Equipement scolaire - Mimétisme urbain

Quand tu projettes une étable, une maison, un quartier : pense à la ville », professait l'architecte suisse Luigi Snozzi (1932-2020) à ses étudiants de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, usant là de l'un de ses célèbres aphorismes pédagogiques. L'agence Richter y a souscrit pour la conception de l'école maternelle/centre de loisirs qui prend place dans le quartier de Mitry-Le-Neuf, extension du bourg ancien de Mitry-Mory (Seine-et-Marne), avec ses lotissements construits sur des terres agricoles à partir des années 1920, point de départ du grand étalement pavillonnaire actuel.

Le bâtiment s'inscrit dans le mouvement général de régénération de ces « réserves urbaines » où, jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi Elan, architectes et paysagistes n'avaient guère droit de cité face aux géomètres et autres promoteurs. Ainsi, en pensant à Luigi Snozzi, les trois associés de l'agence - Pascale Richter, Jan Richter et Anne-Laure Better - ont imaginé un bâtiment à rez-de-chaussée, tout en bois, qui revisite cette forme d'urbanisation au moyen d'un volume en nappe étalé sur sa parcelle. Opaque en périphérie, il se creuse de deux cours de récréation communicantes et d'une série de patios qui viennent créer de multiples percées visuelles. Ainsi, tels des pavillons indissociables de leurs jardinets, chaque espace clos se prolonge vers l'extérieur, l'édifice créant ainsi son propre paysage. Une constante de l'agence, pour qui cette approche paysagère, matière première du bâti, lui avait valu l'Equerre d'argent en 2018 pour le centre psychothérapeutique Donald-Winnicott de Metz (Moselle).

Placette et maisonnettes. L'organisation générale du plan est donc à l'image d'une ville avec son axe majeur, tel un « car-do maximus », à l'échelle des enfants. Celui-ci commence sur le parvis extérieur, se poursuit par un grand abri délimité par des claustras, où les parents accompagnent leurs bambins jusqu'au seuil du hall. En continuité, une longue rue intérieure éclairée en lumière naturelle relie l'école maternelle au centre de loisirs. Avec, à l'articulation, un élargissement dessinant une placette entre les deux entités. « La fragmentation du bâtiment fait écho à la trame parcellaire du secteur, dense et resserrée, ainsi qu'à la petite échelle des pavillons », explique Jan Richter.

Ainsi des salles de classe semblent former chacune un volume indépendant, grâce à leurs sheds qui soulèvent et fragmentent les toitures. A l'intérieur, les hauteurs sous plafond fluctuent, passant de plus de 5 m dans la zone entrée à 2,50 m côté cour. Au lieu de boîtes avec leurs tables alignées, les salles de cours deviennent comme les maisonnettes d'un village. Dans les espaces ouverts, ces variations de hauteurs et d'ambiances créent naturellement des zones différenciées. « Nous nous sommes interrogés sur la pertinence de volumes aussi vastes pour des enfants, mais l'exemple des salles de classe à mezzanine de l'école de Monte Carasso (Suisse), réalisée en 1993 par Luigi Snozzi - encore lui ! - a achevé de nous convaincre », assure Jan Richter.