Fiche n° 4 : Les documents constitutifs du marché

Code des marchés publics 2006 -

Les textes relatifs aux documents constitutifs du marché évoluent légèrement. L’acte d’engagement occupe toujours une place plus prépondérante. Les cahiers des charges demeurent une pièce importante du marché, même si l’obsolescence des documents généraux présente l’inconvénient de complexifier le régime applicable.

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Les dispositions du code des marchés publics 2006

Les marchés publics prennent-ils toujours une forme écrite ?

Non. La forme écrite est traditionnelle en matière de marchés publics pour des raisons de preuve. Les Codes de 2001 et 2004 avaient cependant écarté l’obligation d’un écrit en dessous de certains montants : ce principe de souplesse est repris dans le Code 2006, dans lequel il est cependant atténué et unifié. En effet, les marchés publics sont désormais soumis ou non à la forme écrite en fonction d’une unique condition de seuil, dont le montant est fixé par l’article 11 à 4 000 euros, quelle que soit la matière d’intervention du marché (fournitures, services…) ou le pouvoir adjudicateur contractant (Etat, collectivités territoriales…).

Quel est le contenu d’un marché public sous forme écrite ?

La réponse dépend là encore des seuils : on distingue les marchés passés selon une procédure adaptée des marchés passés selon une procédure formalisée.

– Si le marché tombe en dessous des seuils fixés à l’article 26-II du Code, le pouvoir adjudicateur peut avoir recours à une procédure adaptée pour la passation. Celle-ci lui permet de s’exonérer de l’application des règles de l’article 11 du Code et de fixer ainsi d’une manière totalement libre le contenu formel du marché. Une telle pratique peut présenter des risques, car l’imprécision de ce contenu peut avoir des conséquences néfastes : des carences au niveau des spécifications techniques, du processus de mise en œuvre ou du contrôle sont susceptibles d’entraîner une mauvaise exécution du marché et un contentieux.

– Si par contre le montant des marchés dépasse les seuils fixés à l’article 26-II, le marché doit alors être passé selon les procédures formalisées : cela signifie que l’écrit doit comporter un acte d’engagement respectant les clauses du cahier des charges et qu’il doit comporter les pièces constitutives détaillées à l’article 12.

Par ailleurs, le Code prévoit un cas particulier en précisant les pièces constitutives du marché de conception-réalisation.

Quelles sont les pièces constitutives d’un marché passé selon les procédures formalisées ?

Le contenu des pièces constitutives est précisément fixé à l’article 12 : il s’agit de l’identification des parties contractantes, des preuves de la compétence de la personne signataire, de la définition de l’objet du marché, de la référence aux textes du Code en vertu desquels le marché est passé, de l’énumération des pièces du marché dans l’ordre établi par les parties contractantes (cet ordre prévalant par principe en cas de contradiction dans le contenu des pièces), du prix du marché, de la durée d’exécution du marché ou des dates prévisionnelles de début d’exécution et d’achèvement, des conditions de réception, de livraison ou d’admission des prestations, des conditions de règlement et des éventuels délais de paiement, des conditions de résiliation, de la date de notification du marché, du nom du comptable assignataire, sauf quand le paiement du marché est assuré par un tiers qui assure les mêmes obligations que le comptable public. En cas de marchés à tranches conditionnelles, il faut aussi mentionner les éléments qui leur sont propres. Enfin, en raison du démembrement de la passation du marché que suppose l’accord-cadre, celui-ci fait l’objet de dispositions particulières (art. 12-III).

Qu’est-ce qu’un marché à bons de commande?

Le marché à bons de commande est une forme particulière de marché public définie à l’article 77 du Code des marchés, proche dans son fonctionnement de certains accords-cadres, avec lesquels il est d’ailleurs combinable (article 76-VI). Il est utilisé lorsque les besoins ne sont pas connus avec précision. Matériellement, le marché à bons de commande est un contrat d’une durée maximale de quatre ans au contenu beaucoup plus libre qu’autrefois, mais dont le régime a été unifié. Le seul contenu obligatoire semble être relatif aux prestations sur lesquelles le marché porte (sans qu’il y ait désormais obligation de prévoir un minimum ou un maximum). Les bons de commande sont le moyen d’exécution du marché après conclusion de celui-ci : ils prennent la forme de documents écrits par le pouvoir adjudicateur au titulaire du marché et fixent avec précision les prestations demandées, le reste de leurs règles d’émission étant précisé par le marché préalablement signé.

Quel est le rôle des cahiers des charges ?

