L'appartement de Loïc Pianfetti mesure 30 m². Son jardin, 250 m². Le week-end venu, le paysagiste, qui vit au centre de Paris, prend la route ou le RER pour monter jusqu'au plateau de Crosne, dans l'Essonne. Là, il sème, arrose et récolte sur sa parcelle des jardins familiaux des Uselles. « J'ai besoin de respirer », dit-il. Rien de bien étonnant quand on a, comme lui, passé son enfance à Embrun (Hautes-Alpes) avec vue sur les montagnes et dans une famille où l'on cuisinait ce qui venait du potager.
Professionnellement, Loïc Pianfetti n'est pas en manque de grands horizons puisque, responsable du pôle paysage et biodiversité chez SNCF Réseau, il intervient à l'échelle des infrastructures ferroviaires. Et pour mettre les mains dans la terre, il fait de fréquents allers-retours à Embrun pour s'occuper des plantations de sa mère. Mais pendant longtemps, il a cherché son pré carré, près de chez lui. « J'ai essayé les jardins partagés. On y rencontre du monde mais, avec 1 à 2 m2 , ça reste de l'ordre de la jardinière », juge-t-il. Son « vrai jardin », il l'a dégoté en 1998 dans ce qui, d'après une note de 2018 de l'Institut Paris Région, constitue, avec 25 ha, le « plus vaste » jardin collectif d'Ile-de-France. Créées en 1987, ses 140 parcelles, proprement délimitées par des haies de charmes, sont gérées par l'association le Jardinot, une contraction de son nom d'autrefois « le Jardin du Cheminot ».
« Le jardin doit s'adapter à mon rythme de vie. Ça ne doit pas devenir un esclavage. » Loïc Pianfetti, paysagiste.
A la lisière de la forêt
Le royaume de Loïc Pianfetti se trouve à l'extrémité du site, à la lisière de la forêt domaniale de la Grange. Près de la serre, dans les quatre carrés de son potager, le temps est à la récolte des tomates et des courgettes. En revanche, la nappe de fraisiers n'a plus un fruit et il ne reste que quelques framboises, vite cueillies et vite avalées. Les aubergines, elles, sont toutes petites, « parce qu'elles demandent beaucoup d'eau et qu'actuellement, je viens moins souvent », explique-t-il. Or les quelques règles strictes des Uselles imposent un arrosage manuel. « Je choisis de toute façon mes plantations pour que le jardin s'adapte à mon rythme de vie. Je ne veux pas que ça devienne un esclavage. » Parce que ce lieu est d'abord celui du plaisir, Loïc Pianfetti a installé une tonnelle et une table pour recevoir ses amis. A l'ombre de la vigne et du jasmin, il les invite à partager des plats faits à partir de sa production. Et d'avouer : « Finalement, je fais tout cela parce que j'aime manger. » Sa consœur et ancienne camarade de l'Ecole du paysage de Versailles, Laure Planchais, confirme : « Loïc est très fin gourmet. » Alors, il en vient vite à donner ses recettes : les côtes de blette qu'il cuisine à la tomate, à l'italienne, ou la panzanella qu'il prépare avec « beaucoup de basilic, des morceaux de gressins et de la pancetta ». Evidemment, quand la saison est passée, comme tout le monde, il achète ses légumes. Mais on ne lui ôtera pas de l'idée qu'il n'y a pas mieux qu'une tomate cueillie à point, « dont la peau s'enlève comme celle d'une pêche ».
Cet article fait partie du dossier "Jardin secret" de notre série de l'été "Miam".