A Nantes, une place-belvédère pour franchir la Loire

Parfois, les mots manquent pour qualifier une création. C’est le cas pour l’ouvrage d’art qui succédera au pont Anne-de-Bretagne reliant le centre-ville historique à la partie ouest de l’île de Nantes. Pont-jardin, pont-place, pont-belvédère… En plus d’accueillir deux lignes de tramway et des espaces de circulation pour les voitures, vélos et piétons, le futur ouvrage a été conçu comme un espace public à part entière en proposant demain de nouveaux usages et une nouvelle relation au fleuve.

Le pont de 145 mètres de long verra sa largeur tripler, jusqu’à 53 mètres en moyenne. « C’est l’exact équivalent du cours Saint-André, alors oui, c’est une véritable place qui sera créée sur la Loire » assure Johanna Rolland, présidente de Nantes Métropole. « Planté de tout son long, il sera le trait d’union entre le projet « Loire au cœur - Petite-Hollande » conduit par Henri Bava et celui de l’île de Nantes imaginé par Jacqueline Osty » ajoute-t-elle.

Un lieu de contemplation sur la Loire

Le projet repose sur la réutilisation du pont actuel et la construction d’un second ouvrage d’art. La largeur du pont Anne-de-Bretagne sera ainsi plus que triplée pour passer de 18 à 53 mètres en moyenne.

Conçu pour accueillir les futures lignes de tramway 6 et 7 entre Rezé et La Chapelle-sur-Erdre ou Saint-Herblain, il laissera une large place aux vélos avec une « voie magistrale » à double sens à l’est et une large bande cyclable monodirectionnelle à l’ouest.

Le pont deviendra accessible à tous avec des pentes abaissées de 6 % à 4 % maximum. Pour cela, l’ouvrage existant sera conservé mais rabaissé de 50 cm environ. Avec 1 270 m2 d’espaces verts, soit près de 20 % de la surface totale, l’ouvrage offrira une promenade plantée, un nouvel espace de respiration.

« Mon objectif est de créer plus qu’un lien, un lieu de promenade et de contemplation sur la Loire, grâce au jardin linéaire, aux « coussins de nature » et à la grande place suspendue, explique l’architecte Dietmar Feichtinger. J’enracine le pont sur les quais par de multiples passerelles. Je propose un véritable espace public généreux, un lieu vivant pour l’avenir où l’on profite du fleuve, de l’air, des lumières de Nantes. Je ne pense pas qu’il y a un pont comparable en France, ni dans le monde, par la largeur, son rapport circulation douce/tram aux voies pour voitures, son statut d’un véritable lieu public sur l’eau et ses ambitions écologiques. »

L’actuel pont réemployé

Transformer le pont existant, en abaissant son tablier pour le rendre moins pentu (passer de 6 à 4 %) et y associer un nouvel ouvrage à l’ouest pour former un nouveau pont Anne-de-Bretagne, c’est le défi du projet sélectionné.

« Grâce au réemploi du pont actuel, ce sont 4 800 tonnes de béton qui n’auront pas à être détruites et environ 2 600 m3 de béton et 1 300 tonnes d’acier qui ne seront pas produits pour le remplacer. Soit une économie de 6 000 tonnes d’équivalent en CO2 (eqCO2) par rapport à un scenario de remplacement total du pont » déclare Céline Villalon, en charge du projet chez GTM Ouest.

Le choix d’un acheminement par barge sur le fleuve a été un important dans le choix du jury : transporter les 2 000 tonnes de charpente va permettre d’éviter 200 allers-retours en camion.

La mutualisation des moyens avec le chantier du futur CHU, pour la fabrication des bétons notamment, participera également à cette logique d’écoconception. Par tous ses aspects, l’approche proposée de construire de manière plus sobre et plus responsable a séduit le jury, comme la commission consultative de citoyens appelée à donner son avis.

Evalué à 50 millions d’euros HT, le projet continuera d’être travaillé notamment sur le raccordement et l’ancrage du pont avec ses rives, la densité de la végétation, la sécurisation des flux cyclistes, ainsi que des choix techniques et esthétiques pour la partie garde-corps. Cette phase devrait aboutir à la finalisation d’un avant-projet pour mi-2023. Suivront au printemps 2024, les autorisations administratives afin de démarrer les travaux au second semestre 2024 pour une livraison estimée en 2026-2027.