L'hébergement du grand âge à la lumière du Covid-19

L'actuelle pandémie pourrait faire évoluer la conception et le fonctionnement des Ehpad. Mais en la matière, le conditionnel reste de rigueur.

 

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Les salons de cet Ehpad situé à Châlus (Haute-Vienne) ont permis aux résidents de maintenir le lien social durant le confinement.

A quelque chose malheur est bon, dit l'adage. Voire… La canicule meurtrière de l'été 2003 avait conduit les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) à réserver des espaces climatisés et/ou rafraîchis. Les crises, qu'elles soient climatique, sociale ou sanitaire, servent de révélateur. Celle du Covid-19, avec son cortège de décès survenus dans leurs murs, ne fait pas exception et a permis de sérier insuffisances programmatiques, conception problématique et autres dysfonctionnements. L'architecte Patrick Laroudie de l'agence BVL Architecturerelève ainsi « l'absence de lieux spécifiques permettant de maintenir le lien physique et social entre le résident et sa famille, de même que celle d'espaces de sommeil et de vie pour le personnel, lorsque celui-ci a voulu rester confiné dans l'établissement ».

Le constat est là. Mais dans quelles directions repenser le modèle quant à sa programmation, son implantation, son organisation interne ? Si « rajouter de la vie aux années, plutôt que des années à la vie » est un impératif, la relégation en périphérie de ville n'est sans doute pas le meilleur moyen d'y parvenir. L'insertion en cœur de bourg, s'il participe d'une modeste revitalisation du tissu local, permet surtout de lutter contre la solitude et l'ennui des pensionnaires. La dimension humaine de l'architecture pour le grand âge passe aussi par l'échange et le contact, fut-il simplement visuel, avec la vie extérieure, la ville, le mouvement. Comme le souligne l'architecte Philippe Ameller (agence Ameller Dubois), « personne n'est jamais content d'aller en Ehpad… ». A cet égard, la chambre est au cœur du dispositif. On l'a vu avec des pensionnaires confinés dans leurs 15 à 20 m2.

L'appropriation est le maître mot, qui passe par un aménagement privilégiant les composantes spatiales d'un « vrai logement », avec sa séquence d'entrée, son séjour, sa salle d'eau, etc. Sans oublier des échappées visuelles sur le lointain, voire un prolongement extérieur - balcon, loggia -, seul exutoire en cas de (re)confinement.

Ambiance hôtelière vs. hospitalière. La pandémie a aussi fait émerger un certain nombre de propositions, relevant parfois du bon sens, comme la séparation des flux visiteurs/ résidents pour éviter les brassages. L'articulation des espaces entre eux peut également être repensée à l'aune d'une ambiance davantage hôtelière qu'hospitalière. Et le modèle classique - espaces communs en rez-de-chaussée et chambres aux étages - d'évoluer, par exemple, vers une fragmentation en sous-unités autonomes qui, à chaque niveau, panachent chambres, salons partagés, lieux d'activités, offices de réchauffage des repas, salle à manger ou encore jardin d'hiver. Autre piste pour éviter la ghettoïsation, une plus grande mixité programmatique : logements sociaux, commerces, crèche, résidence étudiante… pourraient ainsi trouver à cohabiter, pour autant qu'il ne s'agisse pas de la simple juxtaposition d'éléments de programmes célibataires, sans réels liens entre eux, mais qu'ils mutualisent des fonctions et des espaces.

Passé l'état des lieux et les vœux, Patrick Laroudie se fait fataliste : « Pour l'instant, on ne trouve aucune trace du Covid-19 dans les programmes qui sont lancés. » Le « monde d'après » est demandé à l'accueil…

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