Les cartes sont de nouveau rebattues concernant la rénovation thermique des tours Nuages, construites dans les années 1970 par Emile Aillaud et labellisées « Architecture contemporaine remarquable » (ACR). En septembre dernier, la Direction générale des patrimoines et de l’architecture (DGPA) avait apporté une réponse négative concernant la protection au titre des monuments historiques de l’unique tour 17, considérant que l’intérêt de cette tour « ne peut être dissocié de l’ensemble auquel elle appartient et dont elle n’est qu’une des composantes. » Haute de 100 m, elle devait changer d’usage en accueillant des logements en accession et surtout être le seul des 18 bâtiments du grand ensemble à faire l’objet d’une restauration à l’identique.
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Le maire de Nanterre, Raphaël Adam, a donc à nouveau écrit à la ministre Rachida Dati en février en indiquant qu’il n’avait jamais été fermé à l’idée d’une protection plus large englobant les tours avoisinantes ainsi que le pied des tours concernées dans ce périmètre, dont la dalle du Serpent. Le ministère de la Culture n’y semble pas favorable : « La protection au titre des monuments historiques doit être réservée aux immeubles se distinguant individuellement pour leur intérêt au regard de l’histoire ou de l’art, et n’est donc pas une mesure adaptée pour un ensemble urbain tel que celui-ci », indique-t-il au Moniteur.
« L’intérêt d’élaborer un site patrimonial remarquable n’apparaît pas évident »
De même, il explique que « l’intérêt d’élaborer un site patrimonial remarquable (SPR) dans ce quartier n’apparaît pas évident, compte tenu de l’importance des évolutions envisagées », alors même que c’est lui qui l’avait proposé. Et de suggérer à la mairie de se contenter de la protection des tours Nuages au titre du plan local d’urbanisme et de leur reconnaissance en tant qu’ensemble cohérent.
Surcoûts de charges liés au statut d’IGH
La Ville de Nanterre, avec la région Ile-de-France et le département des Hauts-de-Seine, avait pourtant mis au point, dans le cadre des conventions avec l’Anru, un projet de rénovation urbaine visant à garantir une mixité sociale via la démolition d’une seule tour et de changements d’usages pour les six bâtiments cédés à Altarea Cogedim. Mais une copropriété seule aurait des difficultés à absorber les surcoûts de charges liés au statut d’IGH sans l’aide apportée par la protection au titre des monuments historiques. Le concours du ministère de la Culture était donc nécessaire pour qu’Histoire et Patrimoine (filiale d’Altarea) puisse réaliser les travaux de restauration des émaux de Fabio Rieti en façade de la tour 17 avec l’architecte du patrimoine Bertrand Monchecourt et pour que les futurs propriétaires profitent de la défiscalisation des charges rendue possible grâce à la protection.
Eviter les démolitions
« Cela nécessite un positionnement politique au niveau national car l’enjeu c’est la potentielle démolition de la tour 17, voire de la 19 [tour de logements sociaux de 100 m de haut, propriété de Nanterre Coop Habitat, dont le coût de fonctionnement est élevé, NDLR], que nous ne souhaitons pas, tant du point de vue patrimonial qu’écologique et social », rappelle le maire.
Livraison de la tour pilote début 2026
Pendant ce temps, les travaux menés par l’agence RVA et l’entreprise Citynox se poursuivent sur la tour pilote qui doit être livrée début 2026. Le même procédé comprenant une isolation par l’extérieur avec des panneaux en inox et la pose de nouvelles fenêtres doit être appliqué à l’ensemble des tours appartenant aux bailleurs sociaux Nanterre Coop Habitat et Hauts-de-Seine Habitat. « Cette impasse est due aux contradictions du ministère de la Culture qui considère le label ACR comme une matière à projets et non comme un patrimoine à sauvegarder ! », déplore Bernard Toulier, conservateur général honoraire du patrimoine, membre des associations Sites et Monuments et Docomomo France.
Un vaste projet de rénovation pour les tours Nuages
Les 18 tours abritaient 1 607 logements sociaux. La 121 doit être démolie pour ouvrir le parc André-Malraux sur l’avenue Pablo-Picasso. Onze tours (1 075 logements à loyer modéré) conservées par les bailleurs sociaux Nanterre Coop Habitat et Hauts-de-Seine Habitat feront l’objet d’une réhabilitation thermique par RVA et les artistes Pierre Di Sciullo et Amélie Lebleu.
Six tours doivent changer d’usage après leur vente à Altarea Cogedim. La situation reste incertaine pour la 17 en l’absence de protection MH mais aussi pour les tours 24 et 29 faute de subventions publiques pour leur changement d’usage. En revanche, les tours 1 et 123, qui font l’objet d’une promesse de vente, ont été libérées pour permettre leur transformation en logements intermédiaires et accession à la propriété avec, en partie basse, un tiers lieu culturel comprenant une ludothèque, un fablab et des locaux associatifs.