A Nantes, l'estacade prend une dimension patrimoniale

A Nantes, le site d’un ancien chantier naval se transforme en lieu de promenade et de mémoire. Sous la grue qui le domine, le quai et l’estacade ont été réhabilités en jouant finement des restes de plusieurs générations de béton.

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L'estacade était fortement dégradée et a fait l'objet de multiples renforts en béton, comme en fibres de carbone.

Récente propriétaire des lieux, la ville de Nantes ne disposait plus d’informations relatives à l'estacade qui supporte la grue noire sur le site des anciens chantiers navals de la société Dubigeon. Comme la grue noire emblématique qui dominait ce site est aujourd’hui inscrite aux monuments historiques, elle a déjà été restaurée. Mais son estacade était en mauvais état. Afin de transformer la friche industrielle en lieu de visite et de mémoire, la ville devait donc refaire le quai et son estacade en dessous.

Préalable indispensable, l’état des structures, poutres, poteaux et diagonales de béton plongeant dans la Loire ainsi que leurs fondations, devait faire l'objet d'un diagnostic approfondi.

Au fil de son histoire, le chantier a connu quatre grandes phases : configuration d’accueil des bateaux (ouvrage en Duc d’Albe), agrandissement puis deux renforcements, l’un longitudinal pour le déplacement de la grue le long du quai et perpendiculaire dit ancrage-tempête pour assurer sa stabilité, quelles que soient les circonstances météo.

« Nous avons acquis numériquement la géométrie d’ensemble par un classique nuage de points », raconte Anne Travers, responsable des ouvrages maritimes chez SCE, maître d’œuvre de l’opération, chargée d’abord de caractériser l’estacade. Mais la grande inconnue était la capacité de charge de l’ensemble. C’est pourquoi nous avons réalisé de nombreux sondages afin d’évaluer l’état de conservation des bétons et des ferraillages, aboutir à une modélisation fine de l’existant et décider des opérations à réaliser. »

Dalle trop abîmée pour être réparée

Finalement, il était impensable de réparer la dalle supérieure. Ses structures métalliques étaient saines mais elle était trop fine, parfois d’une épaisseur de 10 cm seulement et trop abîmée. Elle a été hydro-démolie, le béton retiré au jet d’eau à 2800 bars. Ensuite des petites poutres ont été sciées et retirées. Sur les quinze rangées des plus grosses il n’en a été conservé que sept. Le tout a été coulé à nouveau dans le béton, puis surmonté et fixé à une dalle neuve de 20 cm d’épaisseur, glissée en portions préfabriquées. « Nous avons utilisé un béton PM-ES adapté aux milieux marins et à temps de séchage court pour une mise en place rapide des dalles », explique Didier Moretti, responsable des travaux spéciaux, chez ETPO, l’entreprise qui a effectué les travaux.

Renforcements par fibre de carbone

En parallèle au travail sur cette dalle de 60 m sur 10 m, le même béton a été employé pour réparer l’infrastructure, la partie la plus ardue du chantier. Le béton vétuste a été retiré au burin, remplacé par du béton neuf. Et certaines poutres ont été renforcées par fibre de carbone. Une fois restaurée, l’infrastructure a été protégée par un enduit imperméabilisant. Au total, 1200 m linéaires de béton armé ont été traités au rythme des marées.

A cet endroit de la Loire, le marnage atteint 6 m. A son plus haut, l’eau arrive à moins de 2 m en dessous du quai, d’une estacade qui en fait 15 au total. « Le temps du chantier, entre juin 2022 et août 2023, le cadencement des équipes a fait l'objet d'une organisation très spécifique, compte tenu en particulier de quelques surprises. Les fondations étaient solides mais nous avons dû rejointoyer presqu’intégralement le mur en pierres de soutènement du terre-plein sur lequel s’appuie l’estacade », indique Didier Moretti.

2 à 3 tonnes de charge admissible au m²

Si la dalle a été calibrée pour supporter le passage de piétons et d’éventuels véhicules de secours, l’infrastructure a grosso modo retrouvé sa capacité de portance initiale. « La grue maniant des charges allant jusqu’à 13 tonnes, le quai a dû avoir à supporter par endroits jusqu’à 2 ou 3 tonnes au m². Les besoins d’aujourd’hui sont plutôt de 300 kg au m2 », indique Didier Moretti.

Ces travaux ont nécessité un budget de 1,3 million d’euros HT.

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