Alors que les travaux préparatoires de la première portion du canal Seine-Nord-Europe ont démarré à l’automne 2022, l’année 2023 verra le projet accélérer avec l’attribution en septembre du marché de la première écluse, celle de Montmacq (6,41 m de chute). L’ouvrage s’inscrit dans le secteur Compiègne-Passel (Oise), sur lequel les travaux de rescindement de la rivière ont commencé. Ce reméandrage permettra de construire l’avant-port de l’écluse et quatre ponts autorisant le passage de bateaux à grand gabarit.
Ecluses de grande chute
A partir de Passel, la nouvelle voie d’eau s'éloigne du canal du Nord, dont les 5,90 m de large et les 19 écluses ne sont pas adaptés à la circulation des « grands rhénans » et autres convois poussés, pour s’implanter un peu plus à l’ouest. Les deux dernières écluses, à Marquion-Bourlon et Oisy-le-Verger (Pas-de-Calais), afficheront une hauteur de chute de 25 m. « Nous avons choisi d’avoir un maître d’œuvre unique pour les écluses de grande chute afin d’obtenir des ouvrages standardisés », explique Benoît Deleu, directeur technique de la Société du canal Seine-Nord-Europe (SCSNE).
1 300 m de pont-canal
Mais le point d’orgue du chantier sera sans conteste le pont-canal de la Somme, une voie d’eau qui passera à 30 m au-dessus du fleuve et de la zone sensible des étangs de la vallée de la Somme, sur 1 300 m de long, 34 m de large et 4,50 de profondeur. « Il sera réalisé en conception-réalisation, souligne Benoît Deleu, la procédure de consultation, sous la forme d’un dialogue compétitif, est en cours. » Ses résultats seront connus au deuxième semestre 2024. Plus modestes, les deux autres ponts-canaux afficheront une trentaine de mètres pour franchir les autoroutes A26 et A29.
Une retenue de 14 Mm3
Le futur canal sera essentiellement alimenté en eau par l’Oise, depuis un bief situé entre l’Oise et l’Aisne, où la ressource est la plus importante. « Pour la préserver, nous avons choisi de rendre étanche le canal sur toute sa longueur afin de limiter les pertes par infiltration », explique Benoît Deleu. Soit 5 à 6 millions de mètres carrés à étancher. Si le débit de l’Oise devenait trop faible, le maître d’ouvrage a prévu un bassin-réservoir de 14 millions de m3, la retenue de Louette, à proximité d’Allaines (Somme), isolé par une digue de 42 m de haut.
Récupération d’eau
Les écluses intègrent plusieurs dispositifs d’économie d’eau, à commencer par des bassins d’épargne, des structures de béton étagé qui récupèrent une grande partie de l’eau lorsque le bief se vide et la restituent lorsqu’il est rempli. « Cela permet de recueillir 60 à 70 % de l’eau employée lors du passage du bateau », précise le directeur technique. Les 107 km du nouveau canal intègrent 62 franchissements routiers et ferroviaires. Le maître d’ouvrage a choisi des bow-strings à suspentes croisées pour les ouvrages à grande portée et des modèles bipoutres pour les autres. Tous laisseront au minimum 7 m pour le passage des bateaux.
Mesures environnementales
Le futur canal Seine-Nord-Europe affectera 300 hectares d’espaces naturels. Un impact qui serait compensé par la création de zones humides le long de la voie d’eau pour développer la végétation aquatique et servir d’abri à la faune ainsi que par des reboisements. Sur les corridors fréquentés par la grande faune, des plages de remontée seront aménagées pour permettre aux animaux qui traversent le canal à la nage d’en sortir et un franchissement est prévu dans le Pas-de-Calais.
Une année d’appels d’offres
En 2023, au-delà de l’attribution du marché de l’écluse de Montmacq, le maître d’ouvrage lancera de premiers appels d’offres de travaux. La SCSNE travaille notamment au dossier de consultation pour la construction du canal lui-même sur le secteur 1 dont le marché doit être attribué en juin 2024. Pour les trois autres secteurs, les études de projet sont en cours d’achèvement avec la perspective d’une approbation dans les six mois. Le dossier d’autorisation environnementale, déposé en mars 2022, devrait être approuvé en mars 2024 et le démarrage des grands travaux est prévu en 2025.