Décret tertiaire : le Conseil d'Etat suspend le dispositif dans son ensemble

Le juge des référés du Conseil d’Etat a suspendu intégralement le décret tertiaire qui oblige les propriétaires de bâtiments à réduire de 25% la consommation énergétique des édifices tertiaires. Le texte est donc inapplicable, en attendant que la Haute juridiction se prononce définitivement sur sa légalité.

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Le décret tertiaire est inaplicable, selon le Conseil d'Etat.

En deux rounds, le conseil du Commerce de France, l’association Perifem et l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie ont mis les représentants du ministère de la Transition écologique K-O puisque le décret tertiaire a été suspendu dans son ensemble par le juge des référés du Conseil d’Etat le 11 juillet au soir. Rappelons que ces organisations professionnelles avaient déposé un recours fin juin contre ce décret relatif aux obligations d’amélioration de la performance énergétique dans les bâtiments tertiaires existants. Elles avaient obtenu la suspension d'une partie du décret le 28 juin, celle qui impose la réalisation avant le 1er juillet 2017 de rapports d’études énergétiques et de plans d’action

Dans son ordonnance du 11 juillet, le juge des référés décide de suspendre le texte car les deux conditions tenant au succès d'un référé suspension sont réunies : le doute sérieux sur la lélgalité de l'acte et l'urgence. D’abord, il estime que les délais octroyés aux obligés pour respecter leurs obligations sont trop courts, créant ainsi un doute sérieux sur la légalité du décret attaqué. Ce texte ne pouvait poser une obligation de réduction de 25% de la consommation énergétique des bâtiments d’ici 2020, dès lors que la loi impose un délai de cinq ans entre la publication du décret d’application de cet article (publié le 10 mai dernier) et la date à laquelle les obligations de performance énergétique doivent être respectées (2020 donc), indique le Conseil d'Etat. Selon les requérents, le délai excessivement contraint laissé pour atteindre l'objectif des -25% portait atteinte au principe de sécurité juridique.

Manque d’informations et atteintes des intérêts économiques

Puis, le juge de l'urgence estime que les propriétaires de bâtiments à rénover manquent d’informations. Le décret prévoit en effet que les obligés réduisent de 25% la consommation énergétique des immeubles par rapport à l’année de référence (en général, la dernière consommation énergétique totale connue selon le décret) ou bien, qu’ils engagent des travaux pour atteindre un seuil alternatif exprimé en Kwh/m²/an. Ce seuil doit être précisé par un arrêté… qui n'est toujours pas publié. Le Conseil d'Etat dresse ce constat : « Les personnes assujetties aux nouvelles obligations prévues par ce texte devraient d’ores et déjà, pour espérer atteindre l’objectif de diminution de 25% de leur consommation énergétique d’ici 2020, engager des études et des travaux, sans connaître le seuil alternatif exprimé en kWh/m²/an prévu par l’article R. 131-39 du Code de la construction et de l’habitation et sans connaître la teneur des exigences que devront respecter ces études préalables ».

Selon la Haute juridiction, il y a bien urgence à suspendre le décret car la nécessité pour notamment 9 700 hôtels et 8 000 établissements de commerce d'engager dès maintenant des études et des travaux, "dans d’évidentes conditions d’incertitude juridique (...), doit être regardée (...), comme portant une atteinte grave et immédiate à leurs intérêts économiques". Et d'ajouter : « Cette atteinte est d’autant plus caractérisée que les personnes assujetties se trouvent, au surplus, exposées, dans l’hypothèse où elles envisageraient de vendre des bâtiments, au risque d’une diminution de leur valeur vénale, compte tenu du report des obligations sur l’acquéreur ».

Le texte est par conséquent inapplicable jusqu’à ce que le Conseil d’État se prononce définitivement sur sa légalité. Ce dernier est, en effet, saisi d'une demande au fond, tendant à l’annulation du décret. Le délai moyen d'instruction pour ce type de dossier est d'une année. Les trois organisations professionnelles ont donc rendez-vous avec les représentants du ministère de la Transition écologique pour un troisième round.

Ordonnance de référé du Conseil d'Etat, 11 juillet 2017, n° 411578

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