C’est une « première mondiale » que promettent le bailleur social Seqens et le cimentier Holcim :
un immeuble dont la super-structure sera réalisée en béton composé à base d’éléments 100% recyclés.
Un projet nommé Recygénie, pour la construction d’environ 220 logements sur l’îlot Brenu à Gennevilliers, né d’un partenariat d’innovation :
« Depuis deux, trois ans, nous avons avec Action Logement un ensemble de discussions pour la démonstration de notre volonté commune de mettre en œuvre des solutions à plus faible impact environnemental », raconte ainsi François Petry, DG de Holcim France.
Un projet en phase avec la philosophie de Seqens.
« Nous sommes une jeune entreprise à mission qui a inscrit l’innovation dans sa raison d’être », confirme Stéphane Dauphin, son directeur général.
« Nous nous devons d’être au rendez-vous de la stratégie nationale bas carbone en 2050 et même dès 2040 selon les ambitions d’Action logement. Il y va, certes, de notre volonté, de nos moyens, de notre capacité à concevoir et à faire mais, nous savons aussi que sans l’écosystème du bâtiment, les industriels, nous n’y arriverons pas seuls. »
Holcim a donc proposé à Seqens un béton composé avec des granulats et du sable 100% recyclés, avec des eaux de process recyclées et un clinker 100% recyclé. Le maître d'ouvrage a de son côté mobilisé l’architecte A26 BLM, son bureau d’études Ingea, ainsi que le bureau de Contrôle Qualiconsult.
Granulats, eaux et clinker
Dans le détail, les granulats sont composés de gravillons et de sables provenant de centrales à béton parisiennes et de divers déchets de démolition, dont une partie est d’ailleurs issue de l’ancienne résidence Brenu de Gennevilliers (166 logements).
Au total, près de 2200 tonnes de granulats ont été préparés spécialement pour le projet Recygénie.

L’eau recyclée provient, elle, exclusivement du circuit des eaux de « process », à savoir celles ayant déjà été utilisée pour le nettoyage des équipements et des infrastructures de la centrale. Par ailleurs, des bassins supplémentaires pour le stockage des eaux de pluies, pouvant être injectées dans le circuit des eaux de process, ont été créés sur la dite centrale.
Enfin, les 2000 tonnes de clinker fabriquées dans l’usine alsacienne d’Altkirch à partir de coproduits de l’industrie, déjà décarbonés (voir encadré), ont permis d’économiser environ 3000 tonnes de ressources naturelles qui auraient été prélevées en carrière tout en valorisant des déchets dans le cadre de boucles d’économie circulaire locales.
Ce clinker a permis la réalisation, grâce à l’ajout d’autres composants recyclés comme le laitier, d’un ciment normalisé CEM III/A 42,5 N destiné spécifiquement au projet.
« Nous avons obtenu du CSTB un Atex spécifique pour le chantier – un Atex de cas b - car nous sommes en avance sur la réglementation. Le sujet est de monter un bâtiment (voiles intérieurs et extérieurs, façades matricées et dalles des toitures-terrasses) avec un béton recyclé ayant des caractéristiques proches des bétons traditionnels actuels », poursuit François Petry.
Premiers coulages fin avril 2023
Seqens a travaillé dans un premier temps avec Holcim dans le cadre de cette expérimentation pour la mise à disposition du liant dans des conditions de marché ordinaires. « Aujourd’hui le béton est un matériau tellement utilisé et sur lequel les enjeux de décarbonation sont tellement importants que nous voulions montrer qu’on pouvait améliorer le bilan de ce mode constructif », raconte Stéphane Dauphin.
Puis dans l’appel d’offres d’entreprises a été précisée l’obligation pour le lauréat d’utiliser ce matériau mis à disposition. Il fallait s’assurer que le constructeur soit en capacité de mettre en œuvre ce matériau et c’était le cas de Legendre qui érigera donc ce bâtiment. Le premier coulage du béton entièrement recyclé de la superstructure est prévu à la fin du mois d'avril.
Au total, 1600 m3 de béton 100% recyclé vont être utilisés pour construire la superstructure des deux bâtiments Seqens, respectivement de 5 et 6 niveaux pour un total de 76 logements.
La livraison des logements est quant à elle annoncée pour le dernier trimestre 2024.
« C’est une très belle opération, totalement innovante et pour que nous puissions la renouveler, après avoir démontré sa réussite technique, il faudra industrialiser le process pour que les projets puissent se faire à des coûts plus abordables.
Pour cela, il est notamment nécessaire de développer la filière de recyclage et le réseau industriel qui permettront de produire ce matériau au plus près des chantiers », explique Stéphane Dauphin.
Pour Holcim, cette première expérience est une étape d’un processus plus global : « en parallèle de ce béton 100% recyclé, nous développons des solutions décarbonées. Pour Holcim l’étape d’après consistera à combiner les deux approches pour des solutions décarbonées 100% recyclées. Nous avons actuellement 11 projets en cours : de béton décarboné, d’impression 3D, de béton recyclé, Nous sommes vraiment rentrés dans un cycle de démonstration de la baisse de l’impact de la construction », assure François Petry.
Pour Seqens et ses salariés, au-delà de l’innovation et de la fierté, cette première mondiale « participe aussi de la visibilité logement social et de sa capacité à innover, à mettre en œuvre des processus vertueux comme on a pu le voir avec des projets de réemploi ou de récupération de chaleur. En effet, les bailleurs sociaux sont les premiers au rendez-vous en matière d’innovation ou pour le traitement des étiquettes énergétiques E, F et G. Et nous savons que ce sera beaucoup plus dur pour d’autres acteurs.», conclut-il.