Il faut remonter 15 ans en arrière, avec la consultation sur le Grand Paris, pour retrouver une ambition comparable de l’Etat en matière d’architecture. Début 2025, à l’issue de la première phase de la compétition internationale dont le lancement officiel aura lieu le 8 novembre 2024 sous l’intitulé « Quartiers de demain », 30 équipes de maîtrise d’œuvre mettront leur talent au service de 10 quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Chacune d’elles bénéficiera d’une enveloppe de 150 K€. Il leur reviendra de produire un diagnostic, un scénario et une esquisse.
Double diversité
Le choix des sites résulte d’un repérage opéré par les préfets de région, sous l’oeil des services des deux ministères qui co-pilotent la procédure : la Culture et la Transition écologique, réunies au sein du groupement d’intérêt public l’Europe des projets architecturaux et urbains (Gip Epau). La force des 10 « quartiers de demain » résultera de leur faiblesse apparente : la majorité d’entre eux ne bénéficient pas du nouveau programme national de renouvellement urbain, et plusieurs ont jusqu'ici totalement échappé aux financements des exercices précédents.
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La diversité du tissu urbain français se reflète dans un échantillon qui comprend trois métropoles, dont celle de Paris, le bourg de Lodève et plusieurs villes moyennes. La variété des thèmes complète cet éclectisme : les équipes candidates se confronteront à une barre de logements à Caen, à un espace vert délaissé à Colmar, à une plaine des sports de Manosque ou encore à la réconciliation entre Lodève et ses deux rivières. Les deux ministères veilleront à conjuguer les réponses aux défis culturels et climatiques posés à la ville du XXIe siècle.
Institutions en ordre de marche
Les dialogues compétitifs aboutiront, en octobre 2025, à sélectionner les 10 lauréats, parmi les groupements pluridisciplinaires fédérés par des architectes ou des paysagistes mandataires. Deux représentants des habitants concernés participeront à chaque jury. « Il ne s’agit pas d’un concours d’idées. Les quartiers de demain ont vocation à redevenir des lieux de création architecturale majeurs. Ces 10 démonstrateurs en apporteront la preuve », décrypte l’un des acteurs de la procédure inscrite dans le programme Quartiers 2030 du secrétariat d’Etat à la ville.
« Nous avons fait le tour de France des préfets et des maires des 10 sites, pour préparer tous les financeurs potentiels à contribuer aux projets », ajoute en « off » le représentant du Gip Epau, fort de son partenariat avec les institutions nationales de l’aménagement et de l’architecture : Agence nationale de la cohésion des territoires, agence nationale pour la rénovation urbaine, cité de l’architecture et du patrimoine, ordre des architectes, banque des territoires… Mais cette coordination n’implique pas de laxisme budgétaire : les concepteurs devront calculer leurs enveloppes et s’y tenir.
Objectif réplicabilité
La réplicabilité se trouve au cœur de l’orchestration de la démarche. Ses initiateurs espèrent susciter une effervescence intellectuelle à toutes les échelles. Dans chacun des dix sites, des événements locaux associeront les écoles d’architecture. Les débats se prolongeront dans des travaux de recherche, des films, des conférences qui visent une audience nationale et internationale. Le Gip-Epau a trouvé l’expression, pour résumer son ambition culturelle : créer une « manufacture des quartiers ».