Les techniques de structures légères en bois remontent évidemment à la nuit des temps, les cases zouloues, les architectures de bambous en Asie subtropicale ou les yourtes mongoles, dont l’usage est toujours vivace en Asie centrale, en sont le témoignage. Même si elles paraissent primitives au premier regard, ces petites constructions doivent leur pérennité à des techniques sophistiquées. Elles tirent cette aptitude à traverser le temps de leurs qualités de légèreté et d’adaptabilité et d’une grande simplicité d’assemblage. Conçues à l’aide de sections de bois réduites, voire de simples branchages, elles sont particulièrement économiques. Elles sont indissociables de leur enveloppe légère de feuillage, de chaume ou de toile, qu’elles portent comme une sorte de vêtement accompagnant les mouvements inévitables des ossatures. Les techniques de pans de bois, plus élaborées, qui sont apparues au début du moyen âge ont permis des constructions de plus grande ampleur : les premières cathédrales et les premiers ponts étaient bâtis en bois. Le trait de charpente avait introduit dans le concept structurel une logique analytique qui a produit des systèmes constructifs hiérarchisés. En répartissant les charges sur des points porteurs, ces techniques ont libéré les façades. Ainsi dans les villes marchandes, aux façades des riches demeures bourgeoises, les claires-voies sont occupées par des vitrages dont l’usage commence à se répandre en Europe à la faveur du formidable développement économique des Xième et XIIe siècles. Le verre, dont le coût est au XIVe siècle trois fois supérieur à celui de la pierre, est signe d’opulence, et son utilisation atteste d’un sentiment de sécurité nouveau. Du XVe siècle, la maison Kammerzell à Strasbourg est un exemple étonnant de ces pans de bois presque totalement vitrés, projetant une façade transparente sur la ville. La technique du vitrail au plomb, le perfectionnement des châssis et des huisseries de baie, permettent d’associer ce matériau cher et fragile à des structures dont les déformations sont prévisibles.
Le verre conserve un statut privilégié, matériau technologique dont les propriétés collent parfaitement aux préoccupations du XXIe siècle naissant, le verre est devenu matière d’architecture à part entière, apportant la lumière et la transparence, deux notions qui ne cessent d’alimenter les mythes contemporains.
Les préoccupations environnementales ont renforcé l’intérêt porté aux produits verriers. On redécouvre que le principe de l’effet de serre peut être bénéfique. En captant passivement l’énergie solaire, les bulles de verre, les verrières des façades à doubles enveloppes et les loggias fermées sont devenues en quelques années les dispositifs les plus couramment employés pour contrôler la consommation énergétique d’une construction. Le verre s’inscrit paradoxalement dans un rapport nature/culture avec le bois, autre star des temps écologiques. Elément de construction longtemps déconsidéré dans les pays latins, le bois, dont l’utilisation connaît un renouveau sans précédent, est, plus que tout autre un matériau vivant et naturel. Nécessitant un process industriel réduit pour sa fabrication comme pour sa mise en œuvre, on lui prête d’innombrables vertus dont celle de puits à carbone. Apprécié pour ses qualités esthétiques, il coïncide parfaitement avec les grands fantasmes de la société du Grenelle de l’Environnement. Et puis, grande nouveauté : le bois n’est plus caché. Construire en bois atteste d’une démarche écoresponsable, aussi le matériau doit-il apparaître dans toute sa splendeur, sans peinture et si possible sans vernis. L’alliance du verre et du bois trouve alors toute sa pertinence puisque la transparence du premier permet de mettre en valeur les qualités, réelles ou supposées du second. La double peau et les verrières font apparaître les charpentes et les bardages. Les structures bois, en support de vitrage soulignent les affinités nouvelles entre une technologie fine et sophistiquée et l’image de la nature presque à l’état brut. Aujourd’hui le développement des résilles, lattis et claustras renouvelle et multiplie les possibilités d’utilisation du bois avec des propriétés de transparence et de légèreté qui favorise son association avec des grandes surfaces de vitrage.
Cette alliance affirmée entre le verre et le bois doit beaucoup aux perfectionnements technologiques dont ont fait l’objet les deux matériaux. En s’appuyant sur de nouveaux modes de calcul de résistance des matériaux, l’avènement des systèmes de construction métallique au XIXe siècle avait paradoxalement favorisé l’évolution des techniques de charpente traditionnelles. L’utilisation du bois pour la fabrication de grands échafaudages et, plus tard, dans l’industrie aéronautique pour les structures des cellules et des voilures d’avion, seront d’autres vecteurs de cette modernité. La découverte de nouveaux procédés d’assemblage, l’apparition de colles performantes, puis de pièces de jonction et d’articulation métalliques en fonte ou en acier, et les déclinaisons multiples des produits du bois, comme le contreplaqué, l’aggloméré et le lamellé-collé, ont ensuite permis le développement de structures légères et résistantes.
Dans le même temps les produits verriers et leurs techniques de mise en œuvre connaissaient de nombreux perfectionnements. Des vitrages plus résistants, feuilletés ou trempés ont favorisé la mise au point de verrières et de planchers de verre de grande portée. Des doubles et triples vitrages isolants thermiques, intégrant des filtres solaires, sont apparus, présentant des performances sans cesse améliorées en matière d’isolation thermique et phonique. Les façades entièrement vitrées sont aujourd’hui courantes.
Avec l’évolution des techniques de parcloses et l’apparition des joints caoutchouc, puis néoprène et silicone, et la mise au point des profilés drainants, l’étanchéité des verrières est devenue presque parfaite. Les systèmes d’agrafes métalliques articulées employés pour les verrières plates ou les façades, ont permis aux vitrages de mieux réagir aux inévitables contraintes de mouvement des structures bois.
Quelle que soit la technologie retenue, réunir les deux matériaux nécessite une conception rigoureuse et exige une mise en œuvre qui ne supporte aucune approximation. En reliant le concept structurel à la problématique spatiale dans une syntaxe peu adaptée aux pratiques d’industrialisation totale, l’usage conjugué du bois et du verre, contribue à replacer l’architecte au cœur du processus de conception.
