Energie : la géothermie au service du patrimoine

Au cœur du bois de Boulogne (Paris XVIe ), la foreuse Klemm est sur le point de creuser à 150 m de profondeur. Son rôle : réaliser les percements pour accueillir 19 sondes de géothermie afin d'alimenter en chauffage et en climatisation le château de Bagatelle et le Trianon, tous deux classés, situés juste derrière elle. « Cette opération s'inscrit dans la revalorisation du site et de quatre de ses bâtiments historiques - avec les villas Windsor et Amélia - qui accueilleront un programme d'expositions permanentes et temporaires », expose Océane Léonard, chargée de communication à la fondation Mansart, maître d'ouvrage de ce vaste programme de rénovation d'un montant global de 8,7 M€.

« Alors que la remise en service des anciennes chaufferies gaz et fuel impliquait des dépenses de l'ordre de plusieurs dizaines de milliers d'euros par an, l'enjeu pour nous était de chauffer nos bâtiments dans le respect de ce vaste poumon vert », appuie- t-elle.

La fondation s'est donc tournée vers la géothermie de surface, et plus particulièrement vers le système de géo énergie sur sondes inclinées développé par Celsius Energy. « Notre procédé nécessite une emprise au sol minime le temps des travaux - seulement 300 m² ici - comparée à une solution de géothermie classique », explique Emma Barsellotti, sa directrice des opérations. Cette technologie a donc été choisie pour sa capacité à s'intégrer discrètement dans un espace boisé classé et à proximité de ces bâtiments.

Trois champs de sondes. Le projet, réalisé en partenariat avec Vinci Energies dans le cadre d'un mécénat, comprendra à terme 43 sondes réparties sur trois champs, pour une puissance totale de 360 kW. Les travaux, réalisés par l'entreprise Auvergne Forage, ont commencé en septembre dernier. Douze puits dotés de sondes en double U avec des angles d'inclinaison compris entre 6 et 20°, suivant une disposition en étoile, ont d'abord été réalisés devant la villa Windsor. « Les forages sont effectués au travers d'un container surmonté de grilles carrossables qui constituent chacune le point de départ des différents puits. Leur nombre et leur géométrie sont définis en amont grâce à un logiciel développé en interne, afin de tenir compte de la conductivité thermique du sol, des besoins calorifiques, des limites de la parcelle et du bâti, etc. Autant de données statiques validées par le géologue », détaille la directrice des opérations.

Si ce site est déjà en cours de renaturation, 12 autres forages ont été pratiqués en janvier, au droit de la villa Amélia, et les sondes attendent d'être raccordées. La mise en œuvre de l'installation face au château devrait, elle, s'achever début mai, pour délivrer une puissance de 240 kW en chaud et 295 kW en froid à elle seule.

Chaque champ de sondes est raccordé à son local technique, déjà entièrement équipé. L'eau récupérée à 15 °C rejoindra un circuit fermé pour préchauffer des pompes à chaleur eau/eau de plus de 100 kW chacune. Grâce à un échangeur, ces PAC récupéreront les calories afin de chauffer ou rafraîchir les différents bâtiments. Leur installation a été assurée par l'entreprise Valentin, en charge du génie climatique.

A terme, la solution couvrira 94 % des besoins en chauffage et climatisation du complexe, soit 100 % pour les villas Windsor et Amelia, et 83 % pour le château de Bagatelle et le Trianon. « Un appoint gaz ou électrique sera tout de même nécessaire pour pallier les variabilités saisonnières, lors des pics de chaleur ou de grand froid », pointe Emma Barsellotti. Pour optimiser le fonctionnement du dispositif et répondre au plus près aux besoins, Celsius Energy accompagnera l'exploitant, la fondation Mansart, grâce aux données dynamiques enregistrées par son logiciel de pilotage. L'installation permettra également de réduire de 71 % la consommation d'énergie finale (avec une consommation de 256 MWh en chauffage pour le site du château) et de diminuer de 89 % les émissions de CO2 par rapport au précédent dispositif.