Les travaux sur les deux écluses de Méricourt, qui barrent la Seine à l'aval de Mantes-la-Jolie (Yvelines), arrivent à leur point de bascule : la rénovation du premier équipement s'achève et le maître d'ouvrage s'apprête à le rendre à la circulation pour entamer les travaux sur le deuxième. Avec cette étape, c'est le plus grand chantier mené par Voies navigables de France (VNF) ces dernières années qui arrive à mi-chemin.
Une opération stratégique car Méricourt, placé sur l'axe Paris-Le Havre qui accueille 30 % du trafic fluvial hexagonal, voit passer 250 bateaux par semaine. En 2019, 16 millions de tonnes de marchandises y ont transité, soit l'équivalent de 2 000 poids lourds par jour. Or, les écluses, qui datent des années 1960, accusent leur âge : bajoyers déformés, tirants fragilisés, terre-pleins dégradés… Une importante rénovation s'imposait, à laquelle l'opérateur a ajouté l'allongement du sas de l'écluse n° 1, qui passe de 160 m à 185 m et pourra donc, comme sa voisine, accueillir des bateaux de grand gabarit.
Montées d'eau spectaculaires. « C'est un chantier rare », estime Gaétan Jacolin, qui coordonne le projet pour VNF. D'abord parce qu'il était inenvisageable d'interrompre la circulation sur la Seine, ce qui impose de maintenir l'une ou l'autre des écluses en exploitation tout au long des quatre années de travaux. Ensuite, en raison de l'environnement fluvial : de nombreuses opérations sont réalisées depuis des pontons, souvent à des hauteurs différentes, obligeant les équipes à constamment s'adapter au niveau de l'eau. Ce dernier monte parfois de manière spectaculaire, comme en 2021 quand deux crues décennales ont contraint le maître d'œuvre à réaliser certaines opérations sous eau et non plus à sec. Et cette même année, les équipes ont dû, pendant deux périodes, sortir chaque soir les engins du batardeau qui sert à l'allongement de l'écluse n° 1 au cas où une crue se produirait pendant la nuit.
« Visibilité réduite ». Les travaux ont commencé en mai 2020 avec la remise en état de l'un des deux bajoyers de l'écluse de 160 m et se sont poursuivis par l'allongement du sas. Pour cela, les équipes ont créé une zone étanche de 25 m x 17 m. Il a ensuite fallu couler 700 m3 de béton sous eau pour assurer la stabilité de l'ouvrage. « Un travail dantesque, souligne Gaétan Jacolin, car la visibilité est très réduite dans la Seine. » D'autan que, malgré les sondages préalables, le terrain réservait une surprise : les ingénieurs y ont découvert les fondations en béton d'une ancienne écluse. « L'histoire n'était pas écrite par avance, résume Grégoire de Malherbe, directeur du chantier pour Bouygues Travaux publics, qui opère en conception-réalisation. On s'adapte, c'est tout l'intérêt du projet ! »
Périmètre très restreint. Un projet qui multiplie les corps de métier - terrassement, génie civil, mécanique, contrôle-commande, équipement, vantellerie, travaux sous eau… - et les techniques sur un périmètre très restreint, comme autant de chantiers qui cohabiteraient. VNF et son maître d'œuvre entament maintenant la deuxième phase centrée sur l'écluse n° 2 avec la réhabilitation des bajoyers, la vérification du radier et la reprise des deux terre-pleins. L'écluse de Méricourt intégralement rénovée retrouvera sa pleine capacité en février 2024.
