Vous avez vendu 2157 logements en 2021. Vous en visiez 2200 en 2022. Cet objectif sera-t-il tenu sur fond d’inflation et de remontée des taux ?
Les chiffres sur les logements vendus sont en cours de consolidation. Ce qu’on peut dire à ce stade sur notre activité de promotion immobilière en 2022, c’est que le résidentiel a pesé 79% et le tertiaire, 21% (contre 24% en 2020 et 25% en 2021, NDLR). Et nous serons aux alentours de 30% de ventes en bloc aux investisseurs institutionnels et bailleurs sociaux. En ce qui concerne les particuliers, la demande est restée dynamique car nous n’avions pas grand-chose à vendre. Le taux d’écoulement a baissé de seulement 2 points entre le premier trimestre et le dernier trimestre 2022. Nous notons toutefois un ralentissement chez les primo-accédants modestes. Ces derniers sont crispés par l’inflation mais pas par la remontée des taux : emprunter à 2% sur vingt ans, cela reste extraordinairement bas. Pour continuer de capter ces clients modestes, nous ne pouvons pas peser sur les coûts de construction ni rogner sur nos marges, comprises entre 6 à 8%. Le seul facteur de variation est le prix du foncier. D’où notre volonté de libérer les terrains à prix raisonnables.
Les terrains se feront de plus en plus rares avec l’impératif de sobriété foncière. Or, rareté rime avec cherté…
L’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) est un semi-faux problème à l’échelle nationale. Avec les fonciers publics sous-exploités, la France dispose d’une grosse réserve qui demande une multi-expertise technique. Cela demande aussi plus de temps, entre les discussions avec les collectivités, les démarches de remembrement, la dépollution… Nous n’avons pas attendu le ZAN pour limiter l’impact de notre métier. Nous sommes historiquement peu actifs dans la maison individuelle, qui participe à l’artificialisation des sols. L’essentiel de notre production est issue de surfaces déjà artificialisées, qui nous permettent de viser des marchés de toute nature. A Annecy (Haute-Savoie), une des villes les plus chères de France, le programme Les Trésums proposera d’ici le quatrième trimestre 2024 un total de 460 logements libres, 152 logements sociaux, un hôtel de 103 chambres et une résidence de services mixtes de 77 logements. A Toulouse, l’ancien Centre d’essais aéronautiques (CEAT) est en cours de transformation. Les travaux aménageurs lancés en 2019 avec Cogedim doivent s’achever en 2025. Ceux-ci visent la création de 1 250 logements, de commerces, bureaux et équipements publics sur 104 000 m² de surface de plancher. Sur la partie promotion, Crédit Agricole Immobilier construit 360 logements en accession privée, accession sociale et locatif social. La première résidence a été livrée en décembre 2022. Trois autres livraisons sont prévues entre 2023 et 2025.
A quoi ressembleront vos futurs programmes issus de ces terrains déjà artificialisés ?
En 2023, nous lancerons commercialement des programmes tertiaires sur des friches urbaines, d’anciens sites industriels ou tertiaires de 3 000m² à 5000m², situés à proximité immédiate des transports en commun comme à Villejuif (Val-de-Marne) avec Campus Grand Parc. Le logement est peu représenté, car les trois-quarts des projets issus de friches ne s’y prêtent pas. Ceux-ci se heurtent aux obstacles des normes, comme le changement de destination, et à des charges d’exploitation trop élevées pour les potentiels occupants.
Comptez-vous vous spécialiser dans la réhabilitation de l’existant, l’autre créneau qui permet de limiter l’artificialisation des sols ?
La réhabilitation reste très modeste dans notre activité, de l’ordre de 5%. Ces opérations, aussi bien dans le bureau que le logement, sont extraordinairement difficiles d’un point de vue technique et économique. Il n’y a pas photo. Plutôt que de garder une vingtaine de logements dans un immeuble des années 60 dont le bâti est de qualité médiocre, nous préférons l’option démolition-construction qui nous permet de créer 50 logements de qualité répondant à la RE 2020.
Concernant la réduction de vos émissions de gaz à effet de serre, comment sécurisez-vous vos approvisionnements en béton bas carbone, bois et autres matériaux biosourcés ?
Nous n’avons pas de partenariats avec tel ou tel fournisseur. Nous défendons une approche collégiale, à travers des regroupements comme le Hub des prescripteurs bas carbone et Fibois. Pour industrialiser la construction bois, nous avons intérêt à fédérer les bureaux d’études, les transformateurs et les compagnons. Aucun promoteur, fût-il le plus gros, pourra faire bouger le marché et la règlementation à lui tout seul. Ces instances nous permettent de réfléchir sur les normes et de mutualiser la recherche de produits. Certes la recherche n’est pas notre métier, mais c’est notre rôle de mener des expérimentations. Des questions se posent, par exemple, sur le vieillissement et le confort acoustique des immeubles avec beaucoup de bois. Pour innover, nous nous nourrissons également des remontées des banquiers, assureurs et administrateurs de biens qui agissent comme des capteurs des besoins du marché, à travers les 23 millions de clients du groupe Crédit Agricole.