Les dix équipes du Grand Paris de Nicolas Sarkozy se sont rapidement retrouvées comme le client d’un grand restaurant : on l’accueille avec un empressement appuyé, on l’entoure, mais une fois le repas terminé il ennuie déjà, et l’on se crispe s’il ne cède pas sa place assez vite à un nouveau venu. Pendant que la plupart des « dix » soumissionnent désormais sur des appels d’offres localisés après avoir cherché à forger le cadre raisonné d’une réflexion globale, Cécile Duflot a présenté cinq ans plus tard, le lauréat de la consultation pour les futures 72 gares du métro automatique en rocade, Jacques Ferrier. À cette occasion, la nouvelle ministre de l’Égalité des territoires a dit rejeter la vision « Dubaï-sur-Seine » qui lui avait paru caractériser la première consultation.
Gage d’indépendance, les architectes enseignants et universitaires qui nous proposent ici leur vision décalée du Grand Paris, en miroir, n’ont pas de grand bureau à faire tourner ni de grandes commandes à honorer. Le texte général signé par Cristiana Mazzoni et Yannis Tsiomis n’en dessine pas moins l’ambitieux tableau d’une gouvernance métropolitaine à l’écoute des pratiques, bref des gens. Ceux que l’on voit, enfin, sur les nombreuses photos qui accompagnent les contributions – tout comme on pouvait les voir d’ailleurs chez Secchi-Vigano, seuls parmi les dix, et universitaires eux aussi. Ce livre présente aussi l’immense mérite de mettre en lumière un impensé métropolitain, celui que l’on retrouve par exemple dans les calculs financiers partiels (et partiaux) des promoteurs et investisseurs. Ces derniers prennent en effet trop rarement en compte dans leurs choix d’implantation et d’investissement cette condition métropolitaine. Et pourtant, c’est bel et bien d’elle dont il s’agit lorsque l’on pense synergies et proximités, et plus trivialement même image métropolitaine – ces fameux classements des villes où il fait si bon vivre. Mais a-t-on jamais vu la finance se mettre au chevet des territoires ? Ceci dit, ce livre montre aussi comment un territoire peut très bien se porter tout en se présentant comme un « malade » aux yeux de la finance !
