Après l’annonce du Premier ministre, Dominique de Villepin, de privatiser les sociétés d’autoroutes (ASF, APRR et Sanef) dans les huit à dix prochains mois, les majors du BTP ont rapidement fait part de leurs intentions. Fort logiquement, Vinci, par la voix de son président Antoine Zacharias, a indiqué vouloir poursuivre son rapprochement avec les ASF (Autoroutes du Sud de la France) dont le groupe détient déjà 23 %. Bouygues, via sa filiale Colas, s’est également placé dans la course, car il s’agit désormais de prendre le contrôle d’un concessionnaire et non plus une participation minoritaire. Bien entendu, Eiffage n’est pas en reste. On imagine difficilement Jean-François Roverato regarder ses concurrents se partager la manne autoroutière. Selon les analystes financiers, le scénario le plus probable verrait les rapprochements de Vinci et ASF, de Bouygues et Sanef (ou au minimum sa filiale SAPN) et de Eiffage et APRR. A moins qu’une société concessionnaire européenne ne vienne mettre son grain de sel.
Concurrence espagnole. Au sein des majors français, certains estiment possible que des groupes européens viennent faire monter les enchères. L’italien Autostrade, numéro un en Europe des concessions autoroutières, regarde plutôt vers l’Europe de l’Est. En Italie, c’est donc plutôt le numéro deux, Gavio, déjà présent au capital des ASF, qui serait sur les rangs. Mais l’intérêt de ce groupe est surtout de promouvoir son savoir-faire dans les systèmes de perception des péages. La concurrence pourrait surtout venir de l’Espagne, dont les groupes de BTP bénéficient d’un marché domestique très dynamique. Le concessionnaire Abertis est souvent cité, mais les FCC, ACS ou Acciona, disposent de suffisamment de trésorerie pour concurrencer les majors français.
Reste que si les groupes tricolores de BTP accueillent favorablement la privatisation des sociétés d’autoroutes, ils redoutent, comme l’indique la FNTP, un assèchement progressif des ressources de l’Afitf (Agence de financement des infrastructures de France).
Bien sûr, la volonté affichée du Premier ministre de faire redémarrer l’investissement public en relançant les grands chantiers d’infrastructures grâce, le cas échéant, à des modes de financement innovants, est bien accueillie par les professionnels. Mais l’Afitf a changé. De budget et de missions (voir « Le Moniteur » n°5302, p.19). Et la crainte des professionnels des travaux publics de voir l’exécution des queues de contrats de Plan Etat-régions confiées à l’agence s’est concrétisée. Cela entraînerait pour l’Afitf une dépense supplémentaire estimée à 450 millions par an, qui porterait ses charges annuelles à 1,35 milliard. Or, selon son président Gérard Longuet, « l’Afitf devrait être dotée de 1,2 milliard d’euros par an sur trois ans, avant de revenir à un régime de croisière autour de 900 millions ». Le compte n’y est pas tout à fait. Surtout, comme le déclarait récemment Jacques Oudin, président de l’association TDIE (Transport développement intermodalité environnement), « il ne faudrait pas que l’attribution à l’Agence de la taxe d’aménagement du territoire (TAT) soit remise en cause et que cette dernière soit reversée au budget général, comme ce fut le cas en 2001 » avec le FITTVN (Fonds d’investissement pour le transport terrestre et les voies navigables).