Fiche n°22 : Les garanties financières du marché

Code des marchés publics 2006 -

Produit d’un équilibre entre recherche de limitation des coûts pour le titulaire du marché et assurance d’une bonne exécution pour le pouvoir adjudicateur, le régime des garanties connaît quelques aménagements avec le Code 2006. Sur un plan général, les corrections vont dans le sens d’une plus grande souplesse de l’ensemble, accroissant les possibilités de choix du mécanisme le mieux adapté.

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Les dispositions du code 2006

Quelle est la physionomie générale du système des garanties ?

Les garanties sont des dispositifs facultatifs : elles ont pour fonction d’assurer la bonne exécution du marché en renforçant les droits financiers du pouvoir adjudicateur sur son cocontractant. Depuis 1992, le système de garantie des marchés publics repose sur la retenue de garantie, qui en constitue le mécanisme de droit commun. Pour limiter les contraintes et les coûts qui résultent des garanties, le Code prévoit la possibilité d’utiliser (sous certaines conditions) des mécanismes différenciés dans le champ de la retenue de garantie, mais qui peuvent être mieux adaptés dans certaines circonstances : ces procédés sont ceux de la garantie à première demande et de la caution personnelle et solidaire. L’article 102 prévoit, par ailleurs, que les cahiers des charges peuvent comporter des instruments encore plus spécifiques de garantie pour assurer l’exécution d’un engagement particulier.

Quelles sont les règles applicables à la constitution d’une retenue de garantie ?

La retenue de garantie (article 101) désigne la démarche par laquelle une partie des acomptes dus au titulaire du marché est bloquée sur un compte neutre. Cette retenue a pour but de couvrir, d’une part, les réserves apparues à la réception des fournitures, services et travaux objets du marché et, d’autre part, les réserves formulées pendant le délai de garantie (mais il s’agit désormais d’une simple hypothèse et non d’une condition obligatoire pour constituer une retenue).

La retenue peut être appliquée dans la limite maximale de 5 % du montant du marché, celui-ci pouvant inclure les avenants éventuels.

Sur un plan technique, le comptable public va, au moment du paiement, consigner le montant de la retenue de garantie sur un compte, afin que celle-ci puisse être maintenue à disposition.

Petite nouveauté du Code 2006 : pour préserver leur pleine efficacité, l’article 101 exclut désormais que le prélèvement s’effectue sur le versement des avances.

Quelles sont les modalités du remboursement de la retenue de garantie ?

Les règles du remboursement sont partiellement fixées à l’article 103, qui prévoit une obligation de remboursement de la garantie au titulaire du marché, dans le délai d’un mois après expiration du délai de garantie. De manière plus générale, la restitution des sommes mises de côté est imposée, à compter du moment où le titulaire du marché a exécuté ses obligations. Le caractère contraignant de cette échéance est garanti par le fait que le Code sanctionne tout retard par le paiement d’intérêts moratoires, dans les mêmes conditions que pour la transgression du délai global de paiement (art 98, voir fiche 21). De plus, le pouvoir adjudicateur doit préciser, dans ce délai, les motifs pour lesquels il estime que le marché a été mal exécuté : un refus de libération de la retenue de garantie pourrait, en effet, potentiellement engager la responsabilité de l’administration.

Qu’implique le recours aux dispositifs alternatifs à la retenue de garantie ?

Les mécanismes, autres que la retenue de garantie, décrits par le Code sont la garantie à première demande et la caution personnelle et solidaire.

S’agissant de leur domaine, ces deux dispositifs se présentent comme des dérogations de la retenue de garantie : ils viennent se substituer à celle-ci (art 102) à la demande du titulaire du marché, et – dans le cas d’une caution solidaire – si le pouvoir adjudicateur cocontractant ne s’y oppose pas. L’utilisation de la garantie à première demande, ou de la caution personnelle et solidaire, est aussi subordonnée à l’absence de retenue de garantie en cas de résiliation du marché (art 104). Enfin, la garantie doit désormais être aussi utilisée dans les cas où la retenue de garantie ne peut être mise en œuvre du fait de l’insuffisance des sommes dues au titulaire du marché.

Concernant la portée de ces garanties, il s’avère qu’elles constituent des sûretés fortes au profit du pouvoir adjudicateur contractant, leur point commun résidant dans le fait qu’elles s’appuient toutes les deux sur l’engagement de garants tiers au contrat, au bénéfice du pouvoir adjudicateur. Sous cet angle, la nouvelle version de l’article 102 est venue apporter quelques précisions relatives aux candidatures des groupements d’opérateurs économiques.

Ce texte vient maintenant clarifier les régimes de constitution de garanties en présence d’un groupement d’opérateurs économiques (art 51), en distinguant les hypothèses de groupement solidaire (le mandataire fournit une garantie pour l’ensemble du groupement) de celles de groupement conjoint (chaque membre fournit sa garantie à hauteur de la part du marché qu’il doit exécuter, sauf éventuellement si le mandataire est solidaire de tous les autres membres).

