Les essais post-livraison sont concluants. « Nous ne constatons aucun problème de vibrations ou de bruit solidien lors des passages du métro, bien que les résultats définitifs ne nous seront remis que dans quelques jours », assure Fabrice Morel, chef de projet MOE à la direction des projets urbains de Systra France.
À Montrouge (Hauts-de-Seine), le bureau d’études était en charge de la conception du dispositif anti-vibratile qui sépare l’immeuble de 39 logements en R+5, conçu par l’agence d’architecture Camille Salomon pour RATP Habitat, installé à l'aplomb de la nouvelle station Barbara sur la ligne 4.
Définir les seuils
« Lorsque la RATP a décidé d’aménager le ciel de cette station, nous devions réfléchir à un seuil d'acceptation du bruit solidien », énonce Walid Wasmine, chef de projets acoustique et vibrations, également membre de la direction des projets urbains de Systra France. Point particulier, aucune réglementation n'encadre ce sujet. C'est donc la cellule acoustique interne de la RATP qui a établi le plafond à ne pas dépasser à 30 dB(A). Les prescripteurs ont également utilisé les normes sur le confort acoustique pour les bâtiments à usage d'habitation.
Modéliser les vibrations
« Ces seuils admis, nous devions être certains qu'ils seraient respectés dans des conditions d’exploitation normale », se remémore le chef de projet. Le bâtiment de logement à peine esquissé et la conception de la gare tout juste au stade de l’avant-projet primaire, les ingénieurs ont d’ores et déjà dû travailler sur un logiciel aux éléments finis pour modéliser la transmission des vibrations depuis les fondations jusuq'à la structure béton de l’ouvrage. Ils y ont ajouté des hypothèses sur les sources vibratoires liées à l’exploitation de la station : le passage du métro toutes les 2,5 minutes dans les deux sens, mais aussi les équipements de ventilation, les machineries des ascenseurs, le passage des trains de travaux la nuit…
Calculer la perte d’insertion
Une fois la modélisation réalisée, elle a été testée de deux façons différentes afin de calculer la différence entre les niveaux de puissance acoustique transmis avec et sans équipement d’insonorisation. Dans un premier temps, la future construction a donc été éprouvée sans systèmes antivibratiles et comparée aux seuils précédemment définis. « Le modèle a ainsi mis en avant un risque de dépassement des seuils de bruits solidiens », explique Walid Wasmine.

Des plots élastomères couplés à une dalle de répartition
Après plusieurs simulations (effet de masse, tapis et bandes antivibratiles, boîte à ressort…), ce sont finalement des plots élastomères antivibratiles supportant une dalle de répartition qui ont été choisis. « Cette coupure antivibratoire va littéralement couper la structure en deux tandis que l’élément souple inséré à ce niveau va atténuer les vibrations et donc éviter les transmissions de l’infrastructure à la superstructure », détaille l’acousticien.
Vérifier le niveau de vibration
Avant toute mise en œuvre, l’entreprise CDM Stravitec a mené des essais de qualification. « La souplesse de ces éléments dépend de la fréquence d'excitation et de la charge qu’ils portent. Nous devions donc être sûr de caractériser sa raideur dans la bonne plage de fréquence et avec la juste descente de charge », poursuit Walid Wasmine. Ensuite, le dispositif devait être soumis à un essai qui consiste à évaluer la différence du niveau de vibration en-deçà et au-dessus du système antivibratile. Un capteur a donc été installé en amont de la coupure, un autre en aval, et les résultats ont été extrapolés par modélisation pour vérifier les ordres de grandeur.

Mise en œuvre complexe
La mise en œuvre a elle aussi eu son lot de complexité, puisqu’« il fallait assurer une fréquence unique pour chacun des plots, alors même que les descentes de charge du bâtiment sont variables selon les endroits », expose le chef de projets. Pour cela, trois références de plots différentes ont été installées, leurs dimensions variant de 87 à 132 mm de circonférence pour respectivement 60 à 150 mm de hauteur. Il pouvait ainsi y avoir jusque dix plots à la tête d’un même poteau.
Autre point d’attention, lors du coulage de la dalle de répartition alvéolée de 80 cm d’épaisseur par Sogea Île-de-France (Vinci Construction), le coffrage ne devait pas s’écraser d’un côté ou s’incliner de l’autre, ce qui imposait une déflexion minimale. Enfin, les recommandations ont été transmises aux corps d’état chargés du second œuvre, afin qu'ils soient vigilants sur tous les éléments qui traversent la dalle de répartition qui sont également solidaires de l’infrastructure (comme les descentes d’eau, les escaliers et ascenseurs ou la façade…) et peuvent créer "courts circuits" vibratoires. Une fois l’ouvrage terminé, il ne restait alors plus qu’à s’équiper de sonomètres et autres capteurs pour vérifier que les 30 dB(A) ainsi que les seuils des autres normes utilisées n'étaient pas dépassés.