La construction de la salle de spectacle dont vient de se doter la ville de Marciac (Gers) est issue de la volonté de Jean-Louis Guilhaumon, fondateur du festival Jazz in Marciac, de créer un équipement à rayonnement territorial qui puisse pérenniser les événements en dehors de la célèbre manifestation. Prévue pour une quarantaine de spectacles par an, L’Astrada – qui signifie en Occitan « ce qui était écrit » – a ainsi été inaugurée en mai dernier. Pour insérer une architecture contemporaine dans le tissu ancien de la Bastide de Marciac, les architectes de King Kong ont inscrit L’Astrada dans un réseau de places et placettes existantes, avec un petit parvis planté de platanes et agrémenté de bancs, où l’on peut jouer à la pétanque. Volume parallélépipédique et nécessairement opaque, le bâtiment fait référence aux hangars agricoles et à l’environnement rural de Marciac, référence soulignée par un soubassement bardé de rondins de bois mal équarris, placés verticalement, et sur lesquels subsistent des morceaux d’écorce. Au-dessus, les panneaux de béton brut matricé suivent le même rythme, avec une surface creusée de lignes verticales irrégulières qui évoque la tôle ondulée des hangars. Engagé dans un débat avec l’ABF qui souhaite encore à ce jour que le béton soit peint, l’architecte a pour le moment réussi à garder sa surface brute pour que s’y impriment les variations de la lumière du jour.
L’esprit d’un club de jazz
« Le projet cherche à concilier l’esprit des clubs de jazz et des grands auditoriums de musique, l’espace compact où se joue la proximité avec l’orchestre et le volume suffisant pour que se déploie la qualité acoustique, l’émotion du spectacle vivant et la justesse du son », écrivent les architectes de King Kong. Et en effet, dans cette salle de 500 places, tout a été conçu pour effacer la frontière entre musiciens et spectateurs, dans la grande tradition du jazz. Aussi, pas de podium mais une continuité du sol entre gradins et scène ; continuité également des parois latérales d’un bout à l’autre de la salle, avec absence de cadre de scène ; continuité de la couleur des murs, de teinte claire, pour que public et musiciens puissent se voir à égalité. D’ailleurs, lors de la soirée d’inauguration, les musiciens Winston Marsalis et Richard Galliano ont souhaité que les lustres restent allumés.
L’acoustique de la salle repose sur le modèle de la « shoe box », volume intérieur long, haut et étroit qui, en créant des réverbérations sonores de grande amplitude, offre les meilleures conditions pour les concerts de musique non amplifiée, comme dans une église. C’est ensuite tous les éléments en relief – balcon, mezzanines, fauteuils, passerelle technique, irrégularités des murs… – qui contribuent à enrichir le son. Principalement conçue pour les concerts, la salle doit cependant pouvoir s’adapter à d’autres formes de spectacle, comme le théâtre, pour lesquels le son doit être plus mat avec une durée de réverbération plus courte mais plus puissante pour que la voix porte suffisamment : les panneaux dépliables situés côtés cour et jardin permettent de varier la diffusion du son et de constituer, si besoin, un cadre de scène. De même, dans la charpente métallique, des rideaux acoustiques peuvent être déployés.
Enfin, il ne peut s’agir de jazz sans envisager de pouvoir rencontrer les musiciens de manière informelle après le concert : un petit espace de rencontre avec le public est aménagé à l’étage, juste derrière la grande enseigne de façade qui signale L’Astrada.
Lieu : Marciac (Gers)
Maîtrise d’œuvre : Atelier d’architecture King Kong, mandataire ; Iosis Sud-ouest, BET ; Ducks Scéno, scénographe ; Kahle Acoustics, acousticien
Maîtrise d’ouvrage : Syndicat mixte d’etudes et d’aménagement du grand site de Marciac
Programme : construction d’une salle de spectacle et aménagements de ses abords
SHON : 1 450 m2
Coût : 4,04 M€ HT
Entreprises : Colas, VRD ; Camozzi et Bourdarios, gros œuvre ; Cance Alu, menuiseries extérieures ; Dazeas, menuiseries intérieures ; Sarrade Construction, serrurerie ; Arrêt sur Image, mobilier ; Tambe, machinerie et tentures ; Mussidan Sièges, fauteuils ; Les Ateliers Lumière, éclairage scénique et audiovisuel
Matériaux : béton matricé préfabriqué, béton préfabriqué désactivé, bois, tôle perforée









