Des primes de 400 000 euros par jour si le chantier est en avance, autant de pénalités s’il est en retard. Un tarif unique qui avait de quoi motiver les équipes de Screg Belgium (groupe Colas). Qui illustre également l’importance des délais de réalisation sur une infrastructure aussi stratégique que le périphérique d’Anvers. Car le « Ring » (anneau), ainsi que le nomment les Anversois, est une artère fondamentale pour la desserte du port flamand, le second en Europe après Rotterdam. Construit à la fin des années 60, il n’avait fait l’objet d’aucun entretien structurel depuis 1977. Un intense trafic – 200 000 véhicules par jour dont la moitié de poids lourds – l’avait fait souffrir : la chaussée était fortement dégradée, les normes de sécurité actuelles n’étaient pas respectées… Il devenait donc urgent de doter la cité du diamant d’un nouvel anneau.
« Les 400 000 euros par jour de bonus/malus résultent d’une formule de calcul assez complexe, explique Etienne Scherpereel, directeur du projet à la tête de la société commerciale momentanée Tijdelijke Handelsvennootschap. Ils s’appliquent dans la limite de 10 % du montant initial du marché. » Pas question pour autant de sacrifier la sécurité sur l’autel du bonus. Aucun accident grave n’est survenu pendant les douze mois de travaux nécessaires à la rénovation de cette infrastructure, le plus important chantier de Belgique.
Le Ring en circulation pendant les travaux. L’infrastructure étant stratégique au plan régional, national et international, l’autorité gestionnaire (ministère de la Communauté flamande) a tout fait pour diminuer la gêne aux usagers. Parmi les mesures phares : laisser le Ring en circulation pendant les travaux et fluidifier les déplacements sur le « Singel », boulevard urbain parallèle au périphérique. Six ponts métalliques (interdits aux camions) ainsi qu’une quarantaine de ronds points provisoires ont ainsi été installés en un mois et demi. Pour voir l’importance de ces équipements, il suffit de mesurer l’investissement qui y est consacré : 100 millions d’euros, l’équivalent des travaux de rénovation proprement dits. « Deux périodes de travaux ont été définies, respectivement de 140 et 150 jours, explique Etienne Scherpereel. De juin à novembre 2004, nous avons traité la chaussée extérieure en direction des Pays-Bas ; d’avril à septembre 2005, c’était au tour de la chaussée intérieure. » Renouveler 14,2 km de périphérique implique de nombreux travaux préparatoires : 176 km d’égouts à visiter, réparer, voire renouveler ; 4 000 chambres techniques à inspecter, 22 ponts à rénover dont le viaduc de Merksem long de 1,5 km et ses 40 joints de dilatation à remplacer.
Concernant la chaussée, une analyse du cycle de vie basée sur le triptyque technique/économie/environnement a abouti au choix de deux types de structures : 340 000 m2 de béton armé continu (BAC) en partie sud et 540 000 m2 d’un enrobé SMA 0/7 (stone mastic asphalt) pour la partie nord, le viaduc de Merksem, les voies d’accès et les échangeurs. « Le choix du béton armé continu par le maître d’ouvrage répond aux exigences d’un trafic lourd et à la volonté d’être exempté de travaux lourds pour les trente ou quarante prochaines années », explique le directeur du projet. Le Ring est composé de deux fois quatre voies avec bandes d’arrêt d’urgence, ce qui représente plus de 30 m de chaque côté. « En voie courante, nous réalisons des bandes de 8 m de largeur et les rendements sont élevés. C’est un peu moins rapide lorsque nous réalisons des points singuliers comme les voies d’accès où les largeurs sont variables. »
Rénovation du tunnel immergé. Le rabotage de la chaussée existante sur une épaisseur de près de 70 cm génère un volume important de fraisats. Des fraisats d’enrobés qui, traités au ciment, sont réutilisés en sous-couche pour chacune des structures retenues. « Tous les BAC répondent aux normes pour la construction de route en Flandre. Ils nécessitent des granulats neufs en provenance de Wallonie dont une partie de la carrière de Screg Belgium. » Les importants volumes de béton mis en œuvre ne préjugent en rien du nombre de camions-toupies. Car au sortir du malaxeur de 6 m3 d’une des trois centrales du chantier, le béton est repris par une chargeuse et transporté par camion-benne pour alimenter le finisseur à béton. Question de rendements. Le ferraillage est réalisé manuellement, « en portant une grande attention au positionnement des aciers longitudinaux ». Mis en œuvre sur une épaisseur de 23 cm, le béton de chaussée subit ensuite une désactivation grâce à une solution sucrée et écologique. « Une façon d’améliorer l’adhérence tout en atténuant les bruits de roulement », indique Etienne Scherpereel.
Du côté des équipements de sécurité, des machines à coffrage glissant réalisent les GBA (glissière béton armé) sur l’ensemble du tracé ainsi que des caniveaux à fente pour améliorer l’évacuation des eaux pluviales jusqu’alors nettement insuffisante.
La satisfaction est de rigueur chez Screg Belgium alors que le Ring vient de rouvrir à la circulation. D’autant que d’autres marchés importants se profilent dans le cadre du « Masterplan » de la ville d’Anvers avec notamment le bouclage du périphérique et un nouveau tunnel entre les rives de l’Escaut.