Existe-t-il d’autres dispositifs de garantie que ceux détaillés dans le Code ?

L’article 105 envisage effectivement l’introduction, dans le cahier des charges, d’autres garanties que celles prévues par le Code : le contrat pourra, alors, vraisemblablement bénéficier de garanties ad hoc largement inspirées du droit privé.

Les implications pratiques

Le Code impose le montant maximal de la retenue de garantie, qui est fixé à 5 % du montant total du marché. Cependant les retenues de garantie d’un rapport inférieur à 5 % du marché sont toujours envisageables en pratique.

Dans le cadre de la constitution de la garantie à première demande ou de caution personnelle et solidaire, conformément à une disposition traditionnelle, le pouvoir adjudicateur peut récuser l’organisme qui apporte sa garantie (article 102) : il devra cependant faire preuve de prudence dans l’utilisation de ce pouvoir et prendre soin de motiver sa décision.

Les termes utilisés dans le contrat pour définir la garantie utilisée doivent être précis et renvoyer aux articles du Code appropriés. Toute garantie à première demande, rédigée de manière imprécise ou conditionnelle, peut, en effet, faire l’objet d’une requalification en une caution et se voir opposer les exceptions prévues dans le marché.

La formulation de réserves par le pouvoir adjudicateur est un moyen de prolonger la retenue de garantie, et donc de faire pression sur le titulaire du marché pour qu’il exécute ses obligations. Mais, de manière plus souple, surtout si les défauts et inexécutions constatés n’ont pas un caractère très important, la personne publique aura parfois intérêt à transiger : elle pourra exiger du titulaire des finitions complémentaires en échange de la réception sans réserve des fournitures, travaux ou services. Cette solution peut présenter d’autant plus d’intérêt que le refus de remboursement de la retenue de garantie, en raison d’imperfections mineures, pourrait être considéré comme injustifié par le juge en cas de contentieux.

Les points abordés par la jurisprudence

Avant le Code 2006Avec le Code 2006
La caution constituée par le titulaire du marché doit être libérée dans le mois qui suit la réception définitive des travaux, sauf si le maître de l’ouvrage a signalé, dans ce délai, à l’établissement qui a donné la caution, que le titulaire n’avait pas rempli toutes ses obligations. En cas de refus de remboursement non justifié, la responsabilité de l’administration peut être engagée (CE, 10 mai 1995, « OPHLM de Nanterre »).Cette solution est transposable à la retenue de garantie, sans que le Code 2006 vienne y apporter de modification : l’article 103 vient ainsi rappeler le principe du remboursement de la retenue de garantie dans le délai d’un mois, au plus tard après l’expiration du délai de garantie.
L’absence de remboursement de la retenue de garantie est régulière, dès lors que le pouvoir adjudicateur avait émis des réserves lors de la réception des travaux et qu’il avait été contraint, après des mises en demeure infructueuses du titulaire du marché, de recourir à une entreprise tierce pour un montant supérieur à la somme consignée (CAA Bordeaux, 2 décembre 2004, « Montagut »).Le nouveau Code n’a pas vocation à apporter de modification à l’orientation de cette jurisprudence, qui vient tempérer le principe de remboursement obligatoire et automatique du titulaire du marché. Cette solution paraît néanmoins se limiter, dans l’immédiat, à un champ délimité par des circonstances précises.
Les dispositions du Code des marchés publics n’imposent pas que la garantie à première demande crée des obligations identiques à celles résultant de la caution personnelle et solidaire ou, par voie de conséquence, identiques à celles qui incombent au titulaire du marché à raison de la retenue de garantie (CE, 10 mai 1996, « Fédération nationale des travaux publics »).Le Code n’a pas d’impact sur cette solution, qui fait ressortir la spécificité de la garantie à première demande : celle-ci est indépendante dans son contenu des obligations stipulées dans le marché. De ce fait, les engagements du garant peuvent être différents de ceux de la caution solidaire ou du titulaire, et ils peuvent être supérieurs à ces derniers.
La retenue de garantie couvre la bonne exécution du marché et toutes les sommes dont le cocontractant de l’administration est reconnu débiteur, à quelque titre que ce soit, en exécution de son marché (CE, 26 avril 1985, « CHR de Limoges » c. Banque de la construction et des travaux publics).Cette solution large et imprécise a fait l’objet d’un effort de précision constant ces dernières années, tant par le biais des textes que par celui de la jurisprudence. Ainsi, le Code 2006 remanie légèrement le principe et dispose, dans son article 101, que « la retenue de garantie a pour seul objet de couvrir les réserves à la réception des travaux, fournitures ou services, ainsi que celles formulées, le cas échéant, pendant le délai de garantie ». Reste à savoir si la formulation de 2006 va servir de base à de nouvelles évolutions jurisprudentielles.
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