La nature et le régime des cahiers des charges sont détaillés à l’article 13. Il en existe quatre catégories en fonction de distinctions entre documents généraux et documents particuliers d’une part, entre documents administratifs et documents techniques d’autre part. Les cahiers des charges généraux, qui comprennent les cahiers des clauses administratives générales (CCAG) et les cahiers des clauses techniques générales (CCTG), sont en fait des documents contractuels types, conçus pour être applicables à une catégorie de marchés. Poursuivant un but différent, les cahiers des charges particuliers, qui regroupent les cahiers des clauses administratives particulières (CCAP) et les cahiers des clauses techniques particulières (CCTP), sont des documents qui ont pour objet de prendre en compte les spécifications propres à un marché et les exigences particulières du pouvoir adjudicateur. De plus les cahiers des charges particuliers peuvent servir à adapter (par dérogation) le contenu des cahiers des charges généraux au cas où ces derniers auraient vieilli. Le cahier des charges n’est pas applicable de plein droit, et tend à perdre de son importance de principe : il constitue maintenant davantage un référent de l’acte d’engagement (art. 11), et son absence n’est déterminante ni pour la qualification du marché, ni pour sa validité.

Les points abordés par la jurisprudence TABLEAU

Les implications pratiques

- Un cahier des charges général (CCAG et CCTG) n’est traditionnellement pas applicable de plein droit, et cette solution est implicitement maintenue dans le nouveau Code (article 13, dernier alinéa). Néanmoins, la référence ouverte ou informelle aux cahiers des charges généraux permet d’éviter certains oublis ou certaines carences dans la rédaction du contrat. Enfin, il est possible de combiner les clauses de différents cahiers des charges généraux.

- En raison du vieillissement, voire de l’illégalité de certaines clauses des cahiers des charges généraux, le Code 2006 prévoit explicitement des possibilités de dérogation (article 13) par le biais des cahiers des clauses particulières (CCAP et CCTP). Ces dérogations peuvent être une nécessité en cas d’illégalité. Le Code précise alors que les documents particuliers doivent indiquer les articles des documents généraux auxquels ils dérogent. En l’absence de telles précisions, et en cas de litige, le contrat ne serait pas illégal, mais le cocontractant du pouvoir adjudicateur pourrait tenter de démontrer son absence de volonté d’appliquer de telles dérogations.

- Le cahier des charges remis avec le dossier de consultation des entreprises (DCE) est destiné à être le socle du futur marché et n’a pas vocation à contenir d’information relative au déroulement de la procédure ou aux critères de choix des offres, ces spécifications étant l’apanage du règlement de la consultation.

- Il faut bien distinguer les documents constitutifs du marché des documents de consultation, qui ne font pas partie des pièces constitutives de celui-ci. Dès lors, des éléments tels que l’avis d’appel public à la concurrence ou le règlement de la consultation n’entrent pas dans le champ des pièces constitutives.

Avant le Code 2006Avec le Code 2006
L’absence de l’acte d’engagement suffit à motiver l’annulation de la décision de passation (CE, 14 janvier 1998, «Commune de Saint-Pierre c./ M. Pihouée»). Ce document prévaut d’ailleurs sur les autres, en cas d’ambiguïtés, de contradictions ou d’omissions (CAA Paris, 7 novembre 1989, « SA Laurent Bouillet »).Ce principe semble sortir encore renforcé de la nouvelle rédaction du Code, puisqu’il apparaît désormais comme le seul écrit matérialisant le marché, le cahier des charges n’étant plus mentionné expressément comme une pièce constitutive.
L’acte d’engagement doit être signé par le candidat ou par son représentant dûment habilité, cette formalité ayant un caractère substantiel et son absence pouvant entraîner le rejet de l’offre présentée sous forme d’acte d’engagement (CE, 10 décembre 1993, « Société Lopez Entreprise »).Malgré la suppression de l’alinéa de l’article 48 relatif à la signature des offres dans le nouveau Code, le principe de la signature de l’acte d’engagement est repris à l’article 11. L’article 48 précise par ailleurs que les offres transmises par voie électronique doivent être accompagnées d’un certificat de signature.
Le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) ne doit pas comporter d’exigences techniques spécifiques non justifiées par l’objet du marché ou ses conditions d’exécution, telles qu’elles aboutiraient à exclure certains candidats (CAA Douai, 31 mars 2005, « Société Thermotique SA c./ Opac Oise Habitat »).Cette solution devrait être confirmée dans son principe sous l’empire du nouveau Code. En effet, les exclusions déjà sanctionnées par le juge auparavant devraient faire l’objet d’une vigilance renouvelée, notamment en vue de protéger les PME.
A défaut de transmission intégrale des CCTP ou des CCAP, le préfet peut demander transmission des pièces manquantes. Dans ce cas, le délai du déféré préfectoral court alors soit à partir de la transmission du complément des pièces, soit à partir de la décision implicite ou explicite de refus de transmission du complément (CE, 8 avril 1998, « Préfet de la Sarthe c./ Commune de la Ferté-Bernard »).La redéfinition dans l’article 11 du nouveau Code de la composition de l’écrit contractuel n’est visiblement pas destinée à modifier cette jurisprudence. L’« intégration » du cahier des charges dans l’acte d’engagement ne modifie pas le rôle des documents particuliers, qui prennent en compte les éléments propres au contrat en cause et en constituent donc des éléments essentiels.
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