Comment construirons-nous dans 30 ans : les scénarios de l'Ademe et du CSTB

L'Ademe et le CSTB viennent de se livrer à un exercice de prospective spécifique au secteur du bâtiment. L'enjeu est d'atteindre la neutralité carbone en 2050, sans délaisser une partie du parc immobilier au passage.  

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Des "Pénuries" aux "Rééquilibrages", quatre scénarios sont prêts pour la construction jusqu'en 2050.

« Imaginons ensemble les bâtiments de demain », tel était le titre du webinaire organisé par l'Ademe et le CSTB pour projeter les entreprises et donneurs d'ordre dans les méthodes et les enjeux pour le secteur des les trente prochaines années.

Mardi 25 janvier, Arnaud Leroy, président de l'agence de la transition écologique présentait la démarche prospective pour « imaginer l’après carbone » menée avec le CSTB et une kyrielle d’acteurs du secteur. Fin novembre déjà, l’Ademe a dévoilé quatre scénarios prospectifs regroupés sous le titre « Transition(s) 2050 – Choisir maintenant – agir pour le climat » issus de deux ans de travaux. Les voici cette fois déclinés par et pour les acteurs de la construction et de l'immobilier. 

Définir les facteurs d'influence

Un comité de prospective de 17 parties prenantes, appuyé par autant de partenaires a d’abord défini 22 facteurs-clés liés au contexte (démographie, numérique, risques systémiques), à la demande (occupation des logements et du non résidentiel, financement des projets), à l’offre (gestion de l’obsolescence, qualité d’usage, prix du foncier) et aux politiques (environnement, urbanisme, technique, logement). Puis, ils ont choisi des variables et échafaudé avec des étudiants de l’Ecole des Ponts ParisTech et en architecture de l’université de Strasbourg, quatre scénarios pour anticiper les évolutions de l’offre et de la demande.

"Pénuries" : mal logement et bidonvilles

Le premier scénario s’intitule « Pénuries », c’est « le scénario du pire » explique Albane Gaspard, du service bâtiment de l’Ademe. L’activité du bâtiment et immobilier tourne au ralenti en raison de la pénurie d’une ou plusieurs ressources clés. Sur le territoire, les réponses sont dispersées, creusant les inégalités. Les plus riches développent de l’innovation frugale, tandis que les ménages en difficultés économiques ont des marges de manœuvre très limitées aussi bien pour l’achat que la rénovation. Le mal-logement se développe, les bidonvilles réapparaissent.

"Difficile de tout faire" : accroissement des inégalités

Le second scénario baptisé « Difficile de tout faire » part du postulat que les ressources pour agir seront disponibles, mais les acteurs s’adaptent lentement aux trois grandes transitions (démographique, environnementale et numérique), ce qui aboutit à la création d’un parc à plusieurs vitesses. L’absence d’investissement de grande ampleur dans le neuf et la rénovation empêche de pallier aux faibles capacités financières des ménages et des entreprises. Les inégalités s’accroissent avec d’un côté, des bâtiments respectant bien le BBC, tandis qu’une autre partie du parc résidentiel tombe en déshérence.

"Rééquilibrages" : les métiers du bâtiment deviennent attractifs

Le troisième récit imagine que les acteurs évoluent fortement pour permettre des « Rééquilibrage(s) ». Après une succession de crises, le changement climatique et la protection de la biodiversité sont devenus grande cause nationale. La lutte contre l’artificialisation des sols oblige à passer d’une politique de quantité à une politique de qualité. Les habitants délaissent les appartements exigus des centres-villes, par conséquent la valeur des logements baisse en zone métropolitaine – une partie du parc est détruite pour mieux répondre aux demandes de nature en ville. La rénovation du parc rapide et ambitieuse s’appuie sur l’essor du réemploi et de l'économie circulaire. Les constructions neuves sont réalisées au compte-gouttes après concertation au niveau local. Les métiers du bâtiment prennent tout leur sens, deviennent attractifs et sont fortement revalorisés.

"Le bâtiment comme un service" : des politiques publiques ambitieuses

Le dernier scénario conçoit « le bâtiment comme un service » et s’appuie fortement sur le numérique pour maximiser les usages. Les métropoles continuent à être le cœur économique des territoires. Des politiques publiques ambitieuses encouragent la transition écologique avec des investissements majeurs. Il ne s’agit plus de soutenir une frange de propriétaires, mais plutôt de grands opérateurs institutionnels qui rendent les bâtiments multifonctionnels. Ceux-ci ont recours à des solutions industrielles pour la rénovation pour atteindre la performance environnementale. Hors des métropoles, les dynamiques sont plus contrastées.

La condition de la réussite sera politique

« L’avenir sera sûrement un mélange de ces 4 scénarios, selon la manière dont nous nous en emparerons » précise Étienne Crépon, président du CSTB, qui invite chacun à bâtir son propre scénario puis à en discuter collectivement, car « les solutions seront communes, si les acteurs parviennent à fonctionner autrement qu’en silo ».

Une des conditions de la réussite sera politique. Pour Franck Hovorka, directeur technique et innovation de la FPI, « il faudrait pouvoir rentrer dans un dialogue avec les élus locaux pour assouplir les réglementations et se donner les moyens de travailler des compromis ».

Le CSTB sera à la tête d’une petite équipe pour animer la suite de ces travaux de prospective, et continuera à fabriquer des outils d’aide à la décision pour les acteurs qui veulent aller plus loin dans leur secteur.

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