Feder : les régions françaises à la manœuvre

Lors de la prochaine période budgétaire de l’UE (2014-2020), les "Fonds européens de développement régional" seront gérés par ces collectivités locales. Un changement qui n’est pas neutre pour le secteur du BTP, la très grande majorité des projets susceptibles de lui octroyer du travail étant financée par le Feder.

La tradition jacobine de la France appartient de plus en plus au passé : lors du prochain cadre financier européen, qui s’étendra de 2014 à 2020, les Régions hexagonales auront une compétence de gestion pour la majorité des fonds européens, et notamment pour la totalité du Feder. Rien de plus logique a priori, cet acronyme signifiant "Fonds européen de développement régional".

Le changement n’est pourtant pas mince et les inquiétudes des élus locaux réelles, alors que la signature d’un Accord de partenariat élaboré par l’État central et les collectivités locales – qui fixera les grandes orientations des programmes de l’UE dans le respect de la "Stratégie Europe 2020" – devrait intervenir dans les semaines à venir pour une transmission à la Commission européenne fin novembre 2013. Les présidents de la Maison européenne des pouvoirs locaux français (MEPLF), réunis à l’AMF (Association des maires de France), le 29 octobre dernier, l’ont exprimé à mots couverts. Olivier Dussopt, vice-président de l'Association des petites villes de France (APVF), plaide ainsi pour « le maintien de l’éligibilité aux fonds européens des petites communes » et la MEPLF dans son ensemble déplore officiellement « la fréquente insuffisance de concertation des échelons locaux et départementaux lors de la préparation des documents stratégiques », au niveau de l’élaboration du Partenariat, comme de la rédaction des Programmes opérationnels (PO). Ces derniers, qui servent à "flécher" les grandes priorités fixées par chaque Région, devront être finalisés en janvier. Derrière ces formulations prudentes se cache une crainte des collectivités locales d’échelon inférieur à la Région (départements et surtout communes et intercommunalités) de voir celle-ci faire bénéficier en priorité ses projets des fonds européens sur lesquels elle a désormais la main. Autre sujet d’inquiétude : que les "services européens" des Conseils régionaux ne soient pas renforcés à temps, notamment par des transferts de personnels venant des préfectures, ce qui pourrait occasionner des retards dans le montage des dossiers de projets à financer par l’UE. La France reste pour l’instant une bonne élève dans le domaine de la consommation de fonds, en tout cas pour le Feder, 81% l’ayant été sur la période 2007-mai 2013 (contre 90% sur 2000-2006). Il serait dommage de perdre cette bonne habitude.

8 milliards d’euros pour la France

La nouvelle compétence des Régions sur le Feder n’est pas sans conséquence pour le BTP. C’est en effet principalement via ce fonds que les projets susceptibles de donner du travail à ce secteur sont financés, bien plus que par le Fonds social européen (FSE) ou les Fonds de cohésion (qui ne bénéficient pas à la France). En l’état actuel des négociations du budget de l’UE pour 2014-2020, qui n’a toujours pas été validé par le Parlement, on sait que la France disposera de 14,2 milliards d’euros de fonds. 5,841 milliards iront aux régions les plus développées (12 en France), 3,914 aux régions en transition (10 en France métropolitaine) et 3,136 aux régions les moins développées (les DOM-TOM). Sauf changement majeur lors de la discussion parlementaire, et selon nos informations, l’Hexagone devrait bénéficier de 8 milliards d’euros de Feder. Les régions recevront d’ici quelques jours le montant de l’enveloppe de fonds qui leur sont octroyés, avec une répartition pour chaque type de subventions.

Les projets financés devront répondre à trois objectifs thématiques (OT) principaux fixés par l’UE : la recherche et l’innovation, la compétitive des PME et le soutien à la « transition vers une économie à faible émission de CO2 dans tous les secteurs ». 80% du Feder devront être consacrés à ces trois OT dans les régions les plus développées, 60% dans les régions en transition et 50% dans les régions les moins développées.

Transports propres et logements

Ce sera via la priorité de la "Transition énergétique" que pourront se financer les projets intéressants les entreprises de construction. On pense bien sûr aux modes de transports "propres", le rail surtout (tram, métro, TER), mais aussi les voies navigables, les lignes de bus en site propre, voire les systèmes de vélo ou d’auto en libre-service. Il est évident que les projets routiers n’y trouveront pas leur place. Autre catégorie : les projets ayant trait à la rénovation énergétique des logements, sociaux comme privé. Le détail des investissements fixés par l’Europe (voir ci-contre) laisse espérer que d’autres types de bâtiments, notamment la rénovation d’équipements publics comme des écoles ou des hôpitaux pourraient bénéficier du Feder. Dernier axe, qui ne s’inscrit pas dans ces trois priorités, mais auquel la France est très attachée : le Volet urbain. Le gouvernement  a décidé d’y consacrer 10% du Feder, allant plus loin que les 5% préconisés par l’UE. En janvier, la Meplf avait souhaité que les fonds alloués dans ce cadre « ne soient pas uniquement concentrés sur la politique de la ville (cohésion sociale et urbaine des quartiers en difficultés), mais qu’ils puissent également être affectés à d’autres priorités telles que la recherche et l’innovation ou encore les transports. » On peut également imaginer que des opérations d’aménagement urbain rentrent dans ce cadre. Reste maintenant à savoir quels vont être les choix opérés par les Régions dans les PO en cours d’élaboration. Désormais, chacune, en concertation avec les collectivités locales, va pouvoir fixer leurs priorités, qui pourront être différentes, même si elles devront respecter la "Stratégie Europe 2020". Ainsi, une région préféra soutenir le logement privé, plutôt que social, une autre l’efficacité énergétique au détriment des énergies renouvelables… Des choix que suivront avec intérêt les entreprises de BTP.

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