Suite à ses difficultés financières, WeWork a annoncé la vente d’actifs non stratégiques et des suppressions d'emplois. Quelles vont être les conséquences pour l’entreprise en France ?
Il est probable que cela provoque un coup de frein sur les projets d’ouverture. En revanche, un désengagement sur les chantiers en cours paraît difficile en raison des pénalités juridiques que cela pourrait entraîner. A l’occasion de notre étude sur le coworking (1) nous avons identifié sept centres WeWork existants et 10 ouvertures prévues en 2020 et 2021. Ces 17 espaces, tous situés à Paris ou à La Défense, représentent 150 000 m², ce qui est de loin la surface la plus importante du marché hexagonal. En comparaison, Spaces revendique entre 50 et 60 000 m² et Wojo annonce 70 000 m² à l’horizon 2021.
La crise de WeWork va-t-elle plomber les acteurs français du coworking ou au contraire redynamiser le marché ?
Dans une première analyse, on peut penser que les déboires de WeWork ne sont pas de très bon augure pour l’image du coworking. Les investisseurs pourraient se méfier et limiter la part de coworking dans leur portefeuille de locataires afin de limiter leur exposition à la fragilité du modèle du bureau flexible. Toutefois, le marché français ne se limite pas à WeWork. Il repose sur des fondamentaux plutôt positifs, avec des acteurs qui ont un développement mesuré et prudent et une assise financière solide. Les trois leaders français sont soutenus par de grands groupes immobiliers. Wojo (ex-Nextdoor) est détenu à parts égales par Bouygues Immobilier et Accor Hôtels ; Spaces appartient au groupe suisse IWG (International Workplace Group). Enfin, Morning Coworking est l’enseigne du groupe Bureau à Partager (BAP), dans lequel Nexity a pris une participation de 54%.
Ces entreprises sont-elles rentables ?
Le coworking est une activité de services destinée à gagner de l’argent. IWG a un taux d’Ebitda de 15 % au niveau mondial ; Now coworking annonce un résultat avant impôt de 15 % ; Wojo envisage la rentabilité de ses centres d’ici fin 2019. Toutefois, il est vrai que le business model du coworking est fragile par essence. Les risques du modèle, soit la prise en étau entre les baux longs signés avec les propriétaires d'immeubles de bureaux et des contrats flexibles des occupants, sont bien identifiés. Tout en veillant à conserver la promesse du coworking qui consiste à créer de l’inattendu, des rencontres, un environnement de travail stimulant, les acteurs essaient de compenser ces incertitudes en attirant des grandes entreprises capables de s’engager sur plusieurs mois. Cette approche est fondamentale car cela offre aux spécialistes de la location de bureau clé-en-mains de la visibilité et des revenus récurrents.
Le coworking est-il arrivé à maturité en France ?
En France, on estime que les surfaces exploitées par les 12 opérateurs principaux vont passer à 400 000 m² en 2020, contre 270 000 m² en 2019. De nouvelles offres sont en cours de déploiement à Paris : Deskopolitan, TheBureau, Welkin and Meraki,Qwerk, , Startway. Par ailleurs, il y a encore des réservoirs de croissance, notamment dans les grandes villes de province, comme Bordeaux, Toulouse, Nice et Marseille, peu pourvues en espaces de coworking. Néanmoins, même si le pic n’a pas encore été atteint, la phase de très forte croissance de ces deux dernières années est sûrement déjà terminée. Une éventuelle reconfiguration du marché autour d’acquisitions est à prévoir d’ici à 2022.
(1) « Le marché du coworking et des centres d’affaires à l’horizon 2022- Stratégies de développement, performances financières et perspectives de croissance des acteurs ? », XERFI-PRECEPTA, octobre 2019.
