Les employeurs du BTP, avec la loi Avenir professionnel
Annoncée comme le « big bang de la formation » par le gouvernement, la loi Avenir professionnel de septembre 2018 a semé la pagaille dans le BTP. La transformation de l'Opca Constructys en Opco a en effet engendré plus de deux ans de péripéties, sur fond de dissensions entre partenaires sociaux et de recours judiciaires. A commencer par le placement de l'organisme sous administration provisoire, au printemps 2020, à la suite de l'annulation de ses statuts par la justice.
L'été dernier, Constructys a, en l'espace de quelques semaines, perdu puis retrouvé son agrément ministériel à la faveur de l'adoption, dans l'urgence, d'un nouvel accord constitutif.
Un épisode qui a donné des sueurs froides à la profession, confrontée à l'interruption du paiement des formations et au risque de rattachement à un autre secteur. Doté de nouveaux statuts, Constructys vient seulement, début 2022, de retrouver une gouvernance paritaire.
Le monde HLM et les promoteurs, avec les coupes budgétaires
Au début du quinquennat, les professionnels du bâtiment ont demandé au gouvernement « de ne surtout rien toucher » aux mesures déjà en place. L'idée étant d'aider le président Macron à tenir sa promesse de créer un choc de l'offre de logements. Finalement, ce sont les organismes HLM qui auront été choqués par l'ampleur des coupes budgétaires dans ce secteur. Entre la baisse des APL dès 2018, la mise en place de la réduction de loyer de solidarité (RLS) en symétrie, et la suppression de l'APL Accession, celles-ci ont représenté 15 Mds € en cinq ans. Face à la réforme d'Action Logement et à l'obligation de regroupement, les bailleurs sociaux, acculés, ont levé le pied sur la production de HLM, ce qui a ricoché sur la production de logements privés - puisque les programmes immobiliers contiennent une servitude sociale.
La crise sanitaire et les élections municipales finissent d'enrayer une machine à construire du logement déjà malmenée, sans aucun portage politique national. Faut-il rappeler la création de l'impôt sur la fortune immobilière, suite à la suppression de l'ISF ? Résultat : les maires se font élire avec la promesse de moins bâtir. En 2020, la production de logements tombe au plus bas avec seulement 381 600 permis de construire octroyés. Elle se redresse en 2021 à 471 000 unités, un simple effet de rattrapage selon la Fédération des promoteurs immobiliers. La nomination à l'été 2020 d'Emmanuelle Wargon au ministère du Logement pour renouer des liens avec les professionnels n'y change rien. Les coupes budgétaires émanant de Bercy et pilotées par Julien Denormandie en première partie de mandat ont durablement fragilisé le secteur. Matignon se targue d'avoir accordé 100 000 permis de construire de plus sur le mandat par rapport au précédent. Plutôt que de choc, il faudrait parler de pichenette.
Le bâtiment, avec la REP
« Elle pourrait coûter près de 2 Mds € par an et remettrait en cause inutilement des schémas de collecte et de valorisation qui, aujourd'hui, fonctionnent » : en septembre 2019, le président de la FFB Jacques Chanut s'oppose fermement à la création, dans le cadre du projet de loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec), d'une filière de « responsabilité élargie du producteur » (REP) pour les déchets du bâtiment. Après des négociations serrées, la promulgation de la loi en février 2020 et une étude de préfiguration de l'Ademe, la REP entre finalement en vigueur le 1er janvier 2022. Les « metteurs sur le marché » des produits de construction sont tenus, via des éco-organismes, d'assurer la reprise gratuite des déchets triés par grands flux de matière (ferraille, bois, gravats, etc.).
Les TP, avec le feuilleton du GNR
Entre un surcoût évalué à 700 M€, l'absence de solution énergétique alternative au diesel et des agriculteurs épargnés, les entreprises de travaux publics étaient déjà bien remontées contre la disparition annoncée du gazole non routier (GNR). Les valses-hésitations de l'exécutif sur la date de suppression de cet avantage fiscal ont achevé de jouer avec leurs nerfs.
Après un premier report d'un an au 1er juillet 2021, les effets économiques de la pandémie ont justifié un nouveau décalage. Le secteur en bénéficie désormais jusqu'au 1er janvier 2023 ! Un sursis salutaire pour les TP, malgré une ultime remise en cause de ce report à la mi-2021, heureusement sans lendemain.
Les collectivités, avec la réforme de la fiscalité locale
Au choc des dotations du quinquennat Hollande aura succédé le choc fiscal de la présidence Macron, avec le même effet sur le moral des élus locaux. La suppression de la taxe d'habitation ancre dans leur esprit le sentiment d'une remise en cause rampante de la décentralisation. La maire de Paris Anne Hidalgo - alors déjà candidate à l'Elysée - l'a exprimé le 23 septembre dernier aux Rencontres finances publiques de France urbaine : « Nos investissements n'ont plus d'effets sur nos recettes. Nous ne sommes plus intéressés budgétairement à l'attractivité de nos territoires. » Certes, la compensation des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties appliquées aux HLM a mis un peu de baume au cœur en fin de quinquennat. Mais la question fiscale sera sans doute à nouveau posée par les élus locaux à l'aube du prochain mandat présidentiel. La ministre de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités locales avait d'ailleurs admis, au cours de cette même journée, « un débat nécessaire » sur l'autonomie fiscale des collectivités.