Le conseil d'administration de l'Ecole nationale supérieure d'architecture Paris-La Villette (ENSAPLV), réuni le 27 janvier, a pris connaissance de la nouvelle organisation des services du ministère de la Culture, et a constaté avec stupéfaction que la Direction de l'architecture et du patrimoine avait purement et simplement disparu de l'organigramme des Directions du ministère. L'architecture (profession, enseignement, recherche, création et qualité architecturales) relève désormais d'un "service de l'architecture" relevant d'une "Direction générale des patrimoines".
Il s'agit de l'ultime étape d'une lente mais inexorable régression institutionnelle qui ne peut que traduire un désintérêt croissant pour notre discipline et son enseignement, déjà passablement malmenés depuis de nombreuses années.
L'architecture n'est pas (qu')une activité artistique et ne saurait exclusivement relever d'une préoccupation patrimoniale. Etroitement associé aux processus et aux enjeux urbains, territoriaux et environnementaux de la ville contemporaine, il en va au contraire de la vie quotidienne de millions de nos concitoyens, de leurs conditions de vie, d'habitat, de déplacement, de travail, de culture et de loisirs.
Par un malheureux concours de circonstances historiques, l'architecture a été rattachée en France aux institutions culturelles, ce qui l'a placée dans une situation de marginalité accrue par rapport aux disciplines auxquelles elle est naturellement et organiquement associée : l'urbanisme, l'aménagement et l'environnement, la construction et l'ingénierie, l'habitat et le logement.
La submersion de l'architecture dans le fatras idéologique "des patrimoines" signe pour notre tutelle l'abandon définitif de toute ambition sérieuse de mettre en place une véritable politique prospective de l'architecture, adossée à son enseignement et résolue à affronter les défis du nouveau siècle. Car comme le proclament justement Richard Klein, Gérard Monnier et Paul Quintrand : "Inexorablement, une politique prospective de l'architecture, tournée vers de nouveaux usages, vers de nouvelles contraintes, vers de nouveaux moyens - et le contexte ne permet pas d'autre choix - sera en porte-à-faux dans un dispositif patrimonial, qui produira ses représentations et ses critères, et qui répartira ses moyens à l'architecture par défaut. Cette péripétie calamiteuse ne convient pas."
Face à cet épisode conclusif d'une disparition annoncée de l'architecture au sein du ministère de la Culture, le conseil d'administration de l'ENSAPLV réaffirme la nécessité, que notre école a toujours fait valoir, de rattacher l'enseignement de l'architecture et la recherche architecturale et urbaine au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.
Dans cette perspective elle soutient résolument la position prise récemment par Richard Klein, Gérard Monnier et Paul Quintrand dans l'édition numérique du Moniteur, "La quotidienne de la construction" du 25 janvier 2010.