La Cité de Refuge de Le Corbusier, rue Cantagrel à Paris XIIIe, fera peau neuve au terme d’une grande campagne de réhabilitation qui devrait débuter en octobre 2011. Achevé en 1933, ce bâtiment caritatif de l’Armée du Salut est marqué dans sa chair par plus de 80 années passées à secourir les plus démunis. Des années durant lesquelles la réflexion patrimoniale a été dépassée par l’évolution des conditions d’accueil, les besoins urgents en nouveaux locaux, les exigences de la sécurité incendie, et la dégradation du second œuvre. Ainsi, si la Cité de Refuge a gardé globalement son visage, ces rénovations et restructurations, la plupart postérieures à Le Corbusier, ont transformé un peu partout l’œuvre originale.
Aujourd’hui, François Gruson, architecte, et François Chatillon, architecte en chef des Monuments historiques, tous deux chargés de la restauration et de la restructuration de la Cité de Refuge, remettent tout à plat sous la houlette du groupe 3F, maître d’ouvrage de l’opération. Un dialogue ininterrompu avec l’Armée du Salut, la Fondation Le Corbusier et la Drac. Mais, comme le souligne Pierre Paulot, directeur de l’architecture, de l’aménagement et de l’environnement du groupe 3F : « Attention, la Cité de Refuge n’est pas un bâtiment resté sous cloche ni un musée, et ne doit pas le devenir. C’est pourquoi l’enjeu consiste ici à concilier le projet social de l’Armée du Salut, les évolutions de son programme, avec la restauration patrimoniale qui conserve ou restitue. » Les transformations relatives à la mise aux normes du bâtiment (accessibilité aux personnes handicapées, sécurité incendie, réglementation thermique…) se glisseront discrètement dans les plis du bâtiment.
Panneaux de tôle déposés
La restauration concerne les parties inscrites en 1975 à l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques : façades, toit-terrasse, hall d’accueil et escaliers. D’autres espaces remarquables, à ce jour non protégés, profitent de cette opération pour retrouver leur éclat. C’est le cas de la zone d’accès depuis la rue du Chevaleret, avec sa rampe qui serpente, ses pilotis et sa mythique loge de gardien en forme de nouille. Seront aussi restaurés la salle polyvalente, la cafétéria, le réfectoire ainsi que deux chambres d’époque, dont celle de la princesse de Polignac, mécène de l’Armée du Salut, qui y avait son pied à terre.
Le plus spectaculaire sera le lifting de la façade principale, emblématique avec ses brise-soleil et ses couleurs primaires. Les panneaux de tôle colorés qui, bien après la mort de l’architecte, habillèrent les allèges lors d’un ravalement de fortune, vont être déposés. Le béton réapparaîtra comme autrefois, et des sondages stratigraphiques aideront à retrouver la polychromie d’origine (dont on ignore s’il s’agit des couleurs primaires ou de celles de l’Armée du Salut).
Le projet de restructuration concerne essentiellement l’hébergement avec la transformation des étroites « cellules » corbuséennes (1,83 m de largeur) en studettes de 15 m2 et de 2,40 m de largeur, avec salle d’eau, coin cuisine et bureau. Deux d’entre elles prendront la place de trois chambres existantes sans perturber la trame de la façade grâce à des plans dessinés en chicane. Au final, ces agrandissements ne diminueront pas la capacité d’accueil, puisque la moitié du Centre Espoir (dessiné par les architectes Georges Candilis et Philippe Verrey et en continuité avec la Cité de Refuge) sera aussi restructurée pour offrir ce même type d’hébergement.





