Fraudes à la rénovation énergétique : l'Etat sort du bois

Agnès Pannier-Runacher et Thomas Cazenave ont présenté leur plan de lutte contre les fraudes à la rénovation énergétique, qui active de multiples leviers.

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Agnès Pannier-Runacher et Thomas Cazenave
Agnès Pannier-Runacher et Thomas Cazenave

Pas endémique, mais pas non plus marginale. La fraude à la rénovation énergétique entre dans le discours politique du Gouvernement, avec la présentation ce matin d'un plan de lutte par les ministres Agnès Pannier-Runacher (transition énergétique) et Thomas Cazenave (budget). Ce dernier a d'ailleurs estimé que la fraude à la rénovation énergétique pesait au minimum 100 M€ par an - un chiffre qui aux yeux de beaucoup d'observateurs paraît d'ailleurs fort bas.

Toujours est-il que les deux ministres ont entendu dans une table-ronde organisée à l'Anah, avenue de l'Opéra, la FFB, la Capeb, Qualibat, la DGCCRF, le PNCEE et la Mission interministérielle de coordination anti-fraude (Micaf). L'occasion pour tous ces acteurs de rappeler combien ces fraudes entachent la confiance des consommateurs, et rejaillissent sur tout un secteur. La DGCCRF a fait part d'une hausse des alertes de particuliers sur le sujet en 2023, en lien avec l'importance croissante de la rénovation énergétique dans les politiques publiques. Le président de la Capeb Jean-Christophe Repon a pour sa part exprimé son inquiétude de voir les TPE s'éloigner d'un marché qui devrait être naturellement le leur. Plusieurs intervenants ont par ailleurs souligné le besoin d'une bien meilleure coordination et d'un partage amélioré de l'information - une dimension que Le Moniteur soulignait déjà cet hiver, suite aux enquêtes du Moniteur des Artisans sur les escrocs de la réno.

Des consommateurs vigilants

Le plan présenté par le Gouvernement met largement l'accent sur la vigilance des particuliers. Campagnes d'information, bons réflexes mais aussi hausse des moyens de la DGCCRF pour traiter de la rénovation énergétique (l'effectif augmentera de 24 agents) ont ainsi été mis en avant. Par ailleurs, Agnès Pannier-Runacher a évoqué le projet de loi sur la sécurisation de l'espace numérique comme un outil important, avec l'instauration d'un filtre anti-arnaque. Ce dernier traquera notamment les sites qui, par exemple via un simulateur d'aides, captent l'identifiant numérique de milliers de particuliers. L'Agence du patrimoine immatériel de l'Etat (Apie) sera mise a contribution pour s'attaquer aux  utilisations frauduleuses du logo France Rénov. Une rapide recherche Google suffit à se convaincre de l'ampleur de la tâche.

Contrôles et partages d'information

Le schéma des aides pour 2024 est également mis en avant par l'Etat comme étant un facteur de lutte contre la fraude. Le rôle central de MonAccompagnateurRénov' a été rappelé, sans plus de nouveau sur les garanties effectives qui éviteront que les fraudeurs se fassent ainsi labelliser. Les deux ministres ont par ailleurs évoqué le renforcement du contrôle sur les mandataires financiers de MaPrimeRénov', un des maillons faibles du dispositif. Une disposition du projet de loi de finances pour 2024 prévoit de les habiliter par l'Anah. La Micaf voit par ailleurs ses attributions renforcées, pour "mettre en place une veille interministérielle en matière de fraude à la rénovation énergétique et renforcer la coordination déjà en place", indique le dossier de presse. Des évolutions juridiques pour favoriser le partage d'informations ou technologiques pour mieux traiter les données sont d'ailleurs envisagées.  Les contrôles sur site seront renforcés, passant à 10 % en 2024 pour les rénovations d'ampleur financées par l'Anah. Côté CEE, le PNCEE a annoncé lors de la table ronde que les contrôles in situ atteindraient 12,5 % des dossiers l'an prochain, puis 15 % en 2025. De nouvelles règles d'indépendance des bureaux de contrôle sont d'ailleurs annoncées, notre enquête de février dernier ayant mis en lumière de multiples liens d'intérêt. Le Gouvernement annonce une transparence accrue des procédures d'accréditation par le Cofrac.

Pour Thomas Cazenave, ce sujet s'inscrit dans une perspective plus large de lutte contre la fraude à toutes les aides publiques, qui peut prendre des formes très organisées. Il a souligné le rôle majeur que devait jouer Tracfin, pour identifier les flux financiers douteux. Une banque de RIB frauduleux sera également mise en place, que l'Anah pourra consulter avant de verser les aides.

Un arsenal utile pour s'attaquer à un phénomène qui ne s'arrête pas. Premiers retours dans quelques mois.

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