C'est le plus gros bâtiment du village et pourtant… Comme si elle avait su miraculeusement réduire son échelle par le savant assemblage de ses volumes, l'école des Coteaux fleuris livrée par la jeune agence parisienne Hemaa Architectes - associée pour la circonstance à Hesters-Oyon - trouve naturellement sa place à l'ombre du clocher d'Heudebouville (Eure), paisible bourgade nichée en bord de Seine.
Cette discrétion n'efface pas une personnalité bien affirmée. Le recours au bois et à l'ardoise, comme la morphologie vernaculaire des longères accolées, aurait pu tourner au mauvais pastiche si les concepteurs n'avaient su transcender cette référence normande. Le bois évoque bien les colombages des édifices du centre du village, l'ardoise fait écho au clocher voisin, mais l'école affiche des lignes épurées et parfaitement contemporaines. Le mariage des matériaux fonctionne à merveille : la répétition systématique et verticale des brise-soleil en bois clair souligne l'horizontalité d'une façade rehaussée par la nuance gris bleutée de l'ardoise.

« Posées sur l'herbe ». « C'est la géographie du site qui a ordonné l'implantation de l'ouvrage, expliquent Charles Hesters et Pierre Martin-Saint-Etienne, les deux fondateurs d'Hemaa dont c'est la première réalisation d'envergure après seulement quatre ans d'existence. Les cinq maisonnées qui accueillent les trois classes de maternelle, les trois classes de primaire, la cantine, le dortoir et les autres éléments du programme respectent la pente naturelle du terrain. Elles apparaissent comme posées sur l'herbe et sont desservies par un hall traversant, véritable point de rencontres et d'échanges. Les deux cours de récréation pour petits et grands s'inscrivent dans le prolongement direct des préaux, tandis qu'un verger fait entretenir, en fond de parcelle, un rapport étroit des enfants à la nature environnante. Des noues récupèrent les eaux de pluie pour alimenter un bassin paysager en contrebas. » Nul doute qu'un tel cadre favorise le bien-être des élèves et les apprentissages.
Si elle est accueillante, l'école des Coteaux fleuris se veut aussi modulable. L'organisation en strates - chaque maisonnée est autonome - et le recours à une structure en portiques de bois sans point porteur intermédiaire rendent possibles de futures extensions si la population locale venait à croître. Il suffirait alors d'ajouter un portique pour prolonger les bâtiments et créer de nouvelles classes, d'agrandir de la même façon le réfectoire, d'étendre les préaux comme les cours de récréation. D'autant que les réseaux et les systèmes de sécurité incendie prévoient eux-mêmes cette possibilité. Les façades et la toiture de l'école sont constituées de modules pré-assemblés hors site, associant étanchéité air/eau, isolant et structure. Ces éléments de 5 m sur 2 m, ont été développés en 3D avec un charpentier de Bois-Guillaume, près de Rouen (Seine-Maritime).
Le recours au bois et à l'ardoise, l'intégration discrète de panneaux solaires en toiture et l'absence de consommation d'énergie fossile pour le chauffage limitent l'empreinte carbone de cette école décidément vertueuse. Elle décroche ainsi les labels E + C- (niveau E3C2) et Bepos. Un 20 sur 20 sur tous les plans !