Les ambassadrices du réemploi dans le Grand Est s'invitent de plus en plus sur les chantiers. Les quatre fondatrices en juin 2019 de Boma - pour « BOnnes MAtières » -, Clémence Guinin, Agnieszka Koziol, Sabrina Ferlay et Sandra Gaignet, ont érigé leur structure au rang d'accompagnatrice de référence des démarches d'économie circulaire des maîtres d'ouvrage (collectivités, bailleurs, désormais promoteurs), des architectes et des entreprises générales lors de déconstructions, restructurations ou rénovations de bâtiments dans la région, et depuis quelques mois aussi à Besançon (Doubs). La vigueur de la demande a modifié leurs plans, ou du moins a accéléré une mutation envisagée au démarrage : l'association initiale à buts multiples (sensibilisations, gestion d'une matériauthèque de produits de réemploi…) s'est fondue dans une société coopérative d'intérêt collectif (SCIC) de six équivalents temps plein, recentrée sur un profil de bureau d'études qui se positionne comme AMO (assistant à maîtrise d'ouvrage) ou comme cotraitant dans les équipes de maîtrise d'œuvre. Son chiffre d'affaires atteindra 350 000 euros cette année.
Rédaction de CCTP . Tout en cultivant son statut coopératif, Boma revendique - et décroche - une place tout aussi fondamentale dans l'acte de construire que les chaînons plus traditionnels. « Nous proposons une démarche complète », confirme Sandra Gaignet : successivement, diagnostic réglementaire produits, équipements, matériaux, déchets (PEMD) ; élaboration d'une stratégie d'économie circulaire qui fera le « tri » entre réemploi sur site ou hors site et recyclage ; étude de faisabilité économique et technique par l'approfondissement de la connaissance des caractéristiques des matériaux, en faisant appel au besoin à un laboratoire spécialisé ; analyse de la logistique des matériaux (transport, stockage sur chantiers) et de leur conditionnement. Pour la mise en œuvre, l'équipe Boma rédige, à l'instar de tout bureau d'études, des cahiers des clauses techniques particulières (CCTP) détaillés, spécifiques à chaque projet, matériau par matériau réemployé pour en fixer les modalités de dépose, traitement, emballage…
Parmi des opérations en cours particulièrement abouties, Boma radiographie à Strasbourg (Bas-Rhin) près d'un million de briques de structure de l'ancien hôpital militaire Lyautey en cours de démolition par GCM. Elles sont appelées à former le revêtement des façades du futur collège Solignac de la collectivité européenne d'Alsace. La SCIC agit comme membre de l'équipe de maîtrise d'œuvre de l'agence Nunc. Elle diagnostique aussi en détail les blocs sanitaires à réutiliser sur site lors de la restructuration du bâtiment de la Carsat dans la zone de la plaine des Bouchers, également à Strasbourg.
Au centre de la ville alsacienne, Boma est AMO du bailleur Domial pour son originale transformation de l'ancienne chambre régionale des comptes en une résidence étudiante d'ici à l'automne 2024. Sur place, 30 tonnes de matériaux seront conservées, pour 520 tonnes évacuées. Certes, les inspections prennent du temps. Mais, Sandra Gaignet le souligne, « nous savons nous inscrire dans le calendrier d'un chantier sans le retarder ».