député Modem des Yvelines, vice-président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et aux commandes du « chantier 3 – Produire, commander et acheter en France.
Autre idée, avancée par Damien Adam, député de Seine-Maritime (Chantier 4 – Financer l’industrie verte) : transformer le Livret de Développement Durable en produit d’épargne « France nation verte » (avec garantie de capital et exonération fiscale) pour le flécher vers l’industrie verte.
Guillaume Kasbarian a également expliqué qu'il ne s'interdisait pas « d'étudier le chantier » du verdissement du crédit impôt recherche (CIR), trouvant « légitime d'étudier absolument toutes les pistes, y compris sur des dispositifs existants qui font l'objet de débats ».
Coût budgétaire nul
Dans tous les cas, le projet de loi devra être mis en œuvre à coût budgétaire nul, a assuré Mathieu Lefèvre, député Renaissance et membre de la commission des Finances de l'Assemblée nationale. « Les différentes aides que l'on pourra proposer ne devront pas coûter au budget général ou à la collectivité », a-t-il insisté. En conséquence, « soit on réalloue des aides qui sont déjà existantes ou qui ne sont pas encore utilisées, soit on va chercher des dépenses fiscales brunes (défavorables à l'environnement, NDLR) qu'on envisagerait de supprimer », a ajouté le député du Val-de-Marne.
Le préfet Rollon Mouchel-Blaisot chargé d’une mission interministérielle de mobilisation pour le foncier industriel
La disponibilité à court terme d’un foncier économique adapté aux besoins demeure un prérequis indispensable au développement industriel. Or, note le ministère de la Transition écologique, dans un contexte de sobriété foncière, on observe une concurrence croissante entre les différents usages dépendant de l’accès au foncier, tels que l’habitat, les activités économiques et les équipements publics. C'est pourquoi, le préfet Rollon Mouchel-Blaisot, jusqu'à présent coordonnateur du programme Action coeur de ville, a été chargé d’une mission interministérielle de mobilisation pour le foncier industriel.
En étroite association avec les collectivités territoriales, les opérateurs, les entreprises et l’ensemble des parties prenantes, cette mission aura pour objectif de proposer des mesures concrètes et opérationnelles pour :
- Recenser l’offre disponible à destination des investisseurs
- Qualifier la demande des entreprises
- Faciliter l’accueil des projets industriels
Une première contribution est attendue dans la perspective du Sommet « Choose France » en mai prochain.