Si le secteur du BTP est durement touché dans son ensemble par l’épidémie de coronavirus, de nombreuses PME pourraient ne pas y survivre. C’est la conclusion d’une étude publiée le 19 juin par l’assureur-crédit français Euler Hermes dans laquelle il affirme : « en raison de la baisse de la rentabilité et du recours à la sous-traitance, nous pensons que la plupart des victimes seront les plus petites entreprises ».
Bien que les PME génèrent 80% du chiffre d’affaires du secteur de la construction en Europe, elles verront leurs revenus reculer de 25%. En conséquence, les défaillances d’entreprises du BTP en Europe pourraient croître de 15 à 24%. Dans le détail, elles augmenteraient de 24% en Espagne, de 19% en France et aux Pays-Bas, et de 15% en Italie et au Royaume-Uni.
Des surcôuts liés aux mesures sanitaires
Euler Hermes ajoute que « la sortie de crise sera également plus compliquée pour les petites entreprises que pour les grandes », notamment en raison des surcoûts liés aux mesures sanitaires. « Le coût supplémentaire des équipements de protection individuelle pourrait représenter à lui seul près de 50 % de l’Ebitda (le bénéfice avant intérêt, impôts, dépréciation et amortissement) des petites et moyennes entreprises », prévoit l’assureur.

Autre difficulté : alors que de nombreuses PME interviennent dans le cadre de contrats de sous-traitances sur les chantiers, « les grandes entreprises pourraient réduire le nombre de sous-traitants et exercer une pression importante sur les prix des appels d'offres », explique l’étude.
Des opportunités dans l'immobilier et les infrastructures
Dans ce contexte tendu, Euler Hermes estime que les plus petites entreprises devront chercher des opportunités du côté de l’immobilier et des infrastructures. Le recours accru au télétravail pourrait entraîner une demande de superficie plus grande pour des logements situés en périphérie. Les PME pourraient bénéficier de cette activité en dehors des centres-villes.
Quant aux infrastructures elles seront, selon l’étude, le principal bénéficiaire des programmes de relance, en particulier les projets liés à la santé et à l’énergie. « Les PME pourraient recevoir du travail en sous-traitance mais n'obtiendront pas la même rentabilité », prédit Euler Hermes.
Les plans de soutien européen « ne protégeront pas totalement les PME du secteur de la construction »
En Europe, les différentes politiques de soutien pourraient aussi aider les PME à retrouver de l'activité. Ainsi, en Allemagne elles bénéficieront des différents programmes de rénovation énergétique et des 5,9 Mds€ accordés aux Lander pour les dépenses d'investissement. Le plafonnement des cotisations de sécurité sociale à 40 % aura également un impact positif sur ces entreprises.
En Italie, l’abattement fiscal pour les rénovations énergétiques et le renforcement de la protection sismique constituent une forte incitation à entamer des travaux. « Cette mesure devrait profiter au secteur résidentiel et au PME », affirme Euler Hermes.
En France, les entreprises ont accès aux prêts garantis par l’Etat mais cela pourrait « augmenter la pression financière au cours des années suivantes en raison d'un endettement plus important », prévient l’assureur. Le fonds de solidarité, qui compense les pertes de revenus des très petites entreprises, « est un point positif » mais Euler Hermes avertit : « il ne changera pas la situation générale, compte tenu des critères d'éligibilité et des plafonds ». Il en va de même, selon lui, pour le report des paiements de la sécurité sociale et des impôts.
Le Royaume-Uni a annoncé un programme de garantie de prêts de 330 milliards de livres sterling dans son dernier budget en mars. Il est cependant destiné aux petites et aux grandes entreprises et certaines pourraient en être privées.
Enfin, en Espagne les petites sociétés ne pourront pas profiter du programme de prêts gouvernementaux qui est réservé aux moyennes et grandes entreprises. L'étude note aussi que l’activité d'appel d'offres du gouvernement a diminué de 50 % dès le deuxième trimestre 2020.
Ces différents plans de soutien européens, « peuvent apporter une aide », selon Euler Hermes « mais ils ne protégeront pas totalement les PME du secteur de la construction ».