« Dessinez !» Par cet appel, Luc Schuiten, parrain des 10ème Défis du bois, a ouvert la cérémonie de clôture, le 20 mai à Epinal. S’adressant sans micro aux 50 étudiants formés à l’architecture et à l’ingénierie bois en Lorraine et dans huit pays, l’architecte et auteur de bandes dessinées les a invités à se débarrasser de tout filtre technologique, au profit d’une transcription graphique immédiate de leurs idées. Dans son intervention improvisée qui s’adressait également aux professionnels et aux élus qui soutiennent la manifestation co-organisée par les écoles d’architecture et d’ingénierie bois de Nancy et Epinal (Ensan et Enstib), l’auteur de Vers une Cité Végétale a plaidé pour la diversité, face à la standardisation imposée par les canons publicitaires : « La perte de la spécificité architecturale est aussi grave que celle de la biodiversité », estime l’artiste bruxellois.

Malicieux et sérieux
Source d’inspiration de son message, les 10 oeuvres réalisées au cours des huit jours précédents répondaient au sujet intitulé « La Ruelle des Foligneuses ». Aussi malicieux que sérieux, Jean-Claude Bignon, professeur à l’école d’architecture de Nancy, habille un appel à l’utopie sous un style académique : « Toutes vos folies, alignées le long d’une magnifique allée bordée de tilleuls, édifieront collectivement une voie d’un genre nouveau ». Pour cadrer l’imagination, le cahier des charges invitait les architectes et ingénieurs à décliner la forme de l’heptaèdre, prisme à sept faces et archétype de la maison, sur des emprises de 70 m2, sans jamais toucher aux arbres, mais en dialoguant avec eux. Equipées d’1 m3 de bois chacune, les 10 équipes d’architectes et d’ingénieurs, filles et garçons, français et étrangers, ont adhéré à 100 % au projet de « construire le monde de demain », slogan des 10èmes défis.

La dimension utopique et artisanale n’a pas empêché à la manifestation de franchir un bond technologique : aux deux extrémités de la ruelle, deux thésards de l’Ensan et des chercheurs de l’Enstib ont utilisé des robots de l’école d’ingénieurs pour réaliser deux folies en structure plissée et en caissons. La démonstration des infinies variations d’angles permises par la robotisation appelle encore quelques progrès informatiques, en particulier dans les jointures de la seconde. Cette perspective stimule le professeur Bignon, qui rêve « de réunir le bois et l’octet, un couple diabolique qui esquisse l’avenir dans lequel nous nous glissons »…