« C' est le monument qui commande. » Cette formule propre au bâti ancien, Thierry Brossard, directeur de projet chez Eiffage Construction, l'a fait sienne pour le chantier du Grand Hôtel-Dieu à Lyon (2). Un « chef d'œuvre qui a marqué toute l'histoire de la ville depuis le douzième siècle », relève Didier Repellin, architecte des monuments historiques. Pour l'occasion, une charte relative à ce bâtiment a été intégrée dans les contrats de sous-traitance. Elle contient un plan localisant les pièces les plus significatives et les consignes pour anticiper et préparer les interventions, et opérer de manière responsable. « Tout le monde s'est pris au jeu », constate le directeur de projet.
Hors norme, ce chantier, plus grande opération de rénovation privée d'un monument historique jamais réalisée en France, l'est par ses dimensions : 40 000 m² de bâtiments réhabilités, 11 500 m² de constructions neuves, 55 000 m² de façades, 15 000 m² de toitures restaurées. Et par le nombre d'entreprises mobilisées au cours des quarante-huit mois de travaux : 350. Un ballet logistique qu'il a fallu orchestrer dans un environnement contraint, en plein centre-ville. Un parking relais a été loué à Gerland pour le stationnement des véhicules utilitaires. Une plate-forme déportée, à 20 km de distance, a été mise à disposition par Eiffage pour les plus grosses livraisons acheminées par deux spécialistes de la logistique urbaine. Le tout programmé par la plate-forme connectée Logis tiQ de la fédération du BTP Rhône et Métropole.
Une organisation sans faille. De grands travaux préparatoires ont été nécessaires : désamiantage (comme prévu) mais aussi déplombage et curage (plus surprenant). De multiples couches de revêtements horizontaux et verticaux ont été mises au jour. Quelque 22 000 tonnes de déchets et de gravats ont été évacuées, « l'équivalent d'un millier de semi-remorques », note le directeur de projet. Pour faciliter le déroulement des travaux, le bâtiment a été découpé en six grandes zones de chantier par Thierry Brossard, épaulé par une équipe d'encadrement de 60 personnes.
Eiffage a fait appel à tous les corps de métier du groupe. Des contraintes acoustiques et thermiques ont pimenté l'aménagement de l'hôtel 5 étoiles, qui a ouvert ses portes en juin, dans et autour de la coupole dessinée par Soufflot au XVIIIe siècle. Une étude thermique a permis d'arriver à un compromis entre le confort des occupants et la préservation du monument. « On a beaucoup travaillé entre nous, notamment avec les maçons et avec l'entreprise d'échafaudage », observe Guillaume Clément, gérant de J. B. Massardier, qui a refait la couverture, les toitures, la charpente, le solivage. Avec beaucoup de préfabrication de lucarnes en atelier. « C'était un chantier intéressant aux plans technique et organisationnel », remarque le charpentier. Il a dû acheter pour l'occasion une voiture de sept places pour faciliter le déplacement et le stationnement de ses compagnons à proximité du Grand Hôtel-Dieu, dont il reste à livrer la Cité de la gastronomie enfin d'année.