Comment adapter l'habitat à une France vieillissante ?

La France vieillit. Comment l'habitat peut-il répondre à cette évolution ? Le rapport intitulé « l'adaptation de l'habitat au défi de l'évolution démographique », propose une série de mesures pour améliorer l'habitat des seniors afin qu'ils conservent le plus longtemps possible leur indépendance.

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Présidente du groupe de travail "évolutions démographiques et vieillissement" du Cecodhas (fédération européenne du logement social), Muriel Boulmier introduit son rapport comme suit : "Une véritable révolution silencieuse se dessine: la fin des trois âges de la vie."

"Les 20 ou 30 ans de la vie après le départ en retraite sont progressivement différenciés : 60-75 ans, seniors actifs, 75-85 ans, l'âge des « poly-mini-handicaps » mais en situation d'autonomie, et les plus de 85 ans, qui peuvent être confrontés à la dépendance. La vieillesse ne correspond plus à un public homogène, la progressivité du vieillissement s'observe, y compris dans la manière d'habiter"

Rappelant, dans le rapport qu'elle vient de remettre au secrétaire d'Etat au Logement, Benoist Apparu, que 74% des retraités sont propriétaires (contre 58% des français), que jusqu'à 85 ans, 9 personnes sur 10 vivent encore à domicile et que seulement un quart des plus de 85 ans vivent en institution, elle énumère 32 propositions, centrées sur l'habitat existant et au coeur des villes, pour améliorer l'habitat des personnes âgées.

Intervenir à tous les niveaux

Muriel Boulmier reprend la formule de Philippe Pelletier « réinventer les concierges », et juge qu'il faut les transformer en référents de proximité qui, par leur contact quotidien, permettent veille et alerte.

A l'échelle du territoire, elle souhaite réactiver les "", développés au début des années 1990 à l'initiative des bailleurs sociaux, et parle d'intégrer les évolutions démographiques du vieillissement aux documents d'urbanisme. Elle insiste sur l'importance du PADD (Plan d'Aménagement Développement Durable). "Le PLU se doit d'être compatible avec le PADD. Document d'orientation politique pour un territoire donné, il expose le projet d'urbanisme du PLU. En ce sens, le PADD peut prévoir des orientations nécessaires à l'intégration de l'évolution du vieillissement, tant pour les espaces publics, les déplacements que pour l'habitat."

Au niveau européen, elle suggère la création d'un indice européen de performance habitat dans l'accompagnement du vieillissement (accessibilité, proximité, risque...), indicateur des politiques européennes selon une démarche qui s'inspirerait de l'indice de développement humain de l'O.M.S.

Développer l'habitat intergénérationnel

Le rapport s'intéresse à la nécessité de fédérer « l'intérêt mutuel de deux générations, les jeunes et les personnes âgées qui partagent, souvent pour des raisons différentes, la même difficulté de revenus et la même difficulté pour se loger. » Pour cela, Muriel Boulmier évoque deux solutions intéressantes.

Elle propose de développer l'habitat partagé intergénérationnel en sécurisant les règles juridiques et fiscales, pour les « accueillants », autrement dit les personnes âgées hébergeant des jeunes. Formule d'hébergement originale, consistant à mettre en relation des jeunes, très souvent étudiants, avec des personnes âgées seules disposant d'une chambre libre à leur domicile, en contrepartie de menus services (présence le soir, faire quelques courses, quelques travaux ménagers, partage de repas). Certaines structures ajoutent pour l'hébergeur la possibilité de percevoir en plus un loyer dit "modéré".

D'autre part, elle propose de s'inspirer de l'expérience espagnole d'Alicante où dans des immeubles de logements, les jeunes signent un contrat dans le but d' un loyer réduit contre des services pour les seniors de l'immeuble et du quartier.

Améliorer la qualité des travaux

Afin d'améliorer la qualité des interventions, le rapport propose de :

- soutenir la généralisation du label-qualité professionnel HANDIBAT ;

- développer les démarches de labellisation de l'accessibilité des logements sociaux pour les personnes âgées ;

- renforcer la formation des collaborateurs des entreprises qui effectuent des travaux en milieu occupé.

Financer les travaux autrement

Le rapporteur souligne que « la symétrie entre l'allongement de la durée de la vie et l'augmentation des ressources est rompue ». Elle prend pour preuve le rapport de la Fondation Abbé Pierre qui considère que 600.000 personnes âgées vivent aujourd'hui en dessous du seuil européen de pauvreté.

Consciente de l'importance du manque de ressources, Muriel Boulmier évoque de nombreuses pistes pour financer les travaux d'adaptation pour les personnes âgées à revenus modestes :

- adapter l'accès au micro crédit aux besoins de financement du coût résiduel des travaux ;

- généraliser le CESU préfinancé par l'APA ;

- assouplir et sécuriser le prêt viager hypothécaire ;

- mettre à l'étude une disposition législative permettant aux bailleurs sociaux et syndics de copropriété de proposer des services de bricolage pour un montant forfaitaire mensuel d'un maximum de 5 euros.

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