Laure Bédier, directrice des affaires juridiques (DAJ) de Bercy, avait reçu carte blanche de la part de l’Association des acheteurs publics pour introduire sa journée annuelle de conférence le 22 novembre à Paris. Cela tombe bien, car les sujets d’actualité de la commande publique ne manquent pas.
Mais, avant de présenter les futurs chantiers qui vont occuper sa direction, la représentante de la DAJ a pris soin de rappeler le bilan positif du passage au tout démat’ le 1er octobre 2018. « Il y a eu quelques difficultés ponctuelles pour les entreprises dans les zones blanches, mais globalement cela s’est bien passé, le nombre d’offres par marché a notamment augmenté ». Un bémol néanmoins sur la publication des données essentielles des contrats. « Elles ne sont pas très accessibles, mais nous y travaillons avec la Direction générale des finances publiques et Etalab, car c’est un axe fort de la dématérialisation qui permet d’améliorer le sourcing et l’efficacité de l’achat. »
Seuil à 40 000 euros
Laure Bédier s’est ensuite attardé sur le sujet phare de ces prochaines semaines, à savoir un décret qui entrera en vigueur le 1er janvier 2020. Ce texte va relever le plafond de dispense de formalités de publicité et de mise en concurrence à 40 000 euros (contre 25 000 euros actuellement). « Sa publication est imminente, le Conseil d’Etat ayant déjà planché dessus », annonce la DAJ. Cette dernière met ensuite l’accent sur les obligations de transparence qui découleront de la hausse du seuil. Les acheteurs publics auront deux possibilités pour faire connaitre leurs marchés dont le montant est compris entre 25 000 euros et 40 000 euros : soit une publication classique des données essentielles sur les profils d’acheteur, soit une publication annuelle de la liste des petits marchés avec un nombre réduit de données (nom du bénéficiaire, montant, objet...). « Cette obligation de transparence nous paraît essentielle pour permettre aux entreprises d’avoir la connaissance des marchés, et le cas échéant proposer leurs offres de service aux acheteurs ». A noter qu’une fiche DAJ est en préparation sur ce nouveau seuil.
Relèvement des avances
Ce même décret va par ailleurs relever le montant minimum des avances obligatoires pour les établissements publics de l’Etat et pour les collectivités ayant un budget de fonctionnement supérieur à 60 millions d’euros. Pour mémoire, le « décret de Noël » a réévalué le montant des avances aux PME pour les marchés de l’Etat. « L’idée est de faire la même chose, toujours pour les marchés passés avec les PME, mais avec un taux fixé à 10%, sachant qu’il y a un certain nombre de collectivités territoriales qui pratiquent déjà ce genre d’avance ». Le cadre juridique, lui, ne sera pas modifié : cela concernera uniquement les marchés d’un montant supérieur à 50 000 euros, et dont la durée d’exécution est supérieure à deux mois. A noter que les établissements de santé ont été exclus du dispositif.
Formulaire e-form
Laure Bédier est ensuite revenue sur le règlement européen e-form établissant les formulaires types pour la publication d’avis dans le cadre de la passation de marchés publics publié au « JOUE » du 25 octobre. « Nous avons beaucoup participé aux travaux d’élaboration de ce texte, afin de limiter au maximum le nombre de données obligatoires devant figurer dans ces avis ». Côté pratique, ce règlement n’entrera en vigueur qu’en novembre 2022, avec une période transitoire jusqu’en 2023. « Dès à présent, toujours au niveau européen, nous allons travailler sur un schéma technique qui permettra de structurer les données », détaille la DAJ. « Et en parallèle, nous élaborerons un cadre national afin de déterminer les données qui seront optionnelles et celles qui seront obligatoires. Il y aura une discussion avec les parties prenantes, et il faudra là aussi adopter un schéma technique national en lien avec celui européen. »
Fond de transformation de l’action publique
Autre actualité récente : le Plan de transformation numérique de la commande publique, adopté en 2017, a été lauréat du Fond de transformation de l’action publique il y a quelques semaines. La directrice a expliqué à quoi allaient servir les fonds reçus (9,2 millions d’euros): « Notre idée est de poursuivre la dématérialisation de bout en bout de la chaîne en s’appuyant sur quelques plateformes qui développeront des briques en open source. Cela permettra à d’autres acheteurs de s’approprier ces briques, pour avoir une masse critique suffisante, et qu’in fine elles deviennent la norme ».
Étude sur la sous-traitance et textes en préparation
Parmi les derniers points abordés lors de cette journée, outre la réforme des CCAG dont l’issue est toujours annoncée pour le printemps prochain : l’étude sur la sous-traitance que mène actuellement l’Observatoire économique de la commande publique. Laure Bédier annonce que près de 1000 réponses ont été reçues par Bercy et que la publication des résultats est prévue avant avril 2020. « Le cas échéant, nous rédigerons sur cette base un guide de bonnes pratiques ».
Côté réglementation, deux arrêtés sont dans les tuyaux. Initialement prévus pour la fin 2019, ils sortiront au début de l’année prochaine : un premier sur les avis de publicité nationale (qui concernera les marchés d’un montant supérieur à 90 000 euros), et un sur les certificats de cessibilité.
Un projet de décret sur l’achat de produits biosourcés est également en préparation, en application de l'article 144 de la loi Transition énergétique du 17 août 2015. Lequel prévoit que « la commande publique tient compte notamment de la performance environnementale des produits, en particulier de leur caractère biosourcé ». Laure Bédier souligne cependant que cette disposition législative était d’application immédiate, sans qu’il soit nécessaire d’attendre son décret…