De l’ingénierie de la biodiversité à sa gestion, le groupe Biotope franchit le pas

Créés par la loi sur l’industrie verte de 2023, les sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation (SNCRR) ont trouvé leur défricheur privé. Cet outil fait partie de l’arsenal déployé par le bureau d'étude en environnement pour protéger la nature.

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Abbaye de Valmagne
Sur les 350 ha de l'abbaye de Valmagne (Hérault), Biotope gère pour 30 ans la première déclinaison privée des sites naturels de compensation, restauration et renaturation.

Et de deux ! Première entreprise privée à s’engager dans la gestion de sites naturels de compensation, restauration et renaturation (SNCRR), le groupe Biotope travaille sur un second protocole d’accord dans ce sens. Après les 241 hectares du domaine de l’abbaye cistercienne de Valmagne dans l’Hérault, le nouvel espace en voie de renaturation avoisine les 1000 ha, en Seine-et-Marne.

Doublé cistercien

« Le propriétaire de l’abbaye cistercienne s’est décidé à engager des études préliminaires après avoir visité Valmagne », témoigne Frédéric Melki, P-DG de Biotope, leader européen de l’ingénierie de la biodiversité. « Mais notre activité de gestion d’espaces naturels ne se cantonnera pas aux domaines cisterciens », tient à préciser le fondateur du groupe basé à Mèze (Hérault), fort d’un bilan consolidé de 102 M€ pour 1085 salariés, résultat d’une croissance annuelle de plus de 20 % au cours des cinq dernières années.

Simultanément, Biotope progresse dans la mécanique financière et juridique des crédits biodiversité : avant la fin avril, la société « Site naturel de l’abbaye de Valmagne », détenue à parité par le groupe d’ingénierie et le propriétaire du domaine, signera ses premières ventes, soit une centaine d’unités de compensation. Chacune d’elles vaut 45 000 €, correspondant à environ 1 ha à renaturer sur 30 ans. « La surface précise diminue avec l’importance des travaux de renaturation à mettre en œuvre », explique Frédéric Melki. 

Gestion multifonctionnelle

Ravagé voici une quinzaine d’années par un incendie, le domaine souffre d’une surexposition à de nouveaux feux. La colonisation par des pins d’Alep en rang serré, tous du même âge, entretient ce risque. Cette menace s’ajoute à l’étouffement des sols qui restreint la diversité biologique et végétale. La gestion de milieux ouverts créera les effets inverses et y ajoutera un potentiel de transformation et de vente de produits locaux. « Il s’agit d’un véritable projet de développement local », résume Frédéric Melki.

Les SNCRR offrent à Biotope son premier point d'appui vers une diversification dans la renaturation et la gestion d’espaces naturels, à partir de ses positions dans l’ingénierie de la biodiversité. Mais à côté du financement par le remboursement des dettes écologiques, l’entreprise identifie un second outil : les apports volontaires d’entreprises désireuses de prouver leur engagement sociétal et environnemental.

Foyer colombien

L’acquisition récente de la start-up Nat5 Nature positive vise à accélérer l’occupation de ce second créneau. Cette nouvelle filiale s’est spécialisée dans la mise en relation entre propriétaires fonciers et financeurs. En aval, deux autres sociétés renforcent les compétences de gestion : Biotope a pris une première participation de 25 % dans le capital d’Ases France, filiale d’une société mexicaine experte dans ce domaine ; le groupe français a récemment repris Ceresflore, producteur vauclusien de végétaux sauvages issus de graines et boutures récoltées dans la nature et aux origines tracées.

Plusieurs sites en cours d’agrément vont lancer la machine en Ardèche, en Espagne, au Portugal et au Mexique. Cette effervescence prolonge une première expérience en cours en Colombie. Après la création de la filiale de Biotope dans ce pays en 2023, la gestion d’une zone humide du bassin de l’Orénoque lui a offert l’une de ses premières vitrines latino-américaines.

Frein administratif

La découverte d’un modèle adapté à la création de réserves naturelles détenues par la société civile a forgé la conviction de Frédéric Melki : « Seuls des outils de ce type permettraient d’inverser la courbe de l’érosion de la biodiversité ». Comme dans les SNCRR, la dissociation entre la charge foncière et la gestion libère les moyens pour se concentrer sur ce dernier poste.

La reconnaissance publique constitue le principal frein identifié par le P-DG de Biotope : « Entre les notions de « contribution volontaire », « unités de compensation » et « crédits biodiversité », on perd beaucoup de temps dans de longues discussions sémantiques contreproductives. L’Etat veut tout contrôler, au préjudice de la biodiversité », soupire-t-il. Selon lui, la puissance publique devrait se cantonner dans la mise en place de garde-fous qui évitent aux crédits biodiversité de tomber dans les ornières de l’escroquerie qui ont porté atteinte aux crédits carbone.

Demande interne

En phase de recrutement de plus de 100 nouveaux collaborateurs, Biotope identifie une seconde vertu à sa diversification : « En interne, j’enregistre une forte demande sociale pour changer d’échelle. Notre personnel passionné veut œuvrer concrètement à la protection de la nature », se réjouit le P-DG.

Pour accélérer la transition entre études et mise en œuvre et pour doter cette seconde activité des moyens nécessaires à son développement, le groupe a décidé d’en regrouper les composantes sous la bannière d’une filiale à part entière. Une nouvelle aventure commence.

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