1. Le sort des contrats immobiliers dans la procédure collective

Vente et contrats spéciaux -

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Moins d'incertitudes sur le contrat de bail

Dans la vie de l'entreprise, l'importance des baux affectés à l'activité du débiteur est telle que la loi a conféré à ces contrats un statut particulier bien avant les réformes de 2005 et 2008. Lorsque le preneur est en sauvegarde ou en redressement judiciaire, les baux affectés à l'activité de l'entreprise en difficulté font l'objet d'un régime spécial rendant plus difficile leur résiliation en cas de manquement du locataire à ses obligations. En particulier, le bailleur ne peut agir en résiliation en cas de non-paiement des loyers ou charges postérieurs au jugement d'ouverture qu'après l'expiration d'un délai de trois mois à compter de celui-ci. La réforme de 2005 avait fait naître une forte incertitude sur l'articulation de ce régime spécial de l'article L622-14 du code de commerce avec le régime général des contrats en cours de l'article L622-13 qui prohibe la résiliation de plein droit du seul fait de l'ouverture d'une procédure et confère à l'administrateur judiciaire une option de poursuivre ou non ces contrats sur mise en demeure du créancier concerné.

La situation est désormais clarifiée : bien que n'étant pas exclu du régime général des contrats en cours (contrairement aux contrats de travail ou de fiducie : voir encadré ci-dessous), le contrat de bail suit le droit commun de la poursuite des contrats en cours à la seule initiative de l'administrateur, mais échappe désormais au risque de résiliation à l'initiative du bailleur. Celui-ci ne peut plus prendre l'initiative de mettre l'administrateur en demeure d'opter pour la poursuite ou non du bail. L'administrateur reste néanmoins obligé de résilier le bail s'il ne dispose pas des fonds nécessaires pour assurer le paiement à bonne date du loyer et des charges. La position du bailleur en ressort de nouveau affaiblie. Toutefois, en cas de résiliation, qui prend effet à la date à laquelle le bailleur est informé de la décision de l'administrateur judiciaire de ne pas poursuivre le bail, son droit à déclarer une créance de dommages et intérêts est directement énoncé à l'article L622-14 du code de commerce. La restitution des sommes dues au débiteur (dépôt de garantie ou loyers payés d'avance au jour de la résiliation) est alors différée jusqu'à ce qu'il soit statué sur la créance indemnitaire ainsi déclarée.

En cas de liquidation judiciaire, le sort du bail des immeubles affectés à l'activité de l'entreprise en difficulté est également réorganisé via l'introduction d'un nouvel article L641-11-1 du code de commerce, rédigé sur le modèle des dispositions applicables aux contrats en cours en période d'observation et via une nouvelle rédaction de l'article L641-12 du code de commerce spécifique au bail. Pour préserver ce qui apparaît comme un actif de la liquidation, cet article prévoit trois cas - seulement trois - de résiliation du bail, à savoir :

1. la résiliation à l'initiative du liquidateur (lorsque le droit au bail est sans valeur) ;

2. la résiliation à l'initiative du bailleur pour un défaut antérieur au jugement d'ouverture (ou de liquidation) autre qu'un défaut de paiement ;

3. la résiliation à l'initiative du bailleur pour un défaut de paiement postérieur au jugement d'ouverture (ou de liquidation) dans les mêmes conditions qu'en période d'observation.

En complément des dispositions d'ordre public de l'article L145-16 du code de commerce écartant les clauses prohibant la cession du bail à l'acquéreur du fonds de commerce, l'article L641-12 du code de commerce reprend, en cas de cession du droit au bail, les dispositions de l'article L622-15 du code de commerce réputant non écrite tout clause imposant au cédant, en cas de cession du bail, des dispositions solidaires avec le cessionnaire.

Une lacune en cas de défaillance du bailleur

En revanche, l'ordonnance de 2008 est muette sur la question d'un bailleur défaillant. Faute de régime spécial, le régime général des contrats en cours pourrait trouver à s'appliquer, bien que le point soit contesté s'agissant des baux commerciaux eu égard au conflit entre deux statuts d'ordre public. La position du preneur se trouverait même, dans ce cas, amoindrie par l'ordonnance : faute de mise en demeure du preneur à l'administrateur judiciaire du bailleur défaillant d'opter pour la poursuite du bail, le contrat non poursuivi pourrait en effet se trouver résilié en application du IV nouveau de l'article L622-13 du code de commerce : « À la demande de l'administrateur, la résiliation est prononcée par le juge-commissaire si elle est nécessaire à la sauvegarde du débiteur et ne porte pas une atteinte excessive aux intérêts du cocontractant. » Il est regrettable pour la sécurité contractuelle que ce risque ne soit, à ce jour, toujours pas levé.

Contrat de crédit-bail : l'interdiction d'achat est levée

Le régime du crédit-bail immobilier en procédure collective est très complexe du fait de la nature de l'opération, assimilée à une opération de crédit par le code monétaire et financier, mais conférant au seul crédit-bailleur la propriété de l'immeuble financé (voir Opé. Immo., n° 11, janvier 2009, p. 21). Il en résulte un équilibre des pouvoirs délicat entre la qualité de créancier du crédit-bailleur et l'intérêt que peut avoir le débiteur à lever l'option et devenir propriétaire de l'immeuble financé. En particulier, l'égalité de traitement entre créanciers, et plus précisément l'interdiction des paiements antérieurs, conduisait à empêcher toute levée d'option en cas d'impayés au jour du jugement d'ouverture. C'est la raison pour laquelle l'article L622-7 du code de commerce est complété pour ajouter un cas de dispense à la prohibition du paiement des créances antérieures et autoriser un tel paiement « pour lever l'option d'achat d'un contrat de crédit-bail, lorsque cette levée d'option est justifiée par la poursuite de l'activité et que le paiement à intervenir est d'un montant inférieur à la valeur vénale du bien objet du contrat ».

La même règle s'applique en cas de liquidation judiciaire lorsqu'il s'agit de faciliter la cession des actifs (art. L641-3 du code de commerce).

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