Face aux difficultés croissantes des collectivités à s’assurer, compte tenu notamment des nouveaux risques liés aux aléas climatiques, aux violences urbaines ou encore aux cyber-attaques, Matignon a organisé mi-avril un Roquelaure de l’Assurabilité des territoires pour qu’aucune d’entre elles ne puisse plus « se trouver en situation involontaire de défaut d’assurance ». Cette initiative, s’appuyant sur divers avis ou rapports récents, a abouti à la signature, par le gouvernement, la fédération France Assureurs et les associations d’élus locaux, d’une Charte nationale d’engagements pour l’assurabilité des collectivités, déclinés dans un plan d’action.
75 % d'appels d'offres ouverts
Parmi les pistes d’amélioration, un recours accru à la procédure avec négociation pour la passation des marchés publics d’assurances des collectivités est fortement mis en avant. En effet, est-il rappelé dans le plan d’action, 75 % de ces marchés sont passés en appel d’offres ouvert. Le rapport d’Alain Chrétien et Jean-Yves Dagès sur l’assurabilité des biens des collectivités locales, publié en septembre 2024 , tout comme l’avis rendu par l’Autorité de la concurrence le 27 janvier 2025 sur le même sujet, estimaient le recours aux procédures négociées insuffisant, et appelaient à clarifier et sécuriser leur utilisation.
Un guide pratique remanié
Sans surprise, la charte et le plan issus du Roquelaure actent donc trois engagements en la matière. A l’Etat, la charge de mettre les règles au clair. Il publiera, d’ici fin juin, une version mise à jour du Guide pratique de passation des marchés publics d’assurances des collectivités locales dont l’édition actuelle date de 2008. Le travail d’actualisation est en cours avec les représentants des acteurs de l’assurance et des collectivités.
La nouvelle mouture « permettra aux collectivités de mieux cerner et exprimer leurs besoins en matière d’assurance et clarifier les possibilités offertes par le Code de la commande publique aux assureurs, aux courtiers et aux collectivités ». Interviewée fin mars par nos confrères de « La Semaine juridique Administrations et collectivités territoriales », Clémence Olsina, directrice des affaires juridiques de Bercy, a précisé qu’outre la place de la négociation dans les marchés d’assurances, d’autres axes de réflexion tels que « le développement du sourcing, les visites sur site et la mise au point » sont au menu de cette refonte « afin de renouer un dialogue serein entre acheteur local et assureur ».
Enfin, dans la charte, les associations d’élus locaux s’engagent, elles, à inciter davantage à recourir à la procédure négociée et à « l’allotissement pertinent ». Quand aux assureurs, ils devront « proposer, dans le cadre de procédures négociées, des offres assurancielles spécifiquement dédiées aux collectivités ».
Que dit le Code de la commande publique ?
Le Code de la commande publique permet d’utiliser une procédure avec négociation plutôt qu’un appel d’offres dans une série de cas qu’il énumère. Les difficultés particulières rencontrées dans la passation des marchés d’assurances pourraient, estime le rapport Chrétien Dagès précité, « laisser penser que le recours à la négociation peut être justifié parce que les besoins des collectivités locales [en la matière] ne peuvent être satisfaits « sans adapter des solutions immédiatement disponibles » (art. R. 2124-3, 1°) » ou parce que ces marchés « ne peuvent être attribués sans négociation préalable du fait de leur complexité (art. R. 2124-3, 2°), en particulier dans le cadre des groupements de commande ». Le guide attendu pour juin devra donc sécuriser le recours à cette procédure dérogatoire en confirmant l’applicabilité de ces dispositions aux marchés d’assurances.