Après avoir habillé bon nombre de bâtiments tertiaires construits dans les dernières décennies, les façades aluminium vitrées sont condamnées à se réinventer. Les concepteurs vont devoir à la fois s'adapter à un monde plus chaud, où la gestion du rayonnement solaire l'été deviendra prioritaire, mais aussi à un monde plus sobre, où les apports de lumière naturelle permettront de limiter les consommations énergétiques en hiver. A Batimat, plusieurs industriels présentent des concepts pour répondre à ces enjeux parfois contradictoires. Acteur majeur de la façade aluminium, Technal (hall 6, stand E62) dévoile par exemple son mur-rideau Tental. Celui-ci maintient d'importantes surfaces vitrées (jusqu'à 12 m2 ) tout en facilitant l'installation de protections solaires à l'extérieur du bâtiment - plus efficaces pour bloquer les calories - grâce à des systèmes d'accroches intégrés.
« La RE 2020 nous montre déjà qu'il est nécessaire de travailler beaucoup plus en amont avec les équipes de maîtrise d'œuvre pour trouver les meilleurs compromis entre plusieurs sujets : le confort d'été, l'efficacité énergétique, le bilan carbone… Cette recherche d'optimisation peut aussi conduire à adapter la taille et le poids des éléments en fonction des étages et des usages, en mixant les solutions dans un même bâtiment », explique Marion Villard, responsable marketing Technal.

Résistance au vent
L'impératif de protéger les bâtiments de la surchauffe invite aussi à repenser la place de la protection solaire dans la façade. Renson (hall 6, stand E022) et Reynaers Aluminium (hall 6, stand F50) portent un concept commun intégrant une toile d'occultation dans le profil du mur-rideau. Cette offre globale présente l'avantage de répondre à l'une des critiques les plus fréquemment adressées aux protections solaires extérieures : la faible résistance au vent. Ici, celle-ci est garantie jusqu'à 130 km/h en position fermée.
Wicona (hall 6, stand C062) va pour sa part exposer un module de façade cadre respirante composée de deux parois étanches vitrées, intégrant un store motorisé dans la lame d'air. Le fabricant y a positionné deux séries d'aérations dans la traverse basse, à l'avant et à l'arrière du store, qui évitent la condensation et permettent d'équilibrer plus facilement la lame d'air. « Nous souhaitons anticiper les futures façons de construire, avec l'objectif de réduire l'empreinte carbone du bâtiment tout au long de sa vie, détaille Fabrice Triaes, directeur technique de Wicona. Demain, il s'agira de se protéger des surchauffes avec l'intégration et l'automatisation de la protection, mais aussi de contribuer à la gestion bioclimatique du bâtiment avec des apports d'air frais. » Mieux protégées du rayonnement solaire, les façades devront assumer d'autres fonctions pour le bien-être des usagers. La RE 2020 décourageant l'usage de la climatisation, il va falloir se tourner vers des solutions de rafraîchissement naturel : l'une des plus simples reste la ventilation nocturne, avec une gestion mécanisée des ouvrants. Elle impose d'avoir rendu possible la circulation de l'air, avec un bâtiment traversant.

Arbitrages serrés
« Un plateau ouvert permet à la fois d'organiser une ventilation naturelle et d'envisager plus facilement un changement d'usage, dans une logique de réversibilité, relève Nicolas Ziesel, cofondateur de l'agence Koz Architectes. Il devient de plus en plus compliqué d'anticiper l'utilisation d'un bâtiment à vingt ou trente ans, mais il apparaît que le tout-vitré a vécu : on ne vitrera demain que ce qu'on va pouvoir protéger du soleil. On peut envisager une hybridation des principes de conception entre résidentiel et tertiaire, avec des façades plus épaisses pour favoriser l'inertie, moins d'ouvertures que dans les bureaux construits aujourd'hui, mais des hauteurs sous plafond plus importantes que dans les logements actuels. »
Dernier impératif pour les concepteurs : la prise en compte du facteur environnemental. Si la RE 2020 accorde des dérogations sur l'indicateur carbone (Ic construction) pour les bureaux situés dans les zones méridionales (H2d et H3), les exigences croissantes de la réglementation vont créer des arbitrages toujours plus serrés sur l'emploi de matériaux énergivores comme les vitrages et l'aluminium et, de façon plus générale, le choix des modes constructifs. « Les bureaux d'études sont en attente de réponses industrielles : nous avons des produits intelligents qui réagissent aux saisons, aux orientations des façades, avec des composants plus simples pour faciliter l'entretien et le réemploi, résume Robert-Jan Van Santen, fondateur du groupe VS-A. Il nous faut réfléchir sur cinquante ans pour réduire à la fois les consommations de matières et d'énergie : les projets passifs sont souvent plus complexes en conception, mais plus efficaces à l'usage ! »
