L'élaboration, la mise en œuvre et le déploiement d'un jumeau numérique territorial (JNT) mobilisent souvent plusieurs acteurs publics, notamment lorsque celui-ci s'étend au-delà du territoire de compétence d'une seule collectivité territoriale. Un projet de JNT va alors impliquer plusieurs acheteurs et idéalement conduire à la conclusion d'un contrat commun avec un opérateur économique. Dans un tel schéma, quelle organisation privilégier, notamment du point de vue des responsabilités des différents intervenants ?
Définition des besoins et du projet. Etape clé, les acheteurs concernés doivent naturellement s'interroger sur leurs besoins (le jumeau numérique répond-il à un besoin commun et/ou à des besoins propres à chacun ?), sur les objectifs communs ou individuels du projet, sur les spécificités propres à chaque acheteur en termes de compétence, de moyens ou d'interopérabilité des outils par exemple.
Ces différentes questions conduiront les acheteurs à structurer en amont la gouvernance du projet. Et ce d'autant plus que si la conclusion d'autant de contrats que d'acheteurs avec le même titulaire pour la réalisation d'un projet commun peut être envisagée, elle s'avère insatisfaisante sur le plan opérationnel. Les acheteurs doivent donc envisager un mécanisme organisationnel et contractuel engageant le plus grand nombre.
Montages organisationnels. Succinctement, plusieurs formes de gouvernance du projet peuvent être envisagées.
- Un schéma intégré, qui consiste à faire porter le projet par une structure commune existante - du type EPCI englobant plusieurs collectivités - ou à créer spécifiquement. Cette structure aura alors la charge et la responsabilité de la procédure de passation et de l'exécution du contrat pour son propre compte et, indirectement, pour celui de ses membres. Dans le même ordre d'idées, notons que le Code général des collectivités territoriales autorise diverses formes de mutualisation, comme la création de services communs entre collectivités, qui pourraient être mobilisées également dans ce type de projet.
- Un schéma de type intermédiaire, en constituant pour le projet une structure plus souple sous la forme par exemple d'un groupement d'intérêt public (GIP), lequel présente notamment l'avantage de pouvoir mutualiser des moyens humains, matériels et financiers dans le cadre d'un projet d'intérêt général, ainsi que d'associer des personnes privées. Le GIP - doté de la personnalité morale et dédié au projet - pourrait alors porter la responsabilité pour ses membres de la passation et de l'exécution du contrat.
- Un schéma temporaire, et donc moins contraignant, pourrait être envisagé, à l'instar d'un groupement de commandes. Bien que dénué de personnalité morale, il pourrait être chargé pour le compte de ses membres de passer conjointement un ou plusieurs marchés répondant à ce besoin commun. Notons que ses membres sont en principe solidairement responsables de la passation, voire de l'exécution, du marché lorsqu'elles sont menées conjointement en leur nom et pour leur compte.
Exécution du contrat. Ces schémas participeront à fluidifier la relation contractuelle avec le titulaire : un seul contrat, un seul donneur d'ordres, un régime de responsabilité clarifié.
En parallèle, le JNT répondant au besoin commun de plusieurs acheteurs, il peut s'avérer opportun de prévoir au contrat une gouvernance contractuelle permettant la participation (et non pas l'immixtion) de chacun. Cela peut se faire en particulier via la mise en place d'un comité de pilotage et/ou d'un comité technique, organes permettant à la collectivité ou à la structure signataire du contrat de recenser, puis de faire remonter au titulaire les demandes et spécificités de chaque acheteur concerné (qui doivent en principe déjà figurer au cahier des charges).
Ce mécanisme contractuel peut se doubler de conventions ad hoc entre les acheteurs concernés, comme une convention TIM [T pour Territory, NDLR] (à l'instar de la convention BIM) afin de décrire notamment l'organisation entre les différents acteurs du projet, mais cela tout en gardant à l'esprit que seules les parties au contrat sont responsables de son exécution.