« Du Grand Paris à Paris en Grand », tel est le nom du rapport, un document de 168 pages - annexes comprises - que le leader charismatique et historique de Banlieues 89, Roland Castro 78 ans, a détaillé ce 25 septembre en son agence à un aréopage de journalistes. Alors que contient ce rapport? Eh bien... Il faudrait commencer par le lire in extenso. Et ça tombe bien, son auteur assure tout de go : « Il est pas chiant. Il est lisible, pas bourré de mots techniques, écrit de A à Z de ma main. Augmenté de 27 contributions signées Kersalé, Gautrand, etc. »
Ce travail de réflexion - « un travail de poète urbain » - entend d’entrée de jeu « déconstruire les situations » dans la mesure où « rien de sérieux ne s’est fait depuis le Front Populaire »… Et de pointer la tragédie moderne qu’ont été notamment à ses yeux, « le zonage et les grands ensembles », ainsi que « la bêtise gaullo-communiste qu’a été la suppression du département de la Seine ». A sa manière, « un peu plus rêveuse, un peu moins aménageuse», Roland Castro vise tout à la fois « à en finir avec la politique de la ville » telle qu’elle s’exerce aujourd’hui et appelle « à une action privée d’intérêt public », en quelque sorte à « une Anru privée avec une Anru publique ». Le tout au service d’une action qui ne néglige pas « la question climatique qui croise la question sociale » dans le cadre d’une « ville dense et intense ».
Voilà pour le bilan. Que faire à présent ? Muni du « trident » que forment à ses yeux « l’Etat, les communes et la société civile » et luttant contre les « corporatismes » en tous genres qui atomisent et paralysent les initiatives - « Saclay est mal barré. C’est un désastre industrieux » - Castro entend « pacifier » la ville en « faisant du beau » : « Le beau respecte. Le beau rapporte. Plus c’est moche, moins on vote. Plus c’est moche, moins on étudie. Plus c’est moche, moins on bosse ». Et de souligner que les quartiers qu’il a ainsi « pacifiés » depuis 1983, avec son comparse d’alors, Michel Cantal-Dupart, n’ont pas connu d’émeutes en 2005. Dont acte.
Et sinon? Mettre en place des « polarités nouvelles », « remodeler et transformer plutôt que démolir », « scénariser la ville », « créer dans les endroits les plus enclavés et les plus laids des éléments d’attractivité qui donnent des raisons de s’y rendre et qui permettent à leurs habitants d’être fiers d’y vivre », « créer une métropole oasis » à grand renfort de jardins, terrasses, jardins suspendus et/ou partagés, créer une « Ecole mondiale de l’urbanité », repenser la toponymie du territoire à l’image de Paris-La Défense et créer ainsi Paris-Saint-Denis, Paris-Versailles ; lancer un téléphérique entre Belleville et Montfermeil, etc.
Bref, on l’aura compris, ce ne sont pas les idées qui manquent à Castro. Lui ont-elles, d'ailleurs, jamais fait défaut? Reste à imaginer le destin de ce rapport, « plaidoyer pour le mélange des gens, des genres, des choses ». « Le président m’a dit qu’il trouvait mon rapport formidable! » assure t-il. Et ce d’autant plus que, comme il l’indique dans l’introduction de son travail : « L’autre bonne nouvelle, c’est que ce que je propose ne coûte pas et probablement rapporte, mais il faut libérer les énergies et casser les hiérarchies. » Vaste programme